Attraper les rêves

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De grands canyons ocres.

Des montagnes sèches, comme sorties d'un western de Sergio Leone et où souffle le vent.

Une croix de bois culmine, ses pas l'y mènent.

Un hélicoptère en ferait le tour avec une caméra et il ouvre les bras, se transformant en oiseau.

Le soleil tape trop pour qu'il se sente mélancolique, il est souvent seul. Tout là bas miroite la mer, en bas il voit la maison dont il est l'hôte. Livré à lui même il se promène entre les villas des riches. Minimum Vital déchaine des envolées de guitare et de piano flamboyant dans ses oreilles, depuis le discman vert qui l'accompagne dans ses promenades. La végétation un peu différente, les nombreux cactus, c'est presque le Mexique...

Il descend au village, la simplicité des habitants et leur quasi-pauvreté l'étonne. Il a du mal à se faire comprendre. Il n'aime pas cette langue mais il lui faut des enveloppes, des cartes postales pour écrire à sa famille qu'ici il « s'ennuie comme un rat mort ».

Pourtant rien n'est moins vrai. Un jour, un jeune français qui porte le même prénom que lui arrive avec trois filles et ils jouent dans la piscine. Ils vont dans un parc d'attractions aquatique. Il se sent en phase avec eux, ils sont très sympas et pourtant son vague à l'âme ne le lâche pas. Il les trouve un peu terre à terre. Ses aspirations sont romanesques. Romantiques. Presque chevaleresques.

Son ego est passablement enflé, mais il est loin de s'en rendre compte.

C'est une amitié avec le visiteur suivant qui le fera se sentir mieux.René, un vieux monsieur qui est avec son épouse également invité chez Lopez, le naturopathe écrivain. Ils se promènent, ils parlent de littérature et le temps lui semble passer plus vite. Mais oublié l'objectif principal de ce voyage qui était de se forcer à parler espagnol!

Il découvre, déguste la nourriture : gaspacho, tortillas et autres aliments qui lui plaisent. Il visite des grottes, des magasins... ennuyé alors qu'il a quinze ans, une gueule d'ange bossu aux yeux de tournesol. Mais ça il n y a personne pour le lui dire.

Un soir, au bord de la mer, les nuages se teintent de couleurs d'abord pastel puis enflammées et les deux ensemble, enfin, en apothéose.

Il est sur un petit muret au bord d'un parking.

Valencia.

Les vagues déroulent tranquillement et son coeur compose un poème sans mots dédié à la beauté de la vie, à l'Univers qui l'accueille en son sein.

Espagne,août 1997

« _C'étaient vraiment les débuts...

_Oui,il s'est créé une palette de souvenirs qui vont l'habiter. La vie l'a emmené dans ces endroits plus ou moins ordinaires mais c'est la sensibilité particulière de son âme, un peu écorchée vive, qui va leur donner un éclairage puissant, lyrique...

_Est ce qu'il voulait vivre une vie lyrique ? Etre un poète, être différent, mieux que les autres ?

_Il était né différent et à cette époque de sa vie il en avait une conscience vraiment douloureuse. Ensuite, l'ego joue son rôle et cela ne va pas sans boursouflures inutiles, voire ridicules...

_Je te sens pédant là...

_...comme il l'a été bien souvent ! »