Avah ruminait dans sa chambre. Punie, elle ne pouvait pas en sortir avant deux heures et se disait que c'était vraiment trop injuste. Son père était parti peu après sa naissance et elle voulait juste savoir pourquoi. Elle ne voyait vraiment pas pour quelle raison sa mère l'avait punie pour avoir posé la question une ou deux fois. Bon, dix fois, mais sa mère ne répondant pas il lui avait semblé légitime d'insister lourdement. Résultat elle se retrouvait à ne plus pouvoir sortir de sa chambre pendant deux heures, sans autre compagnon de jeu qu'un petit robot qui tirait des lasers totalement inoffensifs.

     - Dommage, se dit-elle. Il aurait pu casser la porte et j'aurais pu aller chercher Alizée et lui raconter à quel point mon robot est puissant.

     Puis elle se souvint que même si son robot avait effectivement ce pouvoir elle n'aurait pu en parler avec sa meilleure amie. C'était encore une chose qu'elle ne comprenait pas : pourquoi est-ce qu'on ne pouvait pas parler de certains des objets qu'on avait à la maison à d'autres personnes ?

     Depuis qu'elle était toute petite Avah entendait les histoires des Bienfaiteurs qui apportaient toutes ces belles choses au Village. Tout ce que le VIllage possédait étaient autant de dons qui profitaient à tout le monde. Elle n'avait jamais entendu parler d'un objet qui ne soit donné qu'à une personne, et à personne d'autre. "C'est même un des fondements de notre civilisation !" aimait répéter son professeur à l'école.

     Alors comme elle trouvait ça injuste d'avoir été punie pour une simple question à peine répétée elle se disait que ce ne serait qu'un juste retour des choses de dire aux autres que sa mère avait des choses que les autres n'avaient pas.

     Mais bien sûr elle ne le ferait pas. Du haut de ses 10 ans elle savait que c'était la colère qui la faisait penser ainsi et jamais elle ne ferait de mal à sa mère.

     Kaylee, seule dans sa chambre, profitait de ces heures de tranquillité pour s'adonner à son passe-temps favori : la lecture. Petite elle adorait s'échapper en lisant des aventures merveilleuses avec des princesses, des arc-en-ciel et des licornes. Mais dans ses lectures actuelles les ados avaient remplacé les princesses, mais au final cela ne changeait pas grand-chose parce qu'elles aussi cherchaient l'amour.

     - C'est quand même des feignasses ces princesses, se dit Kaylee. Elles ne travaillent pas et attendent qu'un mec parfait leur tombe du ciel. Si j'étais une princesse d'histoire je partirais à la recherche de mon prince, mais c'est moi qui le choisirais, et pas l'inverse !

     Elle se demandait pourquoi, dans les histoires qu'elle lisait, il n'y avait aucune mention des Bienfaiteurs. Ce sont quand même eux qui guérissaient toutes les maladies. Mais en y réfléchissant elle se disait qu'alors les histoires seraient bien moins palpitantes si personne n'était malade : il n'y aurait pas de potion à concocter, pas de dragon à terrasser pour lui voler une écaille. Beaucoup moins drôle.

     - A table ! entendit-elle.

     Elle mit fin à sa lecture et rangea soigneusement la seule liseuse existant à sa connaissance dans son compartiment caché.

ExilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant