1 - Tsetse bumba

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N'oubliez pas de lancer la musique ! ;-)

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Il était une fois un immense royaume. Ce royaume se situait au cœur d'une jungle luxuriante et était connu par toute Gaïa. En ce temps-là, Gaïa – appelée désormais la Terre – fourmillait de peuples et d'espèces aussi diverses que variées. Les humains eux-mêmes étaient divisés en deux races distinctes et ne comptaient que pour une infime partie de la population de Gaïa. Cependant, revenons à notre immense royaume. L'auteur du prologue – qui, je vous le rassure, ne reviendra plus jamais – vous aura sans doute abominablement perdus avec ses circonvolutions, ses noms sans queue ni tête et ses étranges accents que nul ne saurait prononcer convenablement de nos jours. Laissez-moi donc être votre guide dans cette histoire qui vous enchantera probablement autant que la fontaine de Trévi.

Il était une fois, comme je le disais plus haut, un immense royaume gouverné par un roi autrefois sage et juste, mais qui, sous le coup de la colère, avait commis des crimes plus grands encore que son royaume. Ce roi se nommait Bhâluka, et voilà bien tout ce qu'il y a à savoir sur lui, car il mourra très bientôt dans le récit. Le roi Bhâluka, après avoir ébranlé Gaïa toute entière par un génocide sans précédents, s'assombrit et ne gouverna plus que par la peur. Nombreux furent les voirloups qui quittèrent alors la belle – mais si triste – jungle de Jamshid ! Il fallut que Jamshid endure dix-sept longues années de peur et de chagrin avant que le monarque meure et ne cède la place à un jeune prince. Ce prince avait reçu à la naissance le nom de Sahale. Peu de jours après, il avait reçu en travers de la poitrine une profonde blessure que les habits de cérémonie ne dissimulaient jamais entièrement. Son père ne l'avait jamais laissé prendre la parole en public, le protégeant tant qu'il le pouvait. Le roi Bhâluka avait ainsi, sans s'en rendre compte, privé son peuple de la relation qu'il aurait dû avoir avec le prince Sahale. Aussi, lorsque le roi Bhâluka mourut, le peuple de Jamshid trembla : le prince, blessé à la naissance par un clan voirloup rival, allait-il se montrer aussi amer et cruel que son père ? Serait-il un roi froid, mauvais ? Serait-il un roi faible ? Chercherait-il à se venger de son propre peuple ? Le prince – pardon : le roi – Sahale ne semblait jamais vouloir cacher aux yeux de son peuple la profonde cicatrice qui lui barrait la poitrine. Des rumeurs le disaient prodige, grand érudit et grand chasseur, d'autres murmuraient qu'il tuait pour le plaisir – ce qui était une terrible atteinte aux mœurs voirlouves. En définitive : nul ne savait qui était réellement le prince Sahale.

Et au cœur de la jungle de Jamshid, protégée par la vakrokti – il s'agit d'un terme désignant la magie – les fées qui avaient recueilli la dernière survivante du clan ennemi de la famille royale – je réalise que cette phrase est diablement longue ! – se méfiaient plus que quiconque sur Gaïa du jeune roi Sahale.

Ces fées appartenaient à la race des aleiraba, c'est-à-dire que ces fées pouvaient s'attacher à un être vivant et en prendre soin durant sa jeunesse. Les aleiraba étaient connues pour leur patience avec les enfants, leur extrême gentillesse et leur caractère plus épicé sitôt qu'il s'agissait de relations avec des adultes.

— Puidecerb ! C'est la quatrième fois que je vous demande de ne pas fumer vos herbes âcres et dégoûtantes dans la maison !

Le vieux faune souffla vers le toit de la petite chaumière un jet de fumée épaisse et bleue. Mamina, l'aleiraba la plus âgée des trois fées, devint rouge pivoine et agita une louche pleine de soupe dans les airs.

— Mamina ! rit doucement une jeune fille en saisissant la louche des mains de la fée, qui lui arrivait aux épaules. Un peu de calme, tu es aussi rouge qu'un coquelicot !

— C'est bien, petite fauve ! C'est bien ! Défends-moi ! bêla Puidecerb. Il faut défendre les pauvres vieux faunes sans défense.

— Voilà bien le plus gros mensonge que tu m'aies raconté, Puidecerb.

Lupa ridetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant