10. Black life

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PDV Manoah.

Je me réveille avec entrain aujourd'hui, je file sous la douche et m'habille pour aller au travail. Une fois fait je me dirige vers ma voiture et me rend au boulot.

Certes je suis un peu en retard, mais c'est pas grave, il ne reste presque plus rien à faire avant que Sensation ne soit disponible sur la place publique.

Je prends l'ascenseur et avant d'aller vers mon bureau, je me dirige vers le bureau d'Hugo.

Je toque et entre sans qu'il ne réponde. Il est assis, concentré sur sa paperasse.
_ Bonjour ! Je lance.

Il ne se retourne même pas pour me regarder. Malgré tout je ne désespère pas et me place derrière lui en mettant mes mains sur ses épaules. Il me repousse bien vite avant de se masser les tempes.
_ Écoute Manoah, j'ai du travail donc si tu pouvais me laisser tranquille. Pourquoi tu n'irais pas rejoindre le petit frère d'Elena ? Lui qui est << si canon >>.

Alors c'est ça ? Il est jaloux à cause de mes paroles ? J'aurais pu trouver ça mignon mais là franchement je trouve ça abusé et puéril.
_ Tu trouves pas que t'exagères ? On sort même pas ensemble je te signale !

Oui je sais j'ai dit ça pour le provoquer. Pourquoi ?
Il ne veut jamais assumer. On s'est déjà embrassé, à plusieurs reprises, il m'a déjà dit qu'il m'aimait et moi de même. Mais dès que je veux le présenter comme mon petit copain il refuse !
_ J'aurais dû écouter mon père et ne pas fréquenter une black, dit-il en retournant à sa paperasse.

Crac.

C'est le bruit que dois sûrement faire mon cœur à ce moment précis.
_ C'est pour ça que tu voulais que personne ne sache pour nous ? Tu avais honte de moi ? Parce que je suis noire ?

Je sors précipitamment de son bureau. Oui je prends la fuite, car je ne veux pas qu'il me voit pleurer.

Une fois dans le rez-de-chaussée je cours vers la voiture et m'enferme dedans. Je pose ma tête sur le volant et donne libre court à mes larmes.

Bien sûr que ça m'était déjà arrivé d'entendre des propos racistes me concernant, mais de la part d'Hugo ? Je ne m'y attendais pas.

Enfant, on me critiquait beaucoup, avec mes cheveux crépus, malgré que j'avais la peau plutôt claire. Mais en grandissant ça se passait plus rarement, mes cheveux devenaient lisses au fur et à mesure.

Au collège, ça n'était pas très top non plus, comme j'étais une métisse, on me demandait toujours si je me sentais plus noire que blanche.
Qu'est ce que j'étais censé leur répondre ? Que j'étais trop noire pour être blanche et trop blanche pour être noire ?

Au lycée ça s'est plus ou moins apaisé. J'étais presque toujours seule, mais au moins on ne me persécutait plus.
Je n'étais pas vraiment dans les plus brillants: la fille assise dans le fond, que tout le monde redoute sans le dire à haute voix, toujours armée de son calepin et son crayon, pas très brillante, un peu dyslexique. Bref pas un cadeau du ciel.

Et un jour je m'étais engeulé avec Elena. C'était un peu la go que tous les gars voulaient dans leur lit, celle que les filles enviaient, bref madame la populaire.

On s'était presque battu jusqu'au sang, j'avoue qu'avec ses airs de princesse je ne pensais pas qu'elle savait se battre, mais elle m'en a fait bavé tout de même !

Je ne me souviens même plus à quel moment on est devenu amie. Mais laissez moi qu'au lycée quand Elena m'a pris sous son aile, on a commencé à me respecter.
Je me faisais invité aux soirées de populaires, un gars était toujours là pour porter mon sac le matin, bref la vie en rose !

Et puis après le bac, j'ai eu peur. Je vis dans une partie des Etats-Unis majoritairement blanche, et j'avais peur de ne pas me faire accepter dans les universités de mes rêves à cause de ma couleur. Alors je n'ai envoyé mon dossier nul part et j'ai pris une année sabbatique.

J'ai beaucoup galéré avec des petits boulots, en jonglant parfois entre trois tafs à la fois pendant à peu près trois ans.

Et quand Elena m'a proposé de venir travailler dans son entreprise, je n'ai pas hésité une seconde.

Elle me proposait d'être directrice artistique. Comment refuser ? Ça revenait à faire la seule chose que j'aime: le dessin.

Et puis j'ai rencontré Hugo et quelque temps plus tard Elena l'a engagé parce que je suis très persuasive, aussi parce qu'il était talentueux. Il y avait ce petit jeu du suis moi je te fuis, fuis moi je te suis.

Et je crois qu'on est sorti ensemble, on s'est déjà embrassé à plusieurs reprises, et je ne vais pas vous mentir, on a déjà couché ensemble aussi. Mais il ne voulait pas que ça se sache, il disait que ce serait un secret. Et moi comme la fille énamourée que j'étais, j'ai accepté ! J'ai menti à Elena pour lui, j'aurais tout fait pour lui...

Et oui j'ai dit << je crois >> parce que après ce qu'il m'a dit aujourd'hui, je comprends bien qu'il n'y a jamais eu de nous.

SensationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant