Un douanier s'approcha de nous.
— Veuillez énoncer votre identité, ordonna-t-il.
— Benar et Bril, répondis-je, nous sommes négociant en artisanat bawcks.
— Que faisiez-vous au Cairns ?
— Nous ne faisions que le traverser. Nous venons d'Ocarian. Nous avons passé les montagnes par Bathis. Nous ne pensions pas être ainsi accueillis au Cairns.
Le douanier nous envoya un sourire compatissant.
— Les cairns sont fous. Vous auriez du traverser les montagnes plus au nord et redescendre en longeant la côte. Vous auriez ainsi évité leur territoire.
— Cela fait un immense détour. De plus d'une douzaine.
— Plus proche de deux. Mais au moins vous êtes sûr d'arriver à destination.
— Je le saurais à l'avenir, répondis-je. Nous pouvons y aller ?
— Un petit instant encore. Je ne vois pas d'objets bawcks sur vous. »
Pour toute réponse je sortis mon épée de son fourreau et la tendit au... capitaine il me semble. Je n'étais pas très sûre avec les galons des gardes-frontières. Surtout que j'avais rarement affaire à ce grade. En général, c'était un sergent qui contrôlait les voyageurs. Peut-être n'avait il pas pu résister au charme de deux voyageuses en détresse. Les regards appuyés qu'il envoyait à Muy me laissaient penser qu'il s'agissait de cela. Malheureusement pour lui, de nous deux il avait choisi la mauvaise cible. Toutefois, l'objet que je lui tendais retint toute son attention dès qu'il le vit. Il la prit comme si c'était l'objet le plus précieux qui avait vu de toute sa vie. Peut-être était ce le cas d'ailleurs. Il le manipula comme si c'était du cristal, examinant les inscriptions sur la lame, appréciant son poids, son équilibre. Il fit quelques moulinets avec avant de me la rendre à regret.
« Vous n'avez que ça ? demanda-t-il.
— Le reste est là-bas, répondis-je, sur notre monture de bats. »
De la main, je désignais la plaine cairnsal. Il me fit un sourire de compréhensif en imaginant la perte que j'avais subie.
« Il y a un village à deux longes sur la route, dit-il, il n'y a pas d'auberge mais vous y trouverez quand même à dormir.
— Merci, il est encore tôt, je veux chevaucher le plus possible avant ce soir.
— Je vous conseille de vous arrêter au village. » Le regard appuyé qu'il lança une fois de plus vers Muy m'intrigua. Je me tournai vers elle. C'est alors que je remarquais la flèche qui dépassait de son épaule. Une sacrée tuile. En soi, ce n'était pas une catastrophe. Une fois la blessure soignée, il suffirait de quelques jours de repos pour qu'elle retrouve sa combativité. Elle manipulerait son épée de la main droite voila tout. La cicatrice disparaîtrait à la prochaine mue, dans six mois tout au plus. Mais il allait falloir s'arrêter le temps d'extraire cette flèche. En tout cas, voila pourquoi elle n'essayait pas d'enfiler une tenue plus décente.
Je m'approchais d'elle. « C'est arrivé quand ? » demandai-je. Question stupide. Elle avait été touchée de dos, c'était donc pendant la fuite finale juste avant de passer la frontière.D'ailleurs elle ne répondit pas. Elle devait avoir mal. Mais la douleur devait être bien inférieure à l'humiliation qu'elle ressentait à s'être fait ainsi blesser. De dos, comme une lâche.
« Je vais devoir enlever la flèche. »
Elle hocha la tête.
Il n'était pas question de retirer ce trait de la blessure comme ça, sans précaution. Elle avait pu endommager une artère. Je risquais une hémorragie fatale. À la place, je brisais la hampe le plus près possible de la pointe. Elle retint un cri. Muy était courageuse, mais elle n'avait pas l'habitude d'être blessée. Sa magie la protégeait contre ça, elle avait une faible résistance à la douleur. Un instant j'envisageai de la prendre devant moi sur ma selle. Mais le regard du capitaine m'en dissuada, sans que je m'en explique pourquoi d'ailleurs.
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Le Village (La guerrière libre - 3)
FantasySaalyn rentre de mission en compagnie de sa pentarque Muy. Au retour, elles sont accusées d'un meurtre. La guerrière libre a donc jusqu'à l'arrivée du prévôt pour prouver son innoncence et trouver le meurtrier.