Jour 82 : Lonely as fuck

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1

Ereinté, Yoongi jette son sac à dos dans l'entrée avant d'aller s'installer, le pas lent, sur le canapé du salon.

La journée a été longue, beaucoup trop pour qu'il ne veuille y reporter son attention une minute de plus. À peine avait-elle commencé qu'il se voyait déjà la terminer – son seul souhait étant d'y mettre un terme rapidement.
Il soupire, se tourne de sorte à faire face aux coussins du canapé, recroqueville sa minuscule figure ; le voilà disposé à ne rien entreprendre de plus, il va se contenter du calme de l'appartement et de sa position pour laisser filer le temps sans tenter de l'intercepter – à quoi bon faire matière une fois toute passion effacée par la lourdeur d'un jour d'école ?

Brr brr brr...

Son téléphone vibre sur la petite table, brise sa solitude et le silence qui régnait en maître depuis son arrivée dans le logis. Il ne l'attrape pourtant pas, l'abandonne à son sort, écoute simplement l'horrible son de ces vibrations qui rencontrent la vitre fragile du meuble ; cette cacophonie n'est que passagère, bientôt le bruit mourra pour redonner sa grandeur au mutisme dont il fait preuve actuellement.
Il sait qui appelle, de toute façon. C'est Namjoon, comme tous les soirs, qui veut s'assurer qu'il ne s'est pas perdu en chemin. L'adulte a pris cette habitude pour s'excuser de ne pas être souvent là, pour se faire pardonner d'être un Daddy à l'emploi du temps surchargé. Cela fonctionnait au départ, mais plus maintenant, Yoongi ne s'y retrouve plus et en vient à détester toutes ces facilités qui sont siennes – Facilités qu'il obtient du dur labeur de Namjoon.

Brr brr brr...brr brr brr...

Deuxième essai, toujours aucune réponse. Pire, l'adolescent se déplace, prend l'objet en mains ; pas question de décrocher, il le coupe pour ne plus être dérangé dans sa quête de plénitude. Si Namjoon veut lui parler, entendre sa voix, il n'a qu'à partir plus tôt du travail.
Une larme dévale sa joue gracile, un sanglot remplace l'assourdissante paix qui cherchait à l'envelopper de sa quiétude protectrice ; il est pris à défaut par sa susceptibilité un peu trop enfantine – susceptibilité qui se renforce dès qu'il doit passer plus d'une semaine en cours.

2

Il soupir, se déchausse, pose son sac de travail soigneusement dans le placard de l'entrée prévu à cet effet. C'est fini, il n'a plus à regarder son écran d'ordinateur durant les heures à suivre et cette pensée lui procure énormément de satisfaction. Malheureusement, ce sentiment ne s'éternise pas, l'angoisse prend bien vite le dessus – Angoisse de ne pas avoir eu de nouvelles de son précieux adolescent, angoisse d'être tombé sur le répondeur plus d'une fois, angoisse qu'il se soit blessé ou pire...
Namjoon pénètre l'appartement avec une boule logée dans l'abdomen. Il n'y a même pas une lumière d'allumée pour lui agresser les rétines, toutes les pièces sont éteintes – même la chambre de Yoongi n'a pas ce trait lumineux qui éclaire une partie du couloir en temps normal.

-Yoongi ?

Il ne le sait pas, mais l'adolescent s'est assoupi – Il dort tout bêtement, dans le salon, après avoir pleuré son corps en quantité de larmes. C'est pour cela que l'habitat semble inhabité, parce qu'il a accepté l'offre merveilleuse de Morphée et s'est endormi avant que la nuit ne repeigne le ciel d'un noir anthracite.

-Yoongi ? C'est Daddy...

Ses paupières se sont closes sur la vision d'un ciel aux multiples couleurs : rose, violet, orange, bleu ciel ; accompagnant ses songes d'un agréable voile de tranquillité qui a su lui retirer toute cette tristesse qui lui comprimait la poitrine.

-Yoon...

Namjoon l'a enfin aperçu, a pu se libérer de l'anxiété qu'à conduit sa disparition soudaine.
Il s'en approche, perçoit les sillons laissés par ses perles salées... se sent honteux de ne pas avoir pu le serrer dans ses bras au bon moment.
Quelque chose dont il n'a pas conscience travaille l'adolescent, le rend plus frêle qu'il ne l'était déjà – Et Namjoon ne trouve jamais les mots, ne sait comment aborder le sujet... Il se doute que c'est en lien étroit avec sa scolarité, qu'il n'a pas besoin de rechercher plus loin ; mais pour en avoir le cœur net il se doit d'avoir la discussion avec Yoongi.

3

Ce n'est pas son lit, ça n'a pas l'odeur de ses draps ; Yoongi ouvre les yeux après sa longue nuit de sommeil et se rend compte qu'il n'est nulle part ailleurs que dans le lit de Namjoon.
Son estomac gronde, lui rappelle qu'il n'a rien mangé depuis plus de vingt heures – son dernier repas datant de la veille, à la cantine (autant dire qu'il s'est contenté d'un fruit avant de fuir l'ignoble ambiance de ce lieu un peu trop plein pour son petit cœur d'enfant solitaire).

-T'es réveillé petit cœur.

C'est chaud, ça fond, rempli son être entier d'un enthousiasme qu'il ne saurait chasser – Namjoon est là ce matin, il n'est pas parti aux aurores, a attendu qu'il s'éveille. Il ne demande pas plus, ne désire pas meilleur accueil que celui de son seul soutien.

-Bien dormi ?

Il se contente d'hocher la tête. Il n'a pas envie de briser cette illusion, de sortir de son rêve ; s'il parle le sommeil s'en ira pour de vrai et l'image d'un Namjoon présent se dissipera pour apporter une réalité plus pesante.
Oui, c'est si rare qu'il se croit entre deux phases, qu'il se pense à moitié endormi – Il ne peut qu'être en plein rêve lucide.
Son cœur bat un peu plus fortement dans sa poitrine à l'approche de Namjoon. Si l'adulte crée un contact, la bulle se percera ; l'inconsistance prendra consistance, deviendra substance et Yoongi n'aura d'autre choix que d'accepter sa matérialité sous les rayons ardents du soleil.
Il se recule légèrement, essaye de ralentir les évènements ; il ne se sent pas prêt, veut dormir un tout petit peu plus... Il fait si sombre au dehors, si bon en dedans qu'il picore ces instants candides comme s'il s'agissait des derniers – Il ne sait pas de quoi est fait le présent, il a besoin de ces moments pour se ressourcer et affronter fièrement ce quotidien sans flamme.

-Yoongi, ça va ?

L'étreinte ne prend pas fin, le contact est réel.
Yoongi s'offre un soupir avant de nicher sa tête au creux de cette nuque si chaleureuse. Namjoon n'est pas un jeu de son esprit, il est bel et bien dans sa chambre en ce matin si ordinaire – Ce n'est pas un câlin espéré, il le vit et s'en imprègne du mieux qu'il le peut.
S'il avait su qu'il fallait pleurer pour obtenir de l'attention de cet adulte un peu trop occupé, il l'aurait fait depuis belle lurette désormais – Quoique, Yoongi n'est pas un excellent comédien, il ne sait pas se figurer correctement une façon d'être qui relève de l'imaginaire ; il aurait vite fait d'en faire trop ou pas assez.

-Mon petit bébé, je suis désolé...

Les voix se taisent, les corps parlent. Il ne faut pas plus que quelques caresses sur une chevelure rebelle, quelques baisers sur des joues trop creuses pour soustraire toutes les mauvaises pensées aux bonnes. Yoongi respire pour de vrai, sort de son apnée involontaire ; un beau jour est sur le point de s'animer. Pour autant, il ne dira pas ce qui le traverse de part et d'autre depuis que ses pieds ont frôlé l'asphalte poussiéreuse de ce lycée à la population triée. Ses lèvres ne se délieront pas pour livrer le secret de cette scène mouillée qui l'a vidée de toute énergie la veille.

...

16/08/2018
14h45

Bonsoir, bonjour.
Je le spoil ici parce que je ne m'attends pas à beaucoup de lectures ; un nouveau projet arrive.
Je me suis rendu compte (leul) que je suis beaucoup plus active depuis que je me permets d'avoir plus qu'une seule fiction à la fois.
Porkwa ?
Parce que je ne me bride pas et que j'écris là où j'ai l'inspiration d'écrire.
Ce qui est biiiiien mieux, parce que j'écris de manière inspirée et non simplement pour pondre un chapitre.

Donc, je publie ce chapitre, et je m'attèle à ce nouvel enfant qui tiendra compagnie à NB et Mondes Flottants.

Kissous. <3    

Why Kids Need Their Dads (HIATUS)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant