Malédiction harmonieuse

Préface

La musique... douce amie de nos jours sombres, de nos jours ensoleillés, de nos jours seuls, de nos jours entre amis. Elle accompagne chaque instant de nos vies, nous tient compagnie dans les coups durs, nous tient compagnie lors des jours de fête. Certains s'y dévouent corps et âme pour le plaisir des oreilles de leur entourage.

Mais dans ce monde, même le plus sucré des mets peut s'avérer être le plus mortel des poisons. Donner signifie aussi prendre. Recevoir signifie aussi sacrifier. La musique peut être votre alliée, mais faites attention, il en faut peu pour qu'elle devienne votre pire ennemie.

Il ne les a pas écoutés, il s'est laissé envoûter par cette harmonieuse mélodie, et il en a payé le prix. A quel prix suivrez-vous cet étrange accord dans les bois ? Même si l'on vous dit que cet endroit est maudit ? Un jeune, une fois, s'est aventuré à la suite de ce morceau, et par le plus grand des miracles, il est revenu vivant. Mais à quel prix ?

Lui qui souriait si souvent avant, semble beaucoup plus réservé. Lui qui chantait, ne produit plus aucun son. Lui qui rayonnait de joie, est désormais mélancolique et distant. Lui qui était humain, ne l'est plus maintenant.

Il aborde désormais un masque de médecin de la peste doré, décoré d'arabesques de notes cuivrées et noires. Ses cheveux, avant d'un blond éclatant, se sont ternis, sont désormais raides et tendent sur une magnifique couleur perle, ondulants dans son dos à chacun de ses pas discrets. Sa peau emplie de vie est désormais à l'effigie des cadavres, d'un blanc de porcelaine. Il aborde toujours les mêmes vêtements, une chemise noire aux manches amples et sertie d'un jabot où contraste la couleur dorée d'une clé de sol. Un pantalon tout aussi sombre met en valeur les fines chaînes dorées qui échappent à sa ceinture, habillées de notes qui laissent entendre le doux bruit de leurs chocs au moindre de ses mouvements. Dans son dos, volte une longue cape d'un or sombre, brodée de ses mêmes symboles dansants. Ses mains, aux ongles anormalement longs, sont recouvertes de mitaines brodées.

Il cache son corps désormais maudit par ce simple attirail, il cache les marques gravées à même sa peau que cette mélodie lui a laissées. Il cache ses pupilles verticales, il cache ses iris d'or, il cache ses crocs animaux, il cache sa peau qui scintille lorsqu'il joue de la musique, il cache ce qu'il est devenu.

Cet homme a suivit la mélodie, s'est laissé charmé, et s'est retrouvé à devoir abandonner sa nature humaine. La musique qui alimentait sa vie jusqu'alors, devint un horrible sortilège. Il a perdu sa voix, sa joie, ses couleurs de vie. Peut être l'avez-vous vu sur les routes, à marcher avec son violon ? A jouer pour le plaisir de ceux qui l'écoute ? Il a été maudit. Il n'est plus qu'un être en vadrouille, obligé de jouer pour charmer d'autres humains, pour les maudire à leur tour.

Faites attention. Ce qui vous réconforte aujourd'hui, peut devenir votre ennemi demain.