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Point de vue : Victoria Carter

Il est presque 21 heures quand Daddy rentre enfin du boulot.

- Enfin ! C'est pas trop tôt ! râlé-je depuis la cuisine.

Je suis assise sur le bar, les couverts sur la table, en train de traîner sur Instagram.

Daddy entre dans la cuisine, défaisant sa cravate et les premiers boutons de sa chemise. Je ne le regarde pas - enfin, je fais mine de l'ignorer pour lui faire comprendre ma frustration, comme à chaque fois qu'il rentre tard. Il s'approche et ouvre ses bras pour me faire un câlin, mais je fais demi-tour sur le tabouret pour lui tourner le dos et me concentre sur mon téléphone.

- Ne me boude pas, Princesse.

- J'arrêterai de bouder quand j'aurais l'estomac rempli.

Il soulève un paquet d'Haribo vide. Merde.
Il découvre ses cinq frères.
Merde, merde, merde.
Je me retourne lentement, un sourire innocent sur le visage.

- Tu dois avoir suffisamment manger je crois, me reproche-t-il en brandissant tous les paquets sous mon nez. Qu'est-ce qu'on a dit sur les sucreries ?

- Qu'est-ce qu'on a dit sur les heures de boulot ?

- Ne me réponds pas.

Je profite qu'il soit devant les fourneaux pour lui faire une grimace dans le dos et répéter silencieusement « Ne me réponds pas. ».

- Tu as fait quoi sinon aujourd'hui à part te gaver de friandises ?

- Je suis allée sortir Papou, le chien de mes parents. Ils sont partis rendre visite ma grande-tante Tracy dans le Connecticut.

Je raconte à Daddy l'histoire de ma grande-tante Tracy, le temps qu'il découpe les légumes pour faire un sauté. Il me coupe en pleine phrase, en laissant retomber violemment le couteau sur la planche en bois.

- C'est quoi ça ?

Daddy pose alors sa main sur mon pansement au-dessus de mon genou gauche.

- Oh ! trois fois rien. J'ai fait du roller dans le parc et Papou m'a fait tomber.

Il décolle une partie de la compresse pour examiner la plaie ensanglantée. Ce n'est que superficielle, ça picote juste un peu. Je le vois se pincer les lèvres tout en réajustant délicatement le pansement.

- Ne t'en fais pas, je l'ai bien désinfectée. Ça devrait vite cicatriser.

Quand il relève la tête, je trésaille en découvrant la fureur dans ses yeux azur. Je dois m'inquiéter ?

- Pourquoi tu ne m'as pas prévenu ? Ça aurait pu être plus grave, tu aurais pu finir à l'hôpital et je n'aurais même pas été prévenu.

- Sauf que c'est juste une éraflure.

- Et alors ? Je ne veux plus que tu mettes de rollers sans moi. D'ailleurs, tu n'iras plus au parc toute seule, non plus.

Il exagère, comme toujours ... Mais je le laisse parler pour éviter de le contrarier plus et laisse le temps remettre les choses dans l'ordre.

- Et comment je fais sortir Papou demain, moi ?

- Je viendrai avec toi.

Je ne lui ai pas dit que j'étais blessée et j'ai mangé plus de bonbons qu'il m'y autorise, mais j'ai quand même gagner du temps avec Daddy ! Je ne sais pas comment j'ai fait, mais je suis un vrai génie.

Je me jette au cou de Daddy pour l'embrasser et reste dans ses bras le temps qu'il prépare le sauté de légume. J'allume alors les enceintes et lance la version acoustique d'Only Girl. On s'amuse à danser ainsi, le temps que le repas cuise. J'adore cet homme.