Chapitre 4. Yon-woo

1 0 0
                                    

J'ai le coeur qui bat à la chamade et j'ai sûrement l'air bête mais je ne sais pas comment réagir à ses paroles. Cette fille d'allure louche vient de dire des choses qui pourraient causer sa mort et celle de toute sa famille. Peut-être elle n'a pas peur de la mort... peut être elle dit vrai. Peut-être que la mort est bien meilleure que ce monde.

- Merde, si je voulais vraiment te faire du mal je me serais pas donné la peine de te parler ni rien. Tu sais comment les autorités marchent ici. Tu te fais prendre, et l'instant suivant tu te fais exécuter. Aussi simple que cela... Alors calme toi. Je sais que tu n'es pas d'accord non plus avec ce système farfelu, c'est pourquoi tu achètes tellement des livres interdits... et d'après le livre que tu as dans tes mains tu es une étudiante de médecine... cela m'étonne, c'est souvent les étudiants en médecine qui idolâtrent le plus le maréchal.

Je ne sais juste pas quoi dire. À chaque fois elle me bouleverse de plus en plus, et cela ne fait que 10 minutes qu'on s'est rencontrées. Je me demande ce qui cloche dans la tête de cette fille de regard agressif et traits anguleux, elle est comme un feu de forêt. Ses mots me brûlent, font battre mon coeur. Pourtant j'ai aussi l'impression que ses paroles me tirent vers elle, je sens une flamme qui s'allume dans ma poitrine. Mon péché bouillonne à l'intérieur de moi, doux et envoûtant.

- Comment t'appelles-tu?

- Yon woo. Réponds-je immédiatement.

La fille devant moi esquisse un sourire de travers, j'ai l'impression que ses yeux s'illuminent légèrement

- **********

Alors je me trouve dans le sous-sol d'une maisonnette aussi petite que ma chambre (où il habite seulement une vieille femme silencieuse) , pourtant, le sous-sol est au moins 10 fois la taille de ma chambre, peut-être plus, c'est un méchant gros sous-sol, qui a plutôt l'air d'une cave légèrement technologique. Je ne sais pas comment elle a réussi à me convaincre, mais je me trouve maintenant ici, 5 jours après que nous avons fait connaissance. Je ne comprends pas trop ce qui arrive, tout ce que je vois à l'entour de moi c'est une vingtaine de personne qui me regardent, l'air curieux. J'entends des conversation ici et là. Je reconnais un peu de chinois, de japonais et du coréen mais avec un accent différent. Est-ce l'accent du sud?

- Chin-Hae, que tu es bizarre. Une femme d'environ 30 ans, ronde, au regard méfiant me dévisage, bien qu'elle parle à Chin-Hae. Tu disparais, nous ignores, nous laisses tomber... mais tu retournes après avec une gamine dont on ne connaît rien? comment tu sais qu'elle ne va pas parler? tu sais comment c'est devenu dangereux. À ce qu'il parait, Tae-Yong et Jin-Ho sont en vie tout simplement parce qu'on veut les faire parler. Ils veulent des réponses et ils les cherchent partout, ils interrogent tout le monde, chaque individu dans la rue... juste pour ramasser n'importe quel genre d'information. Ils sont en train de suivre nos pas.

L'expression de Chin-Hae devient amère quand elle entend le nom des deux garçons. J'ai la nausée soudainement. Je sais que c'est vraiment dangereux ce que je suis en train de faire, mais je ne pense pas que je peux revenir sur mes pas. Je suis venue, voilà. Ce qui est fait est fait, je dois assumer.

- Je ne me suis jamais trompée dans mon jugement, vous le savez très bien. La voix de Chin-Hae est ferme et défiante. Les gens arrêtent de parler et regardent la scène avec appréhension. Je ne me suis pas trompée avec toi, ni avec Jin-Ho. Je ne me suis pas trompée avec environ 20 recrutés, alors je te prie de m'épargner ton discours, Park Min Young, je sais ce que je suis en train de faire.

La chambre est tellement silencieuse que j'ai l'impression d'entendre mes battements de coeur. Chin-Hae continue à parler.

- Je sais que pendant ces deux semaines je n'ai pas voulu me montrer et que vous avez senti que je vous ai laissé tomber. Mais, bordel, c'est Jin-Ho et ses deux amis les plus proches que l'on a arrêté. Bien sur que ça m'a frappé solide. Je ne vous ai pas laissé tomber, j'avais juste besoin d'un espace... on m'a enlevé la personne que j'aime.

L'ambiance dans la chambre change, il devient plutôt morne et mélancolique. Cela leur fait vraiment de la peine ce qui est arrivé il y a deux semaines. La plupart de ces personnes faisaient sûrement partie de la foule de ce jour là, le jour où on a exécuté Han Yu-Seok. Je ne suis sûrement pas la seule qui a vécu cette exécution comme si elle m'appartenait. Toutes ces personnes là ont certainement souffert autant que moi, même plus. Chin-Hae fait le tour de la chambre de ses yeux, elle inspire profondément, et sa voix devient alors plus gentille.

- Cette fille s'appelle Yon-Woo, je la reconnais du marché noir, une de nos plus fidèles clientes.

Je serre mes poignées à cause de la surprise, je me sens très mal à l'aise lorsque plus de 2 personnes me regardent. Tous les invités posent leurs yeux sur ma figure. Je rougis.

- Son nom signifie lotus sacré, tel que mon nom signifie vérité. Faites confiance aux signes que la vie vous fait, suivez votre instinct. Je vous dis, elle sera confiable. Son âme est forte, bien qu'elle est confuse. Elle est étudiante de médecine, ce qui pourrait nous aider aussi.

Je tâche de ne pas regarder directement aux yeux les gens qui m'entourent. Je peux sentir qu'ils m'analysent, me calculent, me transpercent. Je ne suis pas à l'aise, pas du tout. Cependant c'était plus fort que moi: je devais venir. Je ne peux pas continuer à vivre dans la peur. Enfin, j'ai peur maintenant, mais cette fois-ci c'est différent. Quand on a peur, le coeur se met toujours à battre très vite et le corps devient froid. L'on est figé. Cependant, ce que je ressens, cette peur, au lieu de figer mon esprit, me remplit d'ardeur, de curiosité, de vie. Je veux vivre et je veux aussi revivre mon pays. Je veux alors saisir ce sentiment, le dominer, le rendre unique. Je veux affronter avec aplomb les obstacles qui s'en viennent. Il vaut mieux de mourir en tant que martyr qu'en tant que marionnette. Il n'y a que ces deux choix, et je prends celle que l'on n'impose pas, mais celle qui naît au fond du coeur.

Quelqu'un saisit mon épaule et tire pour me faire retourner. Déconcertée, je fais face à la petite vieille dame qui habite la maisonnette. Malgré la taille ridiculement petite de ses yeux, elle les garde ouverts comme des ronds lorsqu'elle me scrute intensément. Les paroles abandonnent ma bouche, mes pensées cessent de voltiger mon esprit. Ce pair de petits yeux me consomme et me fait sombrer dans l'immense silence que mon existence vient de devenir. Des instants, des secondes ou peut-être bien des minutes s'écoulent autour de nous. Je comprends alors la relativité du temps lorsque le temps lui-même arrête d'exister pour moi dans ce moment précis. Je ne suis consciente que de ces deux billes noirs qui m'emprisonnent. Peu à peu, mon entourage me revient et je reprends conscience de mon existence et celle des gens autour de moi. Je reprends conscience des dizaine des regards qui me percent. Je me sens confuse par ce qui vient d'arriver, mais je me laisse aller par cette ambiance mystérieuse.

- Ton courage est plus grand que tu ne l'imagines. Je peux sentir le pouvoir de Dan Gun en toi. Tel que le lotus, ce pouvoir est capable de renaître même dans les circonstances les plus ardues.

Je ne réponds pas. Mon corps est pris, envoûté par cette atmosphère magique. Mon esprit est envahi par ces idées que j'avais tant refoulé à l'intérieur de moi, parce que j'avais même peur d'oser y penser. Maintenant, elles prennent contrôle de moi, me submergent dans des sentiments que je n'avais jamais ressentis et l'adrénaline fait battre mon coeur, me remplissant de vie. Oh, doux âmes des martyres sacrifiés dans ce conflit infini, venez me rejoindre, unifions la terre de Dan Gun, redevenons un seul comme jadis.

VIVE LA CORÉE RÉUNIFIÉEWhere stories live. Discover now