Oyé oyé,
Petit mot avant chapitre pour vous prévenir que ce dernier étant très long, il est séparé en deux. Les parties sont postées ensemble donc vous pouvez le lire entièrement en toute quiétude et toute tranquillité.
Hydratez-vous la glotte, il fait chaud.
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La chaleur s'était un peu calmée ces derniers-jours, peut-être parce que Won avait décidé de laisser les rideaux fermés pour empêcher le soleil de frapper trop fort dans le magasin. Des formes lumineuses avaient tout de même réussi à percer la dentelle suspendue, créant des halos sur le carrelage.
Grâce à la légère brise qui passait par l'ouverture de la porte, les carillons tintaient paisiblement comme un soir de Noël, amenant beaucoup de douceur dans le grand hall. Il n'y avait personne malgré qu'on ait sorti l'ardoise des différents menus sur le trottoir et chaque claquement de talon était prétexte au sourire commercial du patron qui nettoyait nerveusement sa vaisselle.
Quoiqu'il en soit, l'épicerie était plus agréable, moins étouffante.
J'étais déjà levée depuis un moment sans avoir pris la peine de déjeuner. Won m'avait juste offert une tasse de thé vert, mais au vu des températures, je n'étais pas persuadée que ça soit la meilleure boisson pour se rafraîchir.
Je me coiffais tranquillement. Monter mes cheveux noirs le plus haut possible, priant pour les avoir plaqués sur mon crâne de manière plus ou moins correcte, virer aléatoirement le mascara de la veille, aplatir mes vêtements froissés à même mon corps... Tout ça était d'une banalité déconcertante, si bien que je ne voyais plus l'utilité du miroir.
La dernière chose dont j'avais envie était de supporter en souriant une énième réflexion des clients sur mon absence de soin.
L'aïeul rinçait les deux seuls verres de jus d'orange qu'il avait réussi à vendre une heure plus tôt aux gars du chantier d'à côté, les mains très crispées.
Je n'avais toujours pas eu de conversation sérieuse avec lui. Je me disais que ça n'était pas le moment et je repoussais. J'avais peur de le briser en mettant des mots sur la situation. Vous savez, les mots qui ont tendance à détruire un homme d'affaires : « faillite », « fermeture », « déficit » ... Et puis, quand je reprenais courage, Joon débarquait. À croire que le destin lui-même attendait que le bateau coule une bonne fois pour toutes...
– Tu ne mets pas ton uniforme ? me réveilla-t-il.
– Non, mon nouveau est arrivé hier. Les filles m'ont dit que je pouvais me débarrasser de l'ancien.
Le vieil homme grimaça, comme à chaque fois que je parlais de mes collègues ou de quoique ce soit qui concernait mon travail. C'était simple : il ne les aimait pas. Pas que je portais les filles du Bee-Pretty Shop dans mon cœur, mais en tant que supérieures, je leur devais un minimum de reconnaissance... Bien que le soir, je frappais dans mon coussin à la manière d'une poupée vaudou.
– Tu sais que ma proposition tient toujours ? rajouta-t-il après un lourd silence.
Je soupirai.
– Je sais, Won, mais tu n'as pas les moyens de payer un autre salaire et puis, le Meogda n'a pas besoin de moi. J'apprécie ton inquiétude, mais tout va bien.
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Apa, Ana
RomanceAna est une jeune émigrée atteinte du syndrome de la page blanche. Dépassée par ses dettes et son incapacité à prendre sa vie en main, dans une ville où le chômage et le célibat sont très mal vus, elle tente corps et âme de sortir la tête de l'eau e...