This is America.

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21 mars
7:00
Près de Paris
America Roy

-Am' debout!

-Mmh, grogné-je.

Ma première pensée : ma disserte sur les alternances de pouvoirs en Amérique. Je me suis endormie dessus. En ouvrant les yeux, je constate en effet que je suis avachie sur mon bureau. Mes dix pages de devoir sont constellées de traces de mascara et de tâches de bave. Super, ravissant. Je me frotte les yeux, empirant sûrement l'état de ma figure. J'essuie vite les saletés sur mes copies et les fourre dans mon sac à dos. Je finirai de griffonner la fin sur le chemin. Après une douche plus que rapide, suivie d'un petit déjeuner express constitué essentiellement de café, j'embrasse ma mère et mon père et claque la porte. Le froid me glace mais je m'habitue assez vite en enfilant ma doudoune.

J'habite à une demie heure à pied de l'École. Il est 7:30. On est bien. Je marche et je ressors ma dernière page de devoir. J'entame la conclusion du paragraphe tout en longeant la route plutôt empruntée. Je colle tant bien que mal le talus au bord de la route pour éviter de me faire renverser. Écrire en marchant me ralentit beaucoup mais je préfère être légèrement en retard et avoir terminé mon devoir plutôt que d'arriver avec quelque chose d'inachevé. Je note le dernier mot en bas de la page et range tout dans mon sac. 7:50. Merde. Je suis en retard, je suis encore à 20 minutes de marche. Je commence à courir. Heureusement que j'ai un bon cardio, parce qu'à la vitesse ou je cours, n'importe qui serait essoufflé après cinq minutes. Pas moi.

Il n'y a pas beaucoup de place sur le bord de la chaussée, certes, mais je peux entendre les moteurs derrière moi et m'écarter quand il le faut. 7:55. Il me reste plus d'un kilomètre. Je sprinte. J'arrive en vue du bâtiment. J'entends au loin un bruit de motard qui a l'air pressé. Je n'y prête pas attention et passe le dernier pont. Le bruit se rapproche. J'entends le conducteur du bolide crier et rire. Il doit être saoul. J'entends sonner 8h. Le bruit du moteur m'étourdit et se rapproche. Il emprunte également le pont ce qui m'étonne car seules les personnes qui souhaitent entrer dans le bâtiment le font et cela m'étonnerait qu'un motard bruyant et saoul ait intégré l'école de Sciences Politiques Paris. Je me retourne et je vois un homme cagoulé et casqué sur un bolide noir rutilant me pointer du doigt et crier. Je commence sérieusement à avoir peur. Plus que 100 mètres. Il se rapproche. Je cours, plus vite que jamais. Il me rattrape. Lorsqu'il arrive à ma hauteur, il hurle: "LE KAISER L'A ENFIN RETROUVÉE" en pointant un revolver noir sur moi. Je n'ai plus le temps de dire un mot, de m'arrêter, ni même de penser. Je ne vois que du noir  et je ressens le bitume froid rencontrer mon crâne violemment.

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Le même jour
9:00
Washington DC, Maison Blanche
Matthew Douglas, Président des USA

Je me poste devant ma télévision. Ce soir est diffusé un reportage sur la vie et sur le mandat de mon père. J'aime toujours regarder ce genre de programme parce que je m'inspire des commentaires et des avis des médias pour tenter de rendre meilleure ma période présidentielle. De plus, mon père est un exemple pour moi et j'essaie de calquer ma façon de diriger le pays sur la sienne, puisqu'il est célèbre pour avoir gouverné les Etats-Unis brillamment. 

-Ju' apporte à boire, s'il te plaît, commandai-je à la blonde à mes côtés.

Elle pose une bière devant moi et prend place sur le large sofa de cuir près de moi, ce à quoi je répond par un baiser dans son cou. Julia Clayton, c'est ma femme. On s'est mariés à 19 ans et j'avoue ne pas avoir beaucoup réfléchi aux conséquences, à l'époque. J'ai été élu cette année là et mon père m'a affirmé que pour crédibiliser mon autorité, il fallait que je me marie. Ce que j'ai fait, avec une mannequin milliardaire célèbre. C'est vraiment une belle femme qui offre tout ce que l'on peut espérer d'elle sans se poser de questions. Elle est là où elle doit être et sait se rendre utile quand il le faut.
Elle allume la télévision sur la chaîne nationale et se love contre moi.

"Nous allons aujourd'hui parler des deux mandats de notre ancien président bien aimé, John Douglas, celui qui nous a sorti de la Grande Crise. Cet homme a tout réussi dans sa vie: son règne, son mariage et surtout son fils, l'actuel président, Matthew Douglas"

-Oh oui Matt, bien sûr que tu es réussi, me lance Julia avec un regard plein de sous-entendus

Je lui souris, pour toute réponse.

"John Douglas s'est donc marié à 45 ans avec la belle Marina Douglas, qui en avait 15 de moins. Ils filaient tous les deux le grand amour, jusqu'à la naissance de leur fils Matthew Douglas, il y a 23 ans."

Je vois Julia qui glisse doucement et qui s'endort. Elle est peut être parfaite mais elle ne réfléchit pas beaucoup lorsqu'il s'agit de politique ou de quoi que ce soit d'autre, d'ailleurs.

"Huit années plus tard, Marina Douglas a subitement péri lors d'un accident. John Douglas sombre pendant plusieurs semaines à cause de la Grande Crise et aussi à cause de cet affreux événement mais il se ressaisit pour la fin de son second mandat. Beaucoup de rumeurs éclatent alors sur lui: aurait-il un projet tel que la création d'une bombe destructrice?"

Je me souviens, étant enfant de huit ans avoir vu mon père pleurer et boire. Surtout boire. Il était effondré et personne n'a pu l'approcher pendant plusieurs semaines. Je ne sais par quel miracle il s'est relevé de sa dépression et a repris le pays en main avec une étincelle nouvelle. Lorsque les rumeurs ont éclaté, il était serein et à réglé les problèmes du pays d'une main de maître. Voilà la raison de mon actuel mandat: les Américains voient en moi un nouveau John Douglas.

"Le Président a alors démenti toutes ces rumeurs infondées avec un discours devenu culte. Il a également sauvé le monde en découvrant la fameuse mine de Talahassee. Le nom de John Douglas restera toujours gravé dans les mémoires."

En effet, mon père est un grand homme. Il m'aide toujours et est désormais, à 68 ans, membre du Sénat.
J'allais éteindre la télévision lorsqu'un coup de fil retentit sur mon téléphone personnel.

Appel entrant. Ryan Workins. Directeur général du FBI.

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