De la plume d'une Absynthe - Recueil d'OS

Fuyuko

Ce court texte a été rédigé pour la joueuse Fuyuko06, sur le topic j'imagine ta gardienne, en avril 2017.
Bonne lecture ! 

***

La neige flottait étrangement autour de Fuyuko. Elle ne tombait pas vers le sol, puisque sol il n'y avait pas. Lorsque la jeune gardienne s'en aperçut, elle en fut plus que surprise. La brune ne possédait nul don de lévitation et, de ce fait, aurait dû être en train de tomber. Pourtant, elle était stable. La neige l'enveloppait parfois avec douceur, sans jamais la déstabiliser, comme une douce caresse.

Dans sa position, Fuyuko hésita à avancer car elle ne savait où poser son pied. Elle n'avait aucun point de repère près d'elle : ni terre, ni ciel, aucun végétal, aucun être vivant ne semblait être à proximité. Elle commença à s'inquiéter lorsqu'elle prit conscience qu'elle n'avait aucune idée de comment elle était arrivé en ces lieux. Des souvenirs inquiétants qu'elle s'était efforcée d'enfouir au plus profond d'elle-même tentèrent de refaire surface, profitant de la situation. Mais elle s'efforça de réunir ses penser, refusant de se rappeler son ancienne prison, elle était libre désormais.

Une ombre se matérialisa à quelques mètres d'elle. La blancheur de la neige ne parvint pas à l'engloutir, et la brume sombre se transforma petit à petit en une silhouette familière à Fuyuko. Elle ne pouvait pas distinguer les traits de son visage, néanmoins elle savait de qui il s'agissait.

Une âme douce et autrefois amicale, mais désormais froide et distante.

"Bonjour, jeune fille de l'hiver."

Ces quelques mots prononcés avec bienveillance firent remonter des souvenirs à la fois doux et douloureux.

"C'était ma faute" répondit-elle d'une voix faible d'où perçait sa culpabilité.

A ces mots, la silhouette se pencha vers la gardienne et l'enveloppa de ses bras.

Ainsi enlacée par le souvenir de son passé, Fuyuko ouvrit les yeux et tout se volatilisa, les sensations comme les images.

La jeune gardienne oublia rapidement son rêve mais la nostalgie et la tristesse s'étaient emparées de son cœur. Elle grimaça et sortit de son lit avec peine. Pour son plus grand déplaisir, la journée s'annonçait ensoleillée. Le printemps était bel et bien de retour, comme en témoignait la floraison des arbres dans l'enceinte de la cité et au delà. Les pétales, avec leur blancheur, semblaient vouloir imiter la neige, mais cette poésie florale ne convainquait pas Fuyuko.

Rien ne pouvait rivaliser avec la saison fétiche de la gardienne, lorsque le froid forçait au calme et que les ténèbres dominaient les heures. Fuyuko frissonna à l'idée qu'il lui faudrait attendre plusieurs mois avant d'être à nouveau totalement à l'aise dans la nature.

Elle se força à quitter sa chambre, toujours enveloppée dans sa douleur, sans qu'elle ne s'en rappelle plus l'origine. Avant de se diriger vers les quartiers de Nevra pour discuter de sa mission à venir, elle décida de se rendre brièvement dans les jardins, à la recherche d'une dernière brise hivernale. Elle sentait qu'elle aurait besoin de réconfort avant de croiser le regard -toujours trop froid à son égard- de son chef de Garde.

Une fois à l'extérieur, son instinct la poussa à baisser les yeux au sol.

A l'ombre d'un bosquet, isolée des autres, une fleur plus blanche attira le regard de Fuyuko. Presque par réflexe, elle tendit la main pour en caresser les pétales. Elle retira ses doigts lorsqu'ils entrèrent en contact avec le végétal : celui-ci était glacé, tout comme la terre autour. Une fine couche de gel enveloppait la plante, sans que celle-ci ne soit pour autant rigidifiée. La chaleur de la gardienne ne changea rien à l'aspect du végétal, le givre ne semblant pas fondre.

L'Ombre n'avait aucune idée de l'espèce à laquelle appartenait cette fleur, elle ne ressemblait en rien avec celles qu'elle avait pu voir auparavant. Elle hésita un instant à demander des informations à Ezarel, qui avait plus de connaissances qu'elle à ce sujet. Mais elle se ravisa. Elle décida de garder cet instant secret, et de peut-être, un jour, chercher à éclaircir ce mystère.

Avec précaution, Fuyuko décida de se saisir de la fleur et de la garder avec elle.

De quoi prolonger un peu l'hiver.