Indestructible » P. Parker

Scène 9

Le temps qu'elle arrive sur les lieux du coup de feu, une foule compacte s'est rassemblée. Invisible, Violet ne peut se glisser entre les corps, pas plus qu'elle ne peut se permettre de se montrer en costume. Alors c'est de loin, impuissante, perchée sur le toit d'un diner qu'elle assiste à l'explosion de souffrance de cet adolescent qu'elle ne connaît pas mais qui l'intrigue tant. La simplicité de la situation offense son atrocité - et Violet comprend très rapidement ce qui a pu se passer.

Peter Parker fait bien peu de cas de l'agent de police qui lui demande de reculer, il est penché sur le corps de l'homme au sol et son corps semble trop petit face aux sanglots qui le secouent. Grâce à son costume, Violet peut entendre ses murmures malgré les sirènes et la foule : « Oncle Ben, me laisse pas, me laisse pas... »
Finalement, à l'arrivée des secours – arrivée tardive, inutile – on le tire en arrière, on le détache du corps de l'homme, on veut le contenir. Il essaye de se défendre, de se défaire de l'étau des bras, avec une telle énergie du désespoir que Violet retient à grande peine le cri qu'elle voudrait pousser pour qu'on le lâche, pour qu'on le laisse tranquille, pour qu'on fiche la paix à sa douleur.

Mais quand il s'échappe, quand il glisse avec une agilité surprenante entre les doigts des policiers, des pompiers, des badauds, Violet est prête. Et malgré la vitesse de Peter Parker, elle n'a pas de mal à le suivre jusqu'à dans les ruelles les plus sombres. Cachée, elle l'observe se recroqueviller derrière des poubelles et pleurer à n'en plus pouvoir. Bêtement, elle se sent incapable de s'avancer vers lui. Elle ne peut qu'écouter ses larmes, toujours invisible, et rien d'autre. Elle est toujours immobilisée quand la sonnerie de son téléphone résonne bruyamment.

Les pleurs cessent aussitôt, et Violet voit le brun se redresser à la vitesse de l'éclair.

– Qui est là ?

Une sonnerie. Deux sonneries. Violet pourrait hurler de frustration : quel genre de super-héros oublie de mettre son téléphone en silencieux avant de commencer une filature ?

– Je sais que vous êtes là, montrez vous !

Peter Parker, après s'être rageusement passé les manches sur les yeux pour effacer ses larmes, fait quelques pas en direction de Violet - dont le téléphone, par miracle, fini par se taire. Elle n'a pas beaucoup d'options : soit elle reste invisible et attend qu'il passe devant elle, soit elle se montre. Le choix n'est pas difficile à faire, a priori. Mais c'est sans compter sur les pouvoirs que semble avoir gagné le petit geek de Oscorp. Il a beau ne pas la voir, comme le montre sa façon d'avancer à tâtons vers elle, il a les yeux fixés dans sa direction, et un air décidé sur le visage.

– Je ne sais pas qui vous êtes, mais je sais que vous êtes là.

S'il veut avoir l'air sûr de lui, c'est raté. Sa voix part dans les aigus une syllabe sur deux, et Violet voit trembler le bout de ses doigts. D'un seul coup, son invisibilité lui semble lâche. Elle vient de voir ce garçon assister à la mort de son oncle. Il a les yeux rouges, l'air perdu, les mains tremblantes - et pourtant il n'en démord pas. Il se tient droit, renifle avec obstination et ignore ses larmes. Forcée de faire un choix, entre reculer précipitamment et se découvrir avant d'être découverte, Violet... toussote.

Aussi ridicule que ça soit, Peter Parker s'immobilise, sans se démonter pour autant :

– Vous voyez, il y a quelqu'un. Vous ne pouvez plus faire semblant ! Répondez, et attention, je sais me battre.

D'un nouveau geste rageur, il essuie les larmes qu'il n'arrive pas à empêcher. Violet se plaque de plus en plus contre le mur dégoûtant derrière elle, en regrettant de ne pouvoir s'y fondre. Mais quand le garçon, impatient, fait deux pas de plus vers elle et qu'il ne manque que cinquante centimètres pour que leurs nez se touchent, la brune est obligée de réagir. Elle prend sa voix la plus grave et se lance :