1 - Pour quelques photos

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 — Maman, maman reviens ! Je t'en supplie ! Maman ! sangloté-je.

— Alya, réveille-toi, tu fais un cauchemar, murmure une voix au loin en me secouant.

Je me réveille en sursaut, tirée brutalement de ce terrible rêve qui hante mes nuits. Je me demande quand cet accident arrêtera de me tourmenter, depuis je ne suis plus la même. Une partie de mon âme s'est envolée avec ma mère ce jour là... Heureusement que mon équipe est là pour me soutenir et pour me réveiller dès que mes cauchemars commencent.

— Merci de m'avoir sortie de ce mauvais rêve Mike. Je ne saurais pas quoi faire sans vous tous à mes côtés...

— Tu sais bien qu'on sera toujours là pour toi Alya. Tu as fait tellement pour nous, nous te devons tout pour la plupart. Viens, allons marcher un peu avant de partir pour Diban.

— Tu as raison, marcher me fera le plus grand bien.

Sur ces paroles nous sortons et j'en profite pour prendre un grand bol d'air encore suffisamment frais pour être respirable. Dans quelques heures la chaleur se sera installée et l'air sera étouffant. Et dire que la majorité du village que nous apercevons au loin est en ruine, les hommes n'ont plus rien pour se protéger de la chaleur caniculaire de ce mois d'août. Je me demande comment ils vont pouvoir survivre encore longtemps dans ces conditions. Et comment vont-ils pouvoir passer l'hiver qui est accompagné de températures très fraîches ? La population est déjà dans un état déplorable et rien n'est prévu pour essayer d'améliorer leurs conditions de vie. La souffrance de ces personnes est omniprésente. Tous les villages que nous avons traversés sont presque en totalité détruits et toutes les familles pleurent la mort d'au moins l'un des leurs, emporté par la malnutrition, par la chaleur caniculaire ou tout simplement mort dans un des bombardements qui sont maintenant le quotidien des syriens. Ce n'est pas mon premier reportage de guerre mais c'est la première fois que je vois un pays et une population dans un tel état. Je me tourne vers Mike et constate qu'il contemple également le village au loin.

— On n'a jamais vu un pays aussi détruit, n'est-ce pas ? Chuchote Mike qui a remarqué que je l'observais.

— Non, jamais. En deux semaines j'ai vu plus de villages en ruine, plus d'enfants squelettiques et plus de parents désemparés que dans toutes nos autres missions réunies, soupiré-je. Ce n'est pas la première guerre que l'on couvre mais c'est la première fois qu'on assiste à une misère pareille. Et dire que l'on est loin de la fin du conflit. Dis-moi comment la population va pouvoir s'en sortir ?

— Je n'en sais rien Alya, je ne sais plus quoi faire pour leur venir en aide...

— Il faut que les combats cessent ! Ce n'est plus possible pour tous ces gens de vivre dans ces conditions ! M'emporté-je.

— Calme toi Alya, on est tous d'accord avec toi. Tu sais que New York n'attend que tes photos pour les diffuser dans le monde entier et alors peut-être que les commissions internationales se pencheront un peu plus sur cette guerre qui est en train de détruire complètement un pays. Nous ne pouvons rien faire de plus pour l'instant.

— Je sais tout ça Mike ! Mais je n'arrive pas à prendre LA photo ! Celle qui révélera toutes ces atrocités à la Terre entière. Depuis deux semaines on tourne dans le pays et je fais courir des risques considérables à tout le monde mais je n'y arrive pas. Et si je n'étais plus faite pour ça ? Et si la photo n'était plus pour moi ? Et si...

— Alya stop ! m'interrompt Mike. Tu es née pour faire de la photographie, tu es la meilleure ! Ne te laisse pas déstabiliser par toutes les horreurs que tu vois, je sais que tu vas réussir à faire la photo que tu veux tant. Ne panique pas. Allez viens dans mes bras.

Au péril de nos viesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant