III- Thaúma

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C'est avec soulagement que je termine ma première journée de cours. Objectivement, elle est loin d'avoir été pénible. Au contraire, Sarah m'a mise tout de suite à l'aise – mis à part sa fuite prématurée en début de matinée – et j'ai obtenu deux-trois sourires de politesse par quelques élèves passant par là. Ce n'est pas grand-chose mais, croyez-moi, quand vous êtes loin de chez vous, loin de tout, un simple sourire fait énormément de bien.

Il est encore tôt dans l'après-midi, je sais que Lorie n'a pas fini ses cours. Je pourrais en profiter pour visiter la ville mais, à bien y réfléchir, je préfère passer en coup de vent à la bibliothèque pour récupérer quelques ouvrages qui me seront utile. J'aurais toujours ce week-end pour faire le tour des curiosités de Mystery Spell.

Je m'y rends sans me perdre – et si je prends le temps de me faire la réflexion, c'est que c'est un véritable exploit – et pénètre le bâtiment sans hâte. Je préfère prendre mon temps, ces derniers mois, j'ai l'impression d'avoir vécu à 200km/h. Entre l'accident, l'enterrement, les séances chez le psy, les visites de untel ou untel, les rendez-vous avec les conseillers d'orientation et mes cauchemars, je me sens enfin un peu au calme. Une bibliothèque est vraiment un lieu merveilleux pour ça.

Je papillonne calmement, me familiarisant avec les étalages. Je repère les rayons qui me concernent avec fierté – enfin un lieu bien indiqué dans cet établissement ! – et me met en quête d'une série d'ouvrages. Je me suis fais une petite liste, que je sors aussitôt, et parcours les rayons avec attention.

Le premier se trouve facilement, le deuxième me donne un peu de fil à retordre car quelqu'un l'avait mal rangé, le troisième est en commande – dixit le documentaliste –, quant au quatrième...

Bah voyons...

Je lance un regard désespéré à l'étagère face à moi. Si je vous dis que le bouquin que je cherche est pile celui tout en haut, à trois mètres de moi, sur le seul rayon dont l'échelle est cassée, vous me croyez ?

Après avoir pleuré intérieurement, je lance un coup d'œil sur ma gauche et sur ma droite, comme si la solution patientait dans un coin de la pièce, sourire aux lèvres, attendant que je la remarque. Je me retourne enfin, vers les espaces de travail où une série de tables sont ordonnées les unes à côté des autres.

Peter.

Je ne l'avais pas vu en entrant. Zut. Je devrais aller le saluer ou bien cela ferait-il mauvais genre ?

Il est assis sur l'une des tables, un genou replié entre son torse et la table, lisant un ouvrage que je ne distingue pas. Bien que cela fût assez malpoli de ma part – après le speech intérieur que je me suis fait à ce sujet en arrivant au manoir, c'est assez cocasse que je sombre dans ce travers à mon tour –, je me sens obligée de le détailler avec intérêt.

Pour ma défense, je tiens à préciser que sa silhouette me renvoie une image magnifique. Plié en avant pour mieux voir les mots danser sur le papier, il penche un peu la tête sur le côté pour la poser sur son genou – le muscle tendu de son cou renvoie une impression de puissance qui tranche avec son aura innocente. Je vois ses fines lèvres tentatrices se mouvoir occasionnellement quand il exprime le besoin de sentir le poids des sonorités sur son oreille. J'aime ce que je vois, je lui trouve des airs poétiques tout à fait charmants. Outre même sa beauté naturelle, il est attirant dans sa manière de se tenir.

Je me dis ça de manière purement aspectuelle, bien sûr. N'y voyons rien qui ait à voir avec un quelconque désir !

Je me sens de mauvaise foi. Mais non, c'est juste que, comme je le savais déjà, je suis attirée par tout ce qui est beau. Peter est beau, donc j'aime regarder. Simple.

Au nom d'Amour (Is It Love - Peter)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant