❖ CHAPITRE 6. WILL.

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CHAPITRE MIS À JOUR.

Je franchis le seuil de la cuisine et parcours le carrelage glacé de mes pieds nus. Le silence qui règne ici est pesant et me fait me sentir mal à l'aise, j'ai la sensation que quelque chose de terrible vient de se produire.La gorge sèche par la soif, je continue ma route en direction du réfrigérateur. J'ouvre la porte et attrape la bouteille de lait entamée lorsqu'un corps étendu sur le sol entre dans mon champ de vision. Elle gît là, le choc me transperce de part en part et je lâche la brique. Le liquide frais se répand sur le sol et mes pieds déjà transis de froid, je cours vers elle.Elle ne bouge pas, j'ai beau l'appeler, elle ne répond pas. Il y a du sang partout, elle baigne littéralement dedans. Je glisse, manque de tomber par terre, puis m'affaisse au-dessus d'elle. Je la secoue comme je peux, mais aucune réaction. Je hurle plus qu'autre chose, je la prends dans mes bras et tente de la redresser. Elle est tellement lourde et blême. Des gouttes salées coulent le long de mes joues et viennent se fixer à mes lèvres, je suis pris de spasmes de sanglots et la berce, espérant qu'elle se réveille.J'entends un bourdonnement au loin qui me ramène à la réalité et me sort de mon foutu cauchemar. J'attrape mon téléphone sur ma table de chevet et jette un œil. Il est vingt-deux heures et Jérém m'appelle. Je décroche l'esprit encore paralysé par la terreur ressentie face au spectre de mon passé.— Ouais ? marmonné-je, la voix ensommeillée.— Mec, où t'es, putain ? Tu rates une pure soirée, s'extasie-t-il.— Je dors, connard.— Sors ton cul de ton pieu et viens nous rejoindre. Y'a de la meuf à tous les coins de la pièce, tu trouveras de quoi te mettre sous la dent.

S'il savait à quel point je m'en bats les couilles, là tout de suite. Mais peut-être que c'est ce qu'il me faut, de la distraction pour retrouver ma lucidité et chasser le mal qui me ronge.

— Où est la soirée ?— Près du campus, je t'envoie l'adresse.Je raccroche sans lui laisser l'opportunité de dire un mot de plus et me lève. J'attrape mon jean qui squatte le sol et l'enfile, puis vais chercher un tee-shirt propre dans ma penderie.Je quitte ma chambre et me mets en route. Après tout, ça ne peut pas être pire que de rester cloîtré ici, à ressasser mes vieux démons. Je chope ma veste en passant avant de grimper dans ma voiture et fais rugir son moteur.J'arrive enfin près du campus, ça grouille de monde et ça me soûle déjà, mais si je ne débarque pas, Jérém va me casser les burnes puissance mille, alors je vais faire abstraction de toutes ces gueules de cons que je ne peux pas encadrer. La plupart sont des petits branleurs qui se droguent et picolent. Il y'en a même qui foutent des trucs dans le verre des filles pour ensuite s'envoyer en l'air - du moins, si on peut dire ça comme ça puisqu'il s'agit purement de viol - des putains de bâtards. Et après, ça fait le malin parce que ça a réussi à se faire une nana, bande de minables.

La différence entre ces petites bites et moi, c'est que je n'ai jamais eu à forcer qui que ce soit afin d'avoir des rapports. Je sens que la soirée va être longue et que l'un d'eux va m'approcher pour me proposer de la came bien que leurs merdes ne me branchent pas.

Le pire dans tout ça, c'est que je n'aime pas les fêtes plus que ça. Je suis ce qu'on appelle un « loup solitaire » donc me retrouver parmi des ados surexcités qui veulent des sensations fortes ne me branche pas. J'y vais parce qu'autrement Jérém va me faire chier et puis qui sait, peut-être qu'il y aura du divertissement à la hauteur de mes espérances. Cependant, je préfère de loin les bars, là-bas, il n'y a que des adultes. Moins de chieuses qui ne savent pas ce qu'elles souhaitent - ou tout le contraire - pas d'emmerdeuses qui vont me proposer de les rappeler ensuite, alors que je n'en ai pas envie. Pas de chichiteuses qui s'offusqueront que je veuille les prendre dans les chiottes ou une ruelle sombre.

Je franchis tout juste le seuil du logement où a lieu la soirée lorsque Jérém me saute dessus, un gobelet à la main. Je jette un œil autour de nous et peux confirmer ses dires, il y a bien soixante-dix pourcents de nanas ici. Est-ce qu'il est sûr de ne pas avoir atterri dans une soirée pour lesbiennes au moins ? Il est tellement con parfois qu'il lui est déjà arrivé de drôles de tours. Je vous le dis, vous ne voulez pas savoir de quoi il s'agit. Si son plan cul du moment était au courant, elle prendrait ses jambes à son cou. En parlant d'elle, je la vois à genre trois mètres de nous, en train de discuter avec d'autres filles. Elle me fixe, en se mordant la lèvre. Si elle croit que j'en ai quelque chose à carrer d'elle, elle se fait des illusions. Je ne passe pas après mes potes. Désolé, chérie, mais je ne suis pas un chien qui mange les restes ! T'es certes un beau p'tit lot, seulement, ramasser les poubelles dans ton genre ne m'intéresse pas.

Pour mieux te détruire. © [ÉDITÉ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant