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De jour en jour la vie devenait compliquée.

Il y a quelques années, j'étais une jeune fille insouciante qui profitait de sa jeunesse et là, j'étais une femme qui avait dû faire face aux nombreuses difficultés de la vie.


C'était allongée sur mon lit et les yeux rivés vers le plafond que je ressassais toutes les épreuves qui m'ont fais mûrir et arriver jusque ici.


Je partais pour la France dans quelques heures, dans quelques heures je laisserai derrière moi mon passé et mes racines.


Anderson et Isaac étaient également venus me voir avant mon départ. Cet acte de la part d'Anderson m'a énormément touché, car il était vrai, je ne savais pas quand j'aurais revu mon fils.
Venir en France pour eux coûtait chers, beaucoup plus cher que de venir en Haïti. Et moi lorsque je serai en France aurais-je eu des sous pour aller aux États-Unis ?
Il a dû prendre conscience de ça et je lui en ai remercié.


Le jour du départ, c'est avec un cœur lourd que je me dirigeais vers l'aéroport. Les au revoir ont été très durs, mais c'était un moment que j'étais obligée d'affronter.
C'était un au revoir que je leurs faisais et non un adieu car je me savais que je  reviendrai sur les terres qui m'ont vu naître, je m'en suis fais la promesse.


Le trajet s'était fait dans le silence, seule la radio émettait du son.

Je regardais le paysage défiler sous mes yeux. Je le regardais avec insistance comme pour éviter d'oublier ce panorama.

Tout allait me manquer, voir les marchands vendre leur articles, voir des enfants aller à l'école, voir les motocyclettes serpenter entre les voitures.


Arrivée à l'aéroport tout s'était très bien passée.
Je me suis installée dans la salle d'embarcation ayant toujours les mêmes questions :
vais-je regretter cette décision ?
Vais-je m'en sortir là-bas ?
Ma vie sera telle meilleure qu'en Haïti ?

Toutes ces questions continuaient à me trotter dans la tête. Mais j'ai vite arrêté de me tracasser puisque je savais très bien que je n'aurai pas eu de réponse.

« Moun ki bezwen deyò chache chemen pòt. »
( la personne qui a besoin d'être dehors qu'elle cherche le chemin de la porte )

Tel est le proverbe haïtien que m'avait dit ma mère en m'embrassant.
Ce proverbe était tout à fait véridique dans mon cas. Je voulais un nouveau départ n'est ce pas ? Il fallait que je cherche le chemin pour accéder à ce nouveau départ. J'étais consciente que le chemin n'aurait jamais été un sentier sans obstacles mais j'étais très courageuse et je savais que j'aurais été capable de passer à travers ceux-ci.

C'est complètement dépaysée que je sortis de l'aéroport d'Orly. Jemima et son compagnon m'attendaient.
Ma sœur n'a pas du tout changé, elle était restée la même, toujours aussi belle, souriante et pleine de joie.
Son compagnon était très gentil mais également bizarre. Il devait sans doute être méfiant à l'idée d'accueillir une personne qui lui était inconnue. Mais c'était la première fois qu'il me voyait donc je n'y ai pas prêté attention.


Une fois arrivés à son domicile, Jemima s'était empressée de me montrer ma chambre. C'était un vrai amour. Je la remercierai toujours d'avoir été là lorsque j'avais besoin d'un repère dans ce pays.


Elle habitait une ville assez grande dans la banlieue parisienne. La vue qui s'offrait à moi changeait totalement de la vue que j'avais en Haïti.


Dès les premiers jours, j'ai cherché un boulot au noir.  Étant venue par mes propres moyens , je n'avais aucuns papiers français, pas même un titre de séjour, j'étais au yeux de la loi une immigrée qui aurait pu être expulsée du pays n'importe quand donc je ne pouvais pas exercer en étant déclarée.
Jonas, le compagnon de Jemima, était avocat et il avait gentiment accepté de s'occuper de cela.


Pendant 2 mois, je partais tôt et rentrais tard, je voulais absolument trouver un travail, même s'il était mal payé car je me sentais très mal de dépendre de Jemima et Jonas.
De plus, je commençais à ne plus me sentir à ma place, ils allaient avoir un nourrisson auprès d'eux et je me sentais en trop. Ils commençaient tout juste à construire leurs famille et moi j'arrivais précisément à ce moment.
Je devais donc avoir au minimum un titre de séjour pour ainsi trouver un emploi et rechercher un logement.

Ce jour là, j'avais accompagné Jemima à son échographie, elle allait enfin connaître le sexe du bébé. Jonas ne pouvait pas être présent car il avait un procès de la plus grande importance.
La voir aussi impatiente de savoir si elle allait donner la vie à une fille ou un garçon m'amusait car à l'ancienne, elle n'aimait pas les enfants et encore moins les bébés.
Lorsque nous étions petits, elle était l'aînée mais elle ne restait jamais avec nous. " elle ne nous supportait pas"  d'après ses paroles. Elle restait collée à ma grand-mère.
Et ainsi l'entendre me dire qu'elle avait hâte d'avoir son bébé dans les bras, bombarder sa bouille de bisou me faisait rire.

Après de longs moments de suspens, nous avions appris qu'elle attendait une petite princesse.
Les yeux de Jemima étaient pétillants de joie et de bonheur.

Dès que nous sommes sorties du cabinet du gynécologue, nous sommes allées nous promener dans une galerie marchande pour déjà visonner les achats que Jemima comptait faire.
Elle était dans son élément, à chaque fois que nous entrions dans un magasin, elle voulait tout acheter.
Elle, elle voulait et elle pouvait mais moi, je voulait mais je ne pouvais pas.
La raison? Pas de travail donc pas d'argent.

J'ai décidé de stopper tout cela, j'ai pris une décision assez délicate mais que je ne regrette pas au jour d'aujourd'hui.


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Amer est mon cœur. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant