Chapitre 3: Rupture

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Je relâche mon étreinte et viens planter mes yeux floués par les larmes dans son regard noisette, qui de là, semble lui aussi épris de peur. Peur que son frère ne soit pas assez fort.

- Aller viens! On ne peut plus rien faire qu'à attendre, maintenant. 

Tout en le tirant par la main.

- viens prendre l'air.

Matt me suit, c'est à présent lui, l'ombre de lui même. On aurait presque l'impression qu'on lui aurait arraché un membre, tant la douleur se lis sur son visage. En même temps, c'est tout comme, son frère entre la vie à mort. Et dans mon fort intérieur, comme une prière à une divinité, une force inconnue.

(Daryl bats toi... reviens lui... ne le laisse pas seul)

J'ai réussi à tirer tant bien que mal les quatre-vingt-dix kilos de muscles que représentent mon bad boy, en dehors de l'hôpital. C'est comme si les derniers événements n'avaient pas eu lieu. Matt s'adosse au mur du centre de soins. Les mains plaquées contre le mur, le regard vers le ciel, parsemé d'étoiles. La nuit est claire, il fait lourd, par cette nuit d'été. Les larmes coulent d'elles mêmes sur son visage, impuissante face à sa détresse.

- Matt, il est fort! Il va survivre... pour...

Il me coupe aussitôt recrachant toute sa colère. Ce soir je suis prête à encaisser...

- Qu'est ce que tu en sais!! Tu l'as vu deux fois et tu crois le connaître? Et meme s'il s'en sort... 

je ne lui laisse pas le temps de finir.

- Il s'en sortira Matt!! Je suis prête à encaisser oui, mais pas sans réagir. Je veux que ça sorte et je vais faire en sorte qu'il y arrive. 

- C'est vrai Matt! Je ne vous connais pas... ni lui... ni toi!! À ce moment là, il me regarde droit au fond de mes prunelles émeraudes, mais je ne lâcherai rien, j'irai au bout! - Mais de ce que j'ai pu voir, tu n'es pas du genre à te laisser abattre, j'en suppose donc que lui non plus! Mon ton est sec et déterminé.

- Tu ne sais rien. Me répond-il avec lassitude. Et comme dans un moment propice aux aveux.

- C'est pas un accident Jo!! Tout est fait pour donner illusion... n'est-ce pas bien réussi? Daryl joue avec le feu depuis bien trop longtemps, il en fait les frais ce soir! 

Matt commence à m'expliquer, comment son frère a poursuivi son ascension au sein du gang, qui les avait recruté à leur quinze ans. Daryl a tout d'abord vendu du shit dans le quartier, puis toujours plus gourmand il était passé à la coke, l'héroïne. Le chef de gang lui fournissait la dope, qu'il allait revendre dans les quartiers friqués de New-York, alimenter les petits bourgeois en manque de sensations fortes. Puis parallèlement, pour arrondir ses fins de mois, déjà assez confortables, il participait à des courses illégales. D'ordinaire bon pilote, il en sortait toujours vainqueur, mais ce soir était il tombé sur quelqu'un de plus coriace que lui...

Quand Matt a démarré à me raconter son histoire, ou plutôt celle de son frère, mon corps s'était laissé doucement glisser le long du mur, recroquevillée sur moi même. Matt debout à mes côtés, la tête toujours levée vers le ciel qui s'était tout à coup couvert comme pour être de soutien à notre détresse. Quelques gouttes commençaient à couler sur nos visages. Au final, on s'en foutait, l'heure était à la confidence, vérité trop souvent tu. Après de longues révélations, Matt me posa la main sur ma tête engouffrée dans mes bras, posés sur mes genoux. Je la relève aussitôt en sa direction.

- Aller Princesse je te ramène. Il m'aide à me relever et nous marchâmes jusqu'à mon appartement, sans dire un mot, les taxis ayant arrêtés leur service vers 5h du matin.

Il est six heures trente lorsque nous arrivons enfin chez moi. Mon réveil devrait retentir dans un quart d'heure. Nous n'avons pas dormi de la nuit, et le boulot dans une heure trente... la journée risque d'être longue. Je propose instinctivement à Matt de rester. Je ne veux pas qu'il reste seul, mais celui-ci décline gentiment ma proposition.

- Matt j'insiste! Tu peux pas rester seul, pas maintenant, pas dans cet état. 

- Non me répond-il d'un ton sec, froid distant. - Je ne monterai pas... plus...

Mon cœur se serre, je comprend où il veut en venir.

- Non Matt! Fais pas ça s'il te plaît...

- laisse moi! Ne m'approche plus... ni Daryl... on est pas fait pour toi... ni lui... ni moi

Il me tourne le dos prêt à s'en aller. Et comme s'il savait que j'allais l'appeler par son prénom, me coupe aussitôt d'un ton encore plus froid.

- Oublie moi, oublie mon numéro, oublie la salle...

Je me laisse tomber comme une masse au sol, je viens de me prendre un coup sur la tête ou quoi? Je me suis fais mettre k.o en trois coups. Les larmes me coulent, reste là, agenouillée devant la porte de mon immeuble, comme figée dans un espace-temps. La sonnerie de mon réveil me sort de cette léthargie. (Il n'a pas pu faire ça!) me répète-je dans ma tête. Tel un zombie, encore une fois, mon corps se laisse porter jusqu'à mon appartement, entre la clef dans la serrure machinalement. Mon corps se laisse porter jusqu'à la douche, tous mes gestes matinales se font sans même que j'y réfléchisse. Aujourd'hui pas de maquillage, tant pis pour les cernes. De toute façon il vaut mieux que l'on ne m'approche pas, je risque de mordre.

J'arrive, tant bien que mal, à me traîner jusqu'à Carter Corp. Je me dirige vers l'ascenseur, les yeux baissés, cernés. Une voix douce m'interpelle, une main m'agrippe le bras qui me fait virevolter. Lisa se trouve face à moi, a quitté son poste, à la vision du fantôme qui entrait dans le hall.

- Qu'est -ce qui se passe ma belle?

D'une voix gémissante. Je lui raconte ma nuit et les dernières paroles de mon bad boy, qui m'ont fait l'effet d'une lame lentement enfoncée dans mon coeur, qu'on faisait lentement tournoyer à l'interieur de ma poitrine afin d'en déchiqueter ce qui reste de mon organe vital. Le regard de ma belle blonde change au cours de mon récit. Rouge de colère et d'un ton autoritaire.

- Monte, essaie de bosser comme tu peux, passe ta journée et rentre ce soir chez toi. Je passerai plus tard dans la soirée. Tout en la voyant s'éloigner, elle sort son téléphone de sa veste. J'entends des brides de conversations, tout en attendant ma cage transparente, au loin.

- Matt, c'est Lisa, j'espère te trouver chez toi ce soir! Faut qu'on parle et crois moi tu n'y échapperas pas! 

Arrivée à mon poste, j'allume mon ordinateur, le bureau de Matt est vide, comme je m'en doutais. Alors que je commence à potasser le dossier posé sur mon bureau, une main vient se poser sur mon épaule, je reconnais le parfum entre mille. Je me retourne, le regard vide.

- Gabriel pas aujourd'hui! Pas maintenant... j'ai plus la force... dis-je d'un ton calme, comme résignée.

Il ne répond rien, mais un large sourire s'affiche sur son visage, qui veut dire "j'ai gagné".


Is It Love: Matt. TOME 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant