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De nos jours

Encore une année sans ma grande sœur. Les fêtes de fin d'année vont encore se passer sans joie, morose et... sans elle. Cela fait déjà quelques années que je la recherche. Rien n'abouti, j'essuie échec sur échec. Aucune trace d'Alice Morin. Ni sur les réseaux sociaux, ni sur le net, aucun signe de vie, comme si elle n'avait jamais existé.

Quand elle est partie, je n'avais que sept ans. Les souvenirs qu'ils me restent deviennent de plus en plus flous. La dernière image que j'ai gardée en mémoire me traumatise toujours autant. Pour notre famille, son départ a été très difficile à surmonter. Cette nuit du vingt décembre où elle est partit sans se retourner, a été le début d'une descente au enfer pour mes parents. Cette date est pour moi la pire de toute. Plus un seul noël n'a été fêté. Je ne me rappelle plus un seul jour heureux. Mes nuits ont été hantées par des cauchemars pendant longtemps. Je me suis fait tout un tas de scénarios tous plus horrible les uns que les autres. Il m'arrive encore de l'imaginer toute seule, perdue, à nous appeler... Je revois sans cesse tous ces policiers qui m'ont interrogée dans l'attente de réponses...Mais, je lui avais promis et j'ai gardé le secret depuis tout ce temps.

Aujourd'hui, je n'angoisse plus d'être emmener par les services sociaux. Mais pendant de longues années, la peur ne me lâchait pas. Mes parents sont tombés en dépression et ne s'occupaient plus de moi comme il l'aurait fallu. Je devais aller à l'école et gérer la maison sans leur aide. J'arrivais à comprendre leur tristesse, je vivais la même. Mais j'étais là moi et ils n'avaient pas le droit de m'abandonner. J'ai passé les premières années à leur en vouloir mais en grandissant, je me suis battu pour leur faire comprendre que j'existais et que s'ils ne changeaient pas de comportement je ferais comme ma sœur. Mes paroles ont agit comme un électrochoc et depuis ils ont relevés la tête. Le chagrin est toujours présent mais ils survivent. Ce trou béant existe dans chacun de nos cœurs.

Je me trouve devant un énième foyer social où elle aurait pu aller après son départ. J'en ai déjà fait beaucoup, dans les grandes villes autours de chez mes parents, personnes ne l'a jamais vu. Celui-ci est le dernier de la journée. Je suis fatiguée et mes espoirs s'amenuisent, mes parents pensent qu'elle a quitté la France où qu'un malheur l'a frappée. Les premiers mois, ils se rendaient régulièrement au commissariat pour connaître chaque évolution mais petit à petit l'espoir s'envolait et ils ont abandonné. Seulement, moi j'y crois, je sais et je sens au fond de mon être qu'elle est toujours là. Continuer d'y croire est mon seul booster.

Je caresse mon poignet, tatoué de nos initiales entrelacées dans le signe de l'infini et pousse la porte de l'établissement. En entrant, j'aperçois dans un coin, une jeune femme allaitant bébé sur une chaise pas très confortable et à la vue de tous. Elle ne doit pas avoir 18 ans, elle paraît si jeune ! Que fait-elle ici ?

Mes formations m'ont déjà permises d'être en contact avec de très jeunes mamans, ce qui me confirme le désir d'enfants par la suite. Je n'ai que vingt-deux ans et me consacre depuis plusieurs années à essayer de retrouver ma sœur, j'en ai donc, légèrement oublié ma vie sentimentale. J'ai eu quelques relations mais rien de sérieux, mon but principal est de retrouver Alice. Je dois également terminer mes études, encore quelques mois de stages et je validerai mon diplôme d'aide sociale. Je vais essayer d'avoir des réponses ici.

Je m'avance vers le point d'accueil où une femme d'une quarantaine d'année attend le sourire aux lèvres.

- Bonjour mademoiselle que puis-je pour vous ?

- Bonjour, je suis en quête de renseignements. Je recherche ma sœur qui est peut être passée dans votre foyer, il y a de ça une quinzaine d'année.

- Oh ! il y a un bon bout de temps. Je vais essayer de voir ce que je peux faire. Comment s'appelle-t-elle ?

- Alice Morin

- C'est un très jolie prénom et peu courant. Il y a longtemps que je travaille pour ce foyer mais ce prénom ne me rappelle rien. On va quand même regarder.

Elle tape sur son ordinateur mais personne n'apparaît sous ce nom. Dans les autres établissements où centres, j'ai appris qu'il ne fallait pas se fier à l'informatique. Au bout d'un certain nombre d'année les fichiers sont remis à jours. Dans quelques endroits, ils arrivent à les conserver en archives papiers et d'autres partent aux oubliettes par manque de place.

- Avez-vous des archives? cela fait très longtemps, l'ordinateur n'a surement pas la mémoire aussi longue !

Son sourire me conforte. Elle a compris la pointe d'humour un peu crispé que j'ai voulu apporter, malgré le stress de ma demande.

- Hum, attendez voir ! je peux peut être voir avec Benjamin. Vous pouvez patienter quelques instants ? Je lui demande s'il peut vous recevoir au plus vite. Installez-vous je reviens.

Je lui signifie que oui, je suis là pour ça et elle me désigne les chaises derrière, là où la jeune femme allaite. Plusieurs places sont disponibles à l'écart de cette fille, mais ma curiosité l'emporte. Je m'installe à ses côtés. Son regard un peu sombre se pose sur moi, elle me scrute quand je m'assoie. Puis une grimace traverse son visage, son attention revient sur son bébé, il lui a surement fait mal.

- Bonjour, je m'appelle Christabelle.

- Ouais salut qu'est ce que tu veux ?

- Juste parler un peu avec toi, comment tu t'appelles ?

Son regard est vide. Elle soupire.

- J'ai rien d'intéressant à te dire. Mes parents m'ont foutu à la porte à 5 mois de grossesse et le père ne sait même pas qu'il a une fille.

- Oh, merde comment tes parents peuvent te mettre dehors, surtout enceinte ?

- Ben va leur demander. Pour moi, ils n'existent plus, je vais vivre pour Emma. Ici, ils vont m'aider à créer un avenir pour nous deux.

Heureusement que ces établissements existent, tellement de jeunes sont rejetés. Pour Alice, ce ne sont pas mes parents qui l'ont mise dehors. Ça été son propre choix, enfin je pense, mais pourquoi ? Mon esprit s'évade, qu'a-t-il bien pû se passer dans sa tête à ce moment là ?

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