Chapitre 1 : L'oublie est le meilleur des remèdes.

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La pire chose qui pouvait lui arriver était sans nul doute qu'on l'interrompe dans son repas. La chasse avait été bonne, à ses pattes se trouvait le cadavre d'un loup pauvre et faible. Elle ne s'était pas trop dépensé, mais elle en avait assez pour ce soir et elle ne repartirait pas à la chasse avant longtemps. Elle pouvait donc très facilement se relever et utiliser toute la force lui restant pour faire déguerpir cet intru qui avait osé l'interrompre.

Elle releva tout de même son museau de la fourrure terne de la bête au sol. Le sang chaud dégoulinant sur ses babines se répandit dans sa propre fourrure de nuit, le liquide gluant collant à ses poils. Elle se secoua, les dernière gouttes se retrouvant sur les murs de son terrier. Pour cette nuit cet endroit sera son abri. Elle grogna.


_ Que veux-tu ? Tu ne comprends toujours pas qu'il ne faut pas me déranger maintenant ?


Sa fureur décupla l'épaisseur de sa fourrure, et elle se retrouva en peu de temps debout, fixant le nouveau venue qui semblait minuscule face à elle. Elle était pourtant menue pour son espèce.


_ C'est urgent., balbutia-t-il. Je n'avais pas d'autre choix.


Il recula quelque peu, la queue entre les jambes.


_ Quelqu'un d'important vous attends.


Ses oreilles jusque-là dressé s'abaissèrent de peur et de honte. Il n'en menait pas large face à cette tueuse.


_ Il en va de la survie de tous.
_ Bien.


Son ton le fit partir, et elle se retrouva bien vite seule. Enervée, elle renifla une dernière fois la proie à ses pieds, encore chaude. Son cœur il y a peu battait toujours. Il avait été tellement jouissif de planter ses crocs dans son artère et de sentir le sang chaud couler dans sa gorge, bruler ses yeux et goutter sur le sol !

Elle plongea une dernière fois son museau dans le ventre de la bête, en prenant un dernier morceau pour la route. Peu de personne savait où elle se trouvait, encore moins osait approcher et la nuit qui plus est. Si un messager, ou même l'intervenant direct était venu la saluer, c'est que quelque chose de grave venait de se produire. Et si cela l'incluait, c'est qu'un bain de sang allait éclater dans peu de temps. Quelqu'un ne voulait pas faire le sal boulot, et heureusement elle était du genre à aimer boue et saletés. Elle ferait le travail avec un délice non dissimulé.

Elle se releva, ses pattes robustes l'amenant à l'extérieur de sa tanière. La lune ronde dans le ciel la surplombait de sa splendeur. Elle l'attirait. Ses yeux cherchèrent cependant dans les environs les traces d'un quelconque chasseur venu lui faire sa requête. Dans la forêt face à elle, les arbres silencieux et les bêtes tapis en leur creux se faisaient discret. Aucune lueur ne la scrutait, rien ne lui indiquait qu'un animal l'attendait. La forêt était calme, une ambiance douce et reposante, l'amenant à somnoler. La fatigue la rattrapait plus tôt que prévue, mais cette lune agissait sur elle avec un tel magnétisme qu'elle avait envie de laisser sa fourrure blanchir sous ses rayons. Elle était faite pour la nuit, pour les étoiles et pour les astres qui habitaient l'espace vide au-dessus de sa tête.

Elle revient à sa première préoccupation, abandonnant la lune pour revenir à son premier problème. Ses yeux nocturnes abandonnèrent la piste et elle huma plutôt l'air. Il est vrai que sa vue était bonne, mais elle avait toujours été plus forte pour pister. Le vent ne lui apportait rien d'autre que l'odeur de pins, de brindilles et d'animaux forestiers. Et lorsqu'elle fit attention aux bruits rien ne lui apportait non plus l'indice d'une présence. Elle se résigna et se prépara tout de même. Quelqu'un l'attendait, ce fait était certain. Quant à savoir où, c'était une autre question.

Comme Homme et Loup.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant