A lonesome Brother (en cours)

2_Déclin

    « Vince, écrit à notre frère que notre entraînement se déroule à la perfection et que tu es le meilleur franc-tireur de ta promotion » commandait chaque soir Célestin, à son frère Vincent le seul lettré des deux. Avant leur affectation il s'était installé une sorte de routine. Les deux frères participaient à l'entraînement, rentraient se coucher à la caserne, mais jamais ils ne se couchaient sans avoir écrit une lettre à leur benjamin. Malheureusement tout changea quand ils furent envoyés en première ligne, là où la santé mentale s'étiolait au fil des jours et finissait par disparaître, déchirée. Le premier changement fut que Célestin se rendit compte que lui et ses compagnons n'étaient que de la chair à canon alors qu'au contraire, Vincent ne voyait qu'à travers le prisme de la guerre et se gaussait du nombre d'ennemis tués lors de ce qu'il appelait « ses chasses ». A ce sujet ils eurent plusieurs différents, mais la complicité ayant été établie dans l'enfance suffisait encore à les les gardait étroitement liés. Cependant c'eût un impact assez important sur l'accord établi avec Lucien. Ce dernier ne recevait qu'une version des faits, celle de Vincent. Son autre pendant, par un manque de finances et de volonté, n'avait pu aller à l'école et ne connaissant que quelques caractères grâce à l'apprentissage approximatif de Vince.

Le petit frère voyait donc cette guerre comme une croisade quasi-céleste, où y mourir était un aller direct au panthéon. Il en était rien. En réalité, les soldats pourrissaient dans les casernes mal famées où ils dormaient, et tuaient, parfois de manières barbares, les ennemis tentant de faire reculer le terrain. Il y'avait bien sûr déjà eu de ces énormes mêlées, où le sol se mélangeait en ciel, où l'on ne discernait les amis des ennemis que par le côté où ils se trouvaient. On aurait cru qu'après la première boucherie, les jeunes hommes auraient été dégoûtés et auraient refusés de continuer cette guerre qui était en vérité insensée. Cette guerre était d'ailleurs le fruit d'une dispute entre la nation Lehanienne et l'empire voisin, au sujet des taxes d'importation. L'un d'entre eux n'avait pas cédé suite à un refus à une nouvelle clause de contrat et avait déclenché ce déferlement de violence. Alors pourquoi les soldats obéissaient-ils toujours tels des moutons ? Pourquoi massacraient ils des vies avec tant de ferveur ? Pourquoi, c'est simple. La nation avait transformé cette vaine altercation en guerre sainte. Transformant l'empire autrefois allié en entité du mal. Elle transmettaient cette vue aux combattants et ces derniers marchaient, tête haute tels des soldats de plomb, ravis de plonger dans le carnage.

Célestin haïssait toute cette propagande et ce mode de vie et ne pouvait que constater avec tristesse la métamorphose qui s'opérait sur son frère. Ce dernier était devenu un être cruel, rendu aveugle par la violence ambiante. Il participait avec joie à chacune des exécutions qui prenaient place chaque après midi, en particulier celles des déserteurs. On l'entendait clamer haut et fort qu'avec lui, on n'aurait même pas besoin de cacher la tête des exécutés tant les actes qui les avaient conduit au peloton le débectai. Sa santé mentale déclinait chaque jour un peu plus tandis qu'à l'opposé, son frère se révoltait petit à petit, créant autour de lui un groupe de gaillards aux mêmes idées de révolutionnaires. Célestin se rendit bientôt compte qu'il se devait de rétablir la vérité sur les actes de l'armée mais qu'il ne pourrait compter sur son frère, rendu sourd et aveugle à ses arguments. Il demanda donc à l'un de ses chers compagnons d'écrire une lettre mettant à jour tous les événements dans leur triste lumière. Ce fut ainsi qu'il tint les mois qui vinrent, hanté par les horreurs qu'il continuait de voir quotidien, la lettre serrée en son cœur, sûr de pouvoir l'envoyer dès que le service postal le permettrait.