Scène 1

1.4K 143 40
                                    

— Vous restez bloqués dans votre passé, mais ne vous demandez pas pourquoi le monde avance sans vous !

Sur un dernier éclat, Violet se précipite vers sa chambre et claque violemment la porte derrière elle. Les cris qui proviennent du salon s'assourdissent brutalement, à l'exception du : « LES VOISINS, VIOLET ! » que hurle sa mère. C'est la troisième fois de la semaine où le dîner se termine de cette façon. Et on est que mercredi soir.

Rageuse, l'adolescente balance un coup de pied dans le pouf au milieu de sa chambre, l'envoyant valser contre le mur. Ce que les parents peuvent être bouchés, et les siens en particuliers ! C'est comme s'ils n'avaient pas suivi les actualités – pire, c'est comme s'ils n'avaient pas vu, de leurs yeux vu, les récents évènements. Mais, si le vent tourne, les petits cochons du conte sont trop à l'abri dans leur maison de pierre pour le remarquer, ou pour en profiter.

« C'est derrière nous, » disent-ils : « La mode n'est plus au super-héros. » Et c'est bien la peine de leur répéter que la mode est un éternel recommencement, qu'il n'y a qu'à ouvrir les yeux, rien à faire. Il n'y a que Dash qui réagi, avec une réflexion comme il en a le secret : « La mode, c'est un truc de fille, hein, Violet ? »

         Une heure plus tard, accoudée à sa fenêtre à regarder la nuit prendre possession de New York, Violet est un peu plus calme. La ville, étonnement, a eu un effet apaisant sur elle, et ce, dès leur arrivée, il y a bientôt un an. Bien sûr, au début, l'idée de déménager avait été loin de la séduire. Franchement, elle avait déjà eu du mal à s'intégrer dans leur banlieue loin de tout, comment pourrait-elle jamais se faire une place dans un nouveau lycée en arrivant, en plus, au beau milieu de l'année ? On ne l'avait pas écoutée, bien entendu, on avait sans doute fait semblant de ne pas l'entendre. Puisqu'Insuricare avait besoin de Robert Parr au Siège, c'était toute la famille qui était délocalisée.

         Au final, même dire au revoir à Tony Rydinger n'a pas été si compliqué, puisqu'il ne savait pas qui elle était. Pas d'amies à qui dire adieu, pas de connaissances à saluer une dernière fois. Violet a fait ses cartons dans un silence boudeur, avant de monter dans la voiture sans rien regretter – au contraire de Dash qui laissait une classe pleine de copains. Désormais, ils vivent dans un appartement bien plus petit que leur ancienne maison, avec des voisins de l'autre côté de chaque mur, et elle va en cours trois blocs plus loin. Les journées ne sont pas bien différentes d'avant. Elle n'a pas à travailler des tonnes pour se débrouiller correctement au lycée, au point que, petit changement, elle a attiré l'attention de quelqu'un pour la première fois. Dès le rendu du premier contrôle, en septembre, son professeur de sciences lui a demandé de rejoindre son club de petits génies. Pas emballée, Violet a finalement accepté, forcée par l'enthousiasme de sa mère et les vagues encouragements de son père. Il n'était pas question de s'y faire des copains, finalement, puisqu'ils avaient passé plus de temps à plancher sur des équations et des casse-têtes  qu'à faire connaissance ; Patrick, leur professeur qui insistait pour qu'ils l'appellent par son prénom, ayant eu pour objectif de les mener jusqu'à la finale du decathlon scientifique. Ils n'ont pas été sélectionnés cette année, manque de chance, mais Patrick est déjà très optimiste pour l'année qui vient. Cela mis à part, rien. La vie normale, sans action, sans pouvoir.

         Le ciel de New York est vide, ses étoiles noyées dans la pollution lumineuse et ses super-héros partis à l'autre bout du monde où ils se battent contre Dieu savait quoi. Trois légers coups à la porte tirent l'adolescente de ses pensées. Jack-Jack couché, c'est sûrement sa mère qui vient essayer de faire la paix. Ouaip, la vie normale. Helen pousse la porte et entre dans la chambre, cherche du regard sa fille dans le noir.

— Tu dors ? chuchote-t-elle.

— Non, répond Violet, lapidaire.

— Tu es en colère ?

— Non plus.

Le silence n'a pas le temps de s'installer.

— Tu devrais essayer de nous comprendre, avec ton père.

— Comprendre quoi ? Que vous préférez être Monsieur et Madame Tout Le Monde ? Que vous êtes trop vieux pour ces conneries ?

— Violet, surveille ton langage ! Tu ne sais pas à quel point nous avons souffert quand le monde nous a tourné le dos, à l'époque.

Et puis, plus bas :

— Ou combien ton père souffre encore.

— Et pourquoi il ne profite pas de ce qu'il se passe en ce moment pour reprendre les affaires ? Tout le monde aime les super-héros grâce à Tony Stark et aux Avengers ! explose Violet, qui a l'impression d'être un perroquet.

— Tu es trop jeune pour comprendre ces choses-là, ma chérie.

— Ouais. Je comprends juste que vous avez peur, et que vos grands discours sur notre devoir de protection et d'entraide, c'était juste comme ça.

Helen soupire, consciente elle aussi d'avoir cette discussion pour la centième fois. Avec un haussement d'épaules, Violet interrompt sa réflexion :

— Bon, je vais aller dormir, j'ai cours demain. Merci pour la discussion, c'était cool. A demain.

— Violet, tu... D'accord. Tu passeras te laver les dents ?

— Oui, maman, souffle la jeune fille.

— Bien, je t'aime, ma chérie.

— C'est ça, moi aussi. Ferme la porte derrière toi, s'il te plaît.

Depuis l'embrasure de la porte où elle se tient, Helen tend son cou pour venir embrasser le front de sa fille.

— Aaaah, maman, arrête ! Tu sais que je déteste quand tu fais ça ! braille l'adolescente en frissonnant.

Un dernier rire, et Helen quitte la chambre, sans totalement fermer la porte, évidemment. Les parents, tous les mêmes, incapables de faire ce petit effort même quand on le leur demande expressément. Tout en se déshabillant et en laissant tomber ses habits au petit bonheur, Violet va appuyer sur la poignée. Puis, elle retourne vers son lit, où elle se laisse tomber lourdement.

         Avec sont arrivés à New York longtemps après l'invasion alien, longtemps a près la formation des Avengers, longtemps après que la première pierre a été posée par le S.H.I.E.L.D. Aujourd'hui, la moitié du monde connu rêverait de ressembler à celles et ceux qui l'ont sauvé, et alors que sa famille le pourrait... Rien. Il faut oublier qu'on a des pouvoirs, oublier qu'on pourrait faire le bien, vivre sa petite vie au jour le jour sans espérer pouvoir se rendre plus utile qu'en rapportant les uns des bonnes notes, les autres de quoi manger le soir. Il n'y a que Jack-Jack qui n'a pas à se soucier de ça, le chanceux.

Mais c'est terminé. Ce soir-là, Violet prend sa décision : d'une manière ou d'une autre, elle rejoindra les Avengers dans leur lutte, un jour. Pour l'heure, elle baille à s'en décrocher la mâchoire et se roule en boule sous sa couette. Un jour, pas maintenant, ni demain, de préférence, à moins que ça ne soit cela, la grande nouvelle que Patrick promet de leur annoncer depuis deux semaines : « Les enfants, ne retirez pas vos manteaux, aujourd'hui on va sauver le monde ! »

» » » » » »

Ça y est, j'y suis, premier chapitre jamais posté sur Wattpad ! Je vous avoue que j'ai un peu les doigts qui tremblent, d'autant que j'ai vraiment écrit ce chapitre d'une traite et que j'espère qu'il vous plaira et vous donnera envie de découvrir la suite !
C'est vrai que l'action n'est pas encore trop au rendez-vous, mais il me semble important de vous faire d'abord découvrir Violet (sa vie, son œuvre), histoire que vous vous attachiez un peu à elle avant que les péripéties ne commencent ! Et puis, qui n'aime pas les ados en crise ?

A très bientôt !

C.

Indestructible  » P. ParkerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant