L'Insatisfait

172 20 51
                                    

Il veut le monde, l'insatisfait.

Poussé par le vent de l'envie, il est celui qui veut plus qu'il n'a déjà.

Rongé par le besoin d'avoir, il a ce qu'il veut. Mais ça, il ne le sait pas.


Il veut l'amour, l'insatisfait.

Trouver le jour lorsqu'il fait nuit. 

Il chercher la beauté, la splendeur, celle qui saura faire fondre son cœur, celle qui le guérira de ses malheurs.

Il ne sais pas, l'insatisfait, qu'il l'a déjà trouvée.

Il laisse et délaisse le cœur des autres, pensant au sien bien avant tout.

Il veut remplir sa tête pour oublier qu'elle est trouée, boire ses défaites, comme s'il pouvait les digérer.

Tromper le besoin par l'envie, ou l'envie par le besoin.

Il ne sait plus s'il aime encore, alors il cherche d'autres corps.


Il veut apprendre, l'insatisfait, à être heureuse, juste un petit peu.

Pour en un geste tout foutre en l'air et retourner en arrière.


Il sait attendre, l'insatisfait, mais pas trop longtemps, il n'a pas le temps.

Car il préfère le perdre pour quelques souhaits inaccessibles qui se consument au fils des heures, sans qu'il n'ait le temps d'y trouver son bonheur.

Il est plongé dans le silence, alors il crie pour le combler.

Il sait que plus rien n'a d'importance, mais il continue de creuser.


Alors il tombe encore plus bas, mais il se moque bien des sentences.

Il continue sans aucune chance, il ne sait même plus où il va.


Et il court, l'insatisfait, simplement pour rester en vie.

Il est dévoré par la faim, l'envie.

Il ne peut faire autrement.

Il se ment.


Il veut remonter le temps, l'insatisfait, prendre ces longs fleuves agités à contre-courant.

Mais il ne sait plus d'où il vient, et tant de chemins lui ressemblent.


Il continue, l'insatisfait, demande encore, demande sans fin.

L'avidité n'a plus de digue, et il se moque bien de son prix.

Il paiera, ça il le sait, mais pas maintenant, pas encore.

Il est assoiffé.

Une soif de richesse, soif de gloire.

Il n'a pas fini son histoire.


Il veut encore, il veut toujours.

Mais il ne sait plus ce qu'il veut.

Il est perdu, il passe son tour, et s'invente ses propres dieux.

Pour se punir lui-même de cette folie de l'envie.

Pour être indulgent aussi, car l'enfer n'est pas si joli. 

Et même dans le ventre du diable d'or, 

Il en voudra encore. 


Son envie n'est plus qu'un poison qui s'écoule en lui. 

Qui le noie sans raison, de l'intérieur, le brûlant d'ennui. 


Il veut s'arracher la tête, l'insatisfait.

Mais ce ne sera pas suffisant. 

Le manque lui ronge toujours l'esprit, mais son corps crache le trop plein. 

Le cycle infernal de l'envie, l'enterre petit à petit en être humain.



Il se meurt, l'insatisfait, mais le besoin le garde en vie. 

Comme s'il voulait encore, malgré les excès de sa folie.


Le creux qui s'ouvre dans sa poitrine, ne demande qu'à être rempli. 

Mais comment une fois satisfait, peut-on le garder refermé ?

Car tôt ou tard, ce fléau, fini par revenir. 

L'insatisfait, jamais rassasié, va finir par exploser. 


Alors il fuit, l'insatisfait. 

Et il cherche la mort. 

Car elle n'a qu'un seul prix : celui de ne plus avoir envie.


Il veut le monde, l'insatisfait. 

Il veut cesser d'être envie.

Quitter la fête, perdre la tête. 

Il abandonne la partie.


Il veut la mort, l'insatisfait. 

Encore faut-il qu'il y laisse sa vie.






Corps EtrangersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant