Chapitre Trois

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Assise dans cette église, j'ai horriblement froid. Pourtant mes mains ne m'ont pas l'air si glacé que cela. J'ai l'impression que c'est à l'intérieur de mes os que j'ai froid. L'église est remplie de gens dont je n'en connais pas la moitié. Beaucoup de ces personnes me regardent avec pitié. Nous sommes les petits orphelins. Je suis au premier rang du côté droit. C'est la première fois que je me rends à un enterrement. Mon cœur se serre et je n'arrive pas à retenir mes larmes. Je ne suis pas la seule. À côté de moi Baptiste est effondré. Il a posé sa tête sur mon épaule. J'entends sans vraiment écouter les paroles du prête. Je regarde autour de moi et observe les personnes présentes. Mon oncle est complètement abattu. C'est sa femme, Sylvie, qui le soutient. Mes trois cousins ne bougent pas d'un pouce. Je ne les ai jamais vus aussi sage. Mon grand-père paternel semble totalement perdu. Il y a trois ans, on lui a diagnostiqué la maladie d'Alzheimer. Je ne suis pas sûre qu'il comprenne ce qu'il fait ici. Je l'envierai presque.

L'amie d'enfance de mon père vient prendre la parole. Il s'installe derrière le pupitre et étale quelques feuilles devant lui. En quelques phrases et d'une voix chevrotante, il résume la vie de mon père. Ses mots sont touchants. Sa plus grande fierté, c'est ainsi que papa parlait de nous à ses amis. Je sens mon frère trembler. Je lui serre la main. Puis le prêtre nous annonce que nous pouvons approcher des cercueils pour un dernier au revoir. Je suis Audrey et effectue les mêmes gestes qu'elle. Baptiste m'a emboité le pas et me copie. De nouveau assis, les gens viennent nous présenter leurs condoléances. Je reconnais des commerçants des environs, des voisins, des mais ainsi que le maire de la commune d'Ambonnay. Ophélie est également présente avec ses parents.

—Je te retrouve au cimetière, me glisse-t-elle à l'oreille tout en me serrant dans ses bras.

Je hoche simplement la tête. Toute cette douleur m'anesthésie. Je suis de façon mécanique ma tante et mes grands-parents. Dans le cimetière, le vent s'en donne à cœur joie. Même si mon manteau est fermé, j'ai l'impression qu'il arrive à s'engouffrer sous mes vêtements. La pluie est également de la partie. Nous prions une dernière fois, puis des hommes font descendre les cercueils dans le caveau. Là où mes parents reposeront pour toujours.

Dans le parking, j'aperçois ma meilleure amie. Elle n'est pas seule et me fait signe.

— Je reviens, dis-je à ma famille en m'éloignant déjà.

En m'approchant, je reconnus la personne qui se trouve avec Ophélie. Que fait-il ici ?

— Bonjour Romain.

C'est plus qu'étrange de le voir ici, aujourd'hui. J'ai l'impression qu'il fait déjà parti d'une autre vie.

— Salut Charlie. J'ai appris pour tes parents, sincères condoléances.

— Merci.

Je suis touchée qu'il soit venu me voir pour me présenter ses condoléances. Toutefois, je suis un peu gêné par sa présence. Que me veut-il ? Après tout, on ne s'est parlé qu'une ou deux fois au lycée.

— On se revoit en cours. À bientôt Charlie, nous salut-il avant de partir.

Le lycée ? Oui je finirai par y retourner. Quand ? Je ne sais pas. Je ne suis pas encore prête à reprendre une vie normale.

— Il m'a envoyé un message hier sur Facebook. Il voulait savoir comment tu allais. Je lui ai proposé de venir. Tu m'en veux ?

Mon amie s'inquiète tout à coup d'avoir fait une bêtise.

— Non pas du tout, c'est juste que...

Je ne finis pas ma phrase. Elle comprend.

— Je ne vais pas te dire que j'avais raison mais tu lui as tapé dans l'œil, ça c'est sûr.

Le saut de l'angeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant