Scène 8

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Violet a l'habitude, à 16 ans, de faire semblant de dormir quand ses parents viennent frapper à sa porte. En revanche, au contraire d'un bon paquet d'adolescents, elle n'a jamais appris comment on faisait semblant de ne pas dormir une fois au lycée. La bonne élève qu'elle est, en plus de ses gènes super-héroïques, fait qu'elle est toujours plus ou moins en forme au réveil.
Malheureusement, la nuit qu'elle a passé ne lui a pas permis de se reposer. En s'endormant à moitié sur son cahier de SVT, Violet se laisse entraîner dans ses souvenirs.

Peter Parker est collé au plafond par le bout de ses dix doigts, et plusieurs choses la frappent. Il est quasi nu, à l'exception d'un boxer. Il a soudainement l'air moins enfantin que dans les souvenirs de la brune. Autre chose, il n'a pas ses lunettes, bien sûr. Par contre, il a les yeux grands ouverts. Violet entame un mouvement de recul avant de se figer à nouveau. Elle et invisible, nom d'un chien, il ne peut pas la voir. En plus, malgré ses pupilles complètement dilatées et sa position on ne peut plus bizarre, le garçon a l'air endormi.
Ses lèvres s'agitent doucement et l'adolescente prend son courage à deux mains pour s'avancer et tendre l'oreille :

— Tuer... L'araignée... Piquer... Tuer.

Violet sent ses bras se hérisser sous son costume. Elle n'avait pas tort. Mais avant d'avoir pu faire un mouvement, l'étrange garçon se décolle du plafond, seulement accroché par une main. Ce n'est que quand il tend l'autre bras vers elle qu'elle comprend qu'elle est, d'une façon ou d'une autre, repérée. Les cinq doigts fouillent l'air, les yeux se plissent. Violet arrête de respirer et s'accroupit brusquement.

— Danger, balbutie le brun, de plus en plus agité.

Quand il touche le sol et avance vers elle, Violet sent une goutte de sueur couler dans son cou. Elle recule un peu plus, trop vite, et bouscule un objet branlant, qui s'écrase par terre une seconde plus tard dans un vacarme qui semble monstrueux dans le silence de la nuit. Une boîte de lego. Malgré l'urgence de la situation, Violet se demande qui est ce type : des legos à 16 ans ? Sérieux ?
Dans sa maladresse pourtant, elle voit sa porte de sortie. Le bruit semble avoir déstabilisé le somnambule acrobate, qui se tourne vers l'intérieur de sa chambre. D'un seul mouvement, Violet se lève et bondit vers la fenêtre. Encore trop tard. L'autre se tourne, tend le bras et colle sa main sur l'épaule de la brune. Colle, littéralement. Violet a beau se débattre, rester invisible, elle sent toujours le contact de l'autre dans son dos. Elle a soudainement l'image d'une mouche prise dans une toile d'araignée - comparaison peu flatteuse mais exacte.
Elle est bloquée, et son cerveau passe en revue les pires dénouements possibles. Et puis, la libération arrive. Dans son masque, tous les voyants passent au rouge, et un nouveau apparaît : un petit éclair. Violet a l'impression qu'un frisson lui parcoure l'échine et, la seconde d'après, la main semble se détacher, avec un cri de douleur de son propriétaire. L'adolescente saisit sa chance en un quart de seconde et file par la fenêtre dans un regard en arrière. L'atterrissage, cinq étages plus bas, est rude même si elle est protégée par son champ de force.
Et puis, elle court.

La tête posée dans la main, les yeux qui papillonnent, Violet ne réagit pas au premier appel. Au second, la voix qui claque la fait sursauter :

— Jeune fille ! Mon cours n'est pas l'endroit où terminer votre nuit !
— Hein ?

Surpris par la réponse inattendue, la professeure bafouille :

— On ne dit pas « hein », on dit « comment ».
— Euh, oui, pardon madame, se reprend Violet, revenue à elle.
— Il faut dormir la nuit.
— Oui, madame.
— Bon, revenons-en à nos modifications génétiques. Ça devrait être un plus facile pour ceux qui sont dans l'équipe du décathlon.

Indestructible  » P. ParkerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant