Révélation

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Ils marchèrent pendant trois jours le long du fleuve de la plaine des Anciens jardins d'Eden. Ils s'arrêtaient quand il faisait trop chaud et, à l'ombre des rares arbres, faisaient une sieste avant de reprendre leur route, comme Hilin'A le faisait dans les montagnes. Ils n'avaient pas la moindre idée de ce qu'ils allaient trouver mais ils avançaient vers le sud, vers la Plaine des Pics.

Rambard et Nipura réapprenaient à se faire confiance et Griférid s'amusait beaucoup des cabrioles du petit léopard moitié-effrayé, moitié-joueur devant le grand cheval de trait impassible. 

Trois jours après leur rencontre, Hilin'A ne conaissait pas plus Griférid que son passé. Par contre lui savait tout d'elle. Il était un jeune homme assez charmant, plutôt bpoli et rigolait très facilement. Il avait toujours la petite remarque pour faire monter le rouge aux joues de Hilin'A, qui s'était découverte passablement susceptible. Elle n'avait pas eu de contacts humains depuis longtemps, elle na savait plus vraiment comment mener une conversation, mais Griférid ne semblait pas gêné par ses questions un peu improbables pour changer de sujet. Il paraissait même trouver cette manie plutôt drôle.

Les deux jeunes gens n'avaient plus reparlé de leur Vrai Nom, considérant cette question comme taboue. De toute façon, personne ne donnait jamais son Nom à moins d'avoir une confiance absolue en l'autre ou bien d'y être contraint pas des traditions ancestrales et stupides.

Le temps passait vite avec de la compagnie, songea Hilin'A. Et c'était vrai. Elle avait moins mal aux jambes et prenait presque plaisir à marcher à côté de la carriole. Griférid marchait à côté d'elle, suivit par Rambard et le chariot. Il lui avait expliqué qu'il ne montait Rambard que si ce dernier hésitait à avancer, comme en montagne. Ceci expliquait pourquoi la première fois qu'Hilin'A l'avait vu il était à cheval. Apparemment, l'énorme bête de trait avait un peu le vertige. L'idée qu'un animal aussi imposant puisse avoir une peur du vide fit sourire Hilin'A. 

Malgré leurs longues conversations, Hilin'A ne savait toujours pas ce que contenait le chariot si ce n'est le fusil de Griférid. À chaque fois qu'Hilin'A lui avait posé la question il l'avait éludée en changeant délibérément de sujet.

Hilin'A était malheureusement d'une curiosité maladive et ne cessait de remettre le sujet sur le tapis, commençant sérieusement à agacer le jeune homme. 

Cet après-midi là, alors qu'ils venaient de finir leur sieste et se préparaient à repartir, Hilin'A insista encore une fois. Elle voulait vraiment savoir ce qu'il y avait sous la bâche. Griférid était dos à elle en train de ranger les couvertures et la jeune femme vit son dos se mettre à trembler de ce qu'elle pensa être de la fureur. Elle allait se raviser et s'excuser mais elle entendit un bruit étrange. Celui d'un reniflement.

Hilin'A tourna la tête à gauche, à droite puis comprit que ça venait de Griférid.

-Grif? demanda-t-elle. Tu pleures?

Griférid se retourna et Hilin'A put voir les larmes contenues dans ses yeux. Ce qui lui fit le plus peur fut la rage contenue dans son regard. Instinctivement elle recula, se prenant pour la cible de cette colère immense. Le regard de Griférid s'adoucit alors et il se laissa tomber contre la cariole pour finir assis par terre, les bras autour des genoux, dans une position si enfantine qu'Hilin'A en oublia l'homme qui se tenait face à elle l'espace d'un instant. Son coeur se serra. Un soudain instinct maternel s'empara d'elle et elle s'accroupit à côté de lui en lui caressant la tête comme le faisait sa grand-mère quand un enfant de la tribu était triste. Elle se mit alors à lui chanter la chanson qu'elle avait écrite seule dans sa prison.

-Comme une roue qui tourne, le destin s'enroule...

Griférid releva la tête, les joues baignées de larmes. Il ressemblait tant à un enfant à ce moment-là...

Le Vrai NomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant