Chapitre 1

78 4 7
                                    

2 ans plus tard

  *




- Leslie, à table !



J'entends de ma chambre, ma voisine, Karine, qui a gentiment voulu m'héberger avec son mari après le drame qu'a subi ma famille. Quelle famille ? Je n'en ai plus. Cela dit, je suis plutôt contente d'être chez eux. Je n'aurais pour rien au monde voulu atterrir dans un orphelinat, à même pas sept mois de la majorité (à l'époque).


Je descends par l'escalier, donnant directement face de la cuisine. Je croise Gipsy, le chat que je déteste, et pourtant, avec qui je dois cohabiter. Je l'ai toujours détesté. Même quand j'avais dix ans et que je mangeais chez mes voisins avec mes parents, il me faisait peur, et à Killian aussi. J'ai l'impression qu'il peut me bondir dessus pour m'attaquer à tout moment ; mieux vaut l'éviter. Lorsque j'arrive dans la cuisine, je sens le regard imposant de Charlotte, ma « demi-sœur » et de David, le mari de Karine. Me fixant de plus en plus, je décide d'affronter leurs regards. Certes, je ne les ai jamais appréciés, mais je me devais de faire attention à ne pas laisser paraître mes émotions. Ils ne devaient pas savoir que je les déteste du plus profond de mon cœur. Je ne voulais vraiment pas partir dans un orphelinat. Maintenant, je m'en moque. Dans quelques semaines, je serais adulte. Je ne serais plus obligée de les supporter. Je fixe Charlotte d'un air mauvais avant que Karine ne m'invite à m'asseoir pour le dîner.


          - Tu as passé une bonne journée ? me demande-t-elle en me servant des haricots verts avec ses yeux bruns posés sur mon assiette.


           - Génial, mon interro d'histoire s'est très bien passée, je mens.


          - Très bien, je suis fière de toi Leslie. Et toi mon poussin, tu as réussi ton devoir d'espagnol ? dit-elle en s'adressant à sa fille avec un regard attendri.


           - Mouais, répond mon abrutie de demi-sœur.


Sa voix est pleine d'agacement. Elle m'insupporte et je sais que c'est réciproque. Charlotte à beau avoir un an de moins que moi, elle est aussi sournoise et malsaine que Jessica, la pire garce de tout le pays. Malheureusement pour moi, Jessica est dans ma classe. Elle est si hypocrite, elle ne pense qu'à elle même. J'avais toujours su qu'elle était très jalouse d'Helene. C'est pour cela qu'elle n'a pas pu résister à lui piquer son petit copain, Nathan. Je ne sais pas ce qu'Helene trouvait de bon chez Nathan. Elle a toujours su voir les bons côtés des gens. J'aurais dû me méfier de Nathan. Lui et Jessica forment un couple vraiment... spécial. Enfin, c'est bientôt la fin de l'année, et je n'aurais pas à les supporter de si tôt. Je vais pouvoir me reposer pendant les vacances, après avoir passé mon examen.


Après le repas qui s'est passé bien plus lentement que je ne l'aurais voulu, je file dans ma chambre et m'enferme à double tour. Je mets du Guns N' Roses à fond dans mes oreilles. Les paroles et les solos de guitare me font oublier la notion du temps. J'ouvre ma fenêtre, me hisse sur le toit de la maison. Je me pose sur les tuiles et regarde la ville de Lyon endormie, seulement les lumières de la ville s'instillant au déclin du jour. Je fais un bref tour de la ville de mes yeux fatigués. Je reconnais la bibliothèque, dans laquelle j'ai passé le plus clair de mon temps en compagnie de mon frère. Killian adorait lire. Moi aussi. Il m'a transmis son goût pour la lecture, et je prends soin de ne pas perdre cette passion, pour me rappeler de lui. Il m'emmenait toujours dans cette immense bibliothèque, je m'asseyais sur ses genoux et il me lisait toute sorte d'histoires. Il me contait Les aventures de Tintin, ou bien celles du Club des cinq. Cela peut paraître bête de se rappeler de ces détails, mais me les remémorer me fait le plus grand bien. Il me manque.


                                                                                                ***


          - Leslie, j'accompagne ton frère et ton père à la boxe, me prévient ma mère en montant dans la voiture aux côtés de Papa et Killian. Je reviens dans une demi heure d'accord ?


J'acquiesce d'un hochement de tête. Je remonte dans ma chambre pour me préparer. J'enfile un pull léger à manches bordeaux, ma veste en cuir et un jean. Je passe devant le miroir pour voir de quoi j'ai l'air. Mes cheveux châtains retombent pile juste au-dessus de mes épaules. Je me maquille légèrement, et rajoute du mascara pour que mes yeux verts paraissent beaucoup moins fatigués. Une fois satisfaite du résultat, je descends dans l'entrée et sors à mon tour de la maison. J'ai rendez-vous avec Helene au Starbucks à 17h. Je prends le bus jusqu'à ce dernier, et rejoins ma meilleure amie. Elle est assise à notre place habituelle, deux Latte en face d'elle. Je souris en la voyant hypnotisée par son cours de littérature. J'avoue qu'avoir une interro sur  Les Contemplations de Victor Hugo le lendemain sans même avoir lu le livre, c'est assez délicat. Je le comprends à sa tête. Lorsqu'elle lève les yeux de son cours en m'apercevant, un sourire se dessine sur ses lèvres.


          - Less ! Tu en as mis du temps ! J'ai cru que j'allais m'endormir sur place avec ces poèmes et ce cours ennuyeux.


          - Je sais, soufflais-je, j'attendais juste que mes parents et Killian quittent la maison avant de sortir.


On parle de tout et de rien. C'est ça qui me fait du bien avec Helene. Je sais que je peux parler librement. Je suis moi-même sans l'être à la fois. Je peux être qui je veux. Helene et moi adorons se rejoindre dans un Café pour pouvoir écrire pendant des heures. Chacune emmènent son carnet et on écrit de tout. Des citations, des nouvelles, des romans et même des haïkus. Dedans nous choisissons qui nous voulons être, pourquoi, comment... Dans l'écriture, on est maître de tout. Je passe mes plus beaux moments avec Helene. Je l'aime et pour rien au monde je ne voudrais la perdre.

N'importe où ailleurs...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant