«Vous m'avez tout dit ? » demanda Oliver Swayer, le détective privé.
Il était assis en face de John Hellward, dans une petite cellule sombre, aux murs nus et froids, meublée uniquement d'une table et de deux chaises en bois. Le condamné répondit un simple «oui», comme un murmure lointain, triste et douloureux. Le détective l'observa un instant. Son visage s'était aminci, ses traits étaient fatigués, son teint était pâle et ses yeux plus ternes.
« Je suis prêt à mener une enquête minutieuse pour vous aider, monsieur, mais je ne peux rien vous promettre, étant donné...
- ... les circonstances particulières qui vont faire de moi un cadavre languissant au bout d'une corde perfide et justicière d'ici quelques heures, acheva le jeune homme. Je sais tout cela, monsieur le détective, et je ne vous demande rien. Je n'ai plus rien, à part les mots, et ne demande pas qu'on me sauve, tant je sais que c'est chose impossible. Ma femme espère trop de vous. Ne l'écoutez pas. Elle ne veut pas voir les choses en face, elle a peur.
- J'ai entendu dire que vous alliez divorcer...
- En effet, tout était presque en ordre.
- Si je puis me permettre, elle semble encore vous aimer !
- Ah oui ? répondit distraitement Hellward. Peut-être, je ne sais pas. Tout cela n'a plus aucune importance à présent.
- Qu'est ce qui vous a amené à décider le divorce ?
- Tout me semble si confus, maintenant, que je ne trouve plus de raisons valables... Je crois que c'était une question de confiance absente, d'amour qui diminuait... Nous ne formions pas la bonne paire, si vous me permettez l'expression. Nous nous en sommes rendu compte trop tard.
- Et qui est le jeune homme, Harry Slowen, je crois, qui était au tribunal le jour de l'audience, accompagnant votre femme ?
- Un de ses amis d'enfance. Harry est un homme bien, très aimable, mais... peut-être un peu trop. Cela ne m'étonnerait pas du tout qu'après ma mort, il se tourne vers elle et la demande en mariage, ajouta Hellward en souriant.
- Je vois... Et en ce qui concerne l'héritage ?
- Je me suis organisé pour les dispositions testamentaires : mes enfants héritent de tout.
- Qui est au courant ?
- Tout le monde, je crois. Depuis que nous avions décidé de divorcer, c'était mon intention, et je ne l'ai pas cachée. J'ai signé et envoyé la lettre à mon notaire. Tout est arrangé. »
Swayer resta songeur un instant. Et si... Non c'était absurde. Mais tout de même... La lettre était-elle arrivée ? Sinon... Il se leva et se dirigea vers la porte, son chapeau à la main.
« Une dernière chose, monsieur Hellward ! Pourquoi avez-vous touché au poignard ?
- Ce n'était qu'un simple réflexe » répondit simplement le jeune homme.
Le détective hocha la tête, puis attendit un instant avant de mettre son chapeau. Il se retourna et ouvrit la porte de la cellule. Une voix douce et mélodieuse se mit à déclamer derrière lui :
« Les phoques se sont tus, sur les rochers, et je reste là, les yeux fermés, en souriant, et je m'imagine que l'un d'eux va s'approcher tout doucement de moi et que je vais soudain sentir contre ma joue ou dans le creux de mon épaule un museau affectueux... J'ai vécu. »
Swayer sourit tristement, et quitta la cellule.
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Dos au mur, corde au cou
Cerita PendekLondres, XXe siècle. Un homme meurt. Tous les éléments concordent pour faire accuser son neveu, dès lors condamné à la peine de mort. À tort, ou à raison ? Il ne reste plus que quelques heures...