Un espoir

8 5 0
                                    

-Ce n'est pas naturel, c'est tout. C'est anormal, inhumain! Tu es une déviante, tu es malade, c'est ça la vérité! Reprends-toi, fais-toi soigner! Clamer que tu es... Que tu en es fière... C'est monstrueux.

Elle me fixe tel un ange vengeur, le feu de sa détermination brillant dans ses yeux glacés. Avant, j'aurais cru qu'elle avait raison. Je me serais laissée faire. Et puis, plus tard, je n'aurais pas compris; à sa haine, j'aurais opposé une haine égale. Mais maintenant, je sais. Je sais pourquoi elle fait tout ça: elle a peur.
Elle est terrifiée.

Alors je souris. Parce que moi je suis forte. Parce qu'au fond, j'ai déjà gagné. Je lui prends la main. Elle se tend, elle veut la récupérer, mais je ne la lâche pas. Je l'attire contre moi. Si son regard est froid, son corps est chaud quand je le presse contre le mien.

-Monstrueux? je murmure en posant doucement mon front contre le sien.

Je caresse sa joue de ma main libre, comme si elle était un animal effrayé. Sa peau est douce sous mes doigts, pourtant je l'effleure à peine. Elle inspire et ses lèvres s'entrouvrent légèrement. Ses pupilles sont dilatées maintenant, et elles rendent ses yeux aussi noirs que l'Enfer dans lequel elle veut me jeter.

-C'est monstrueux, ça? je lui demande.

Elle ne répond pas, alors je rapproche mon visage du sien, doucement, lui laissant le choix de reculer.
Elle ne bouge pas.
Je presse mes lèvres contre les siennes, le contact aussi léger que les ailes d'un papillon.

-Et ça? je lui demande. C'est monstrueux?

Elle expire et son corps se détend contre le mien. Je sens son souffle sur mes lèvres.
Quand elle bouge enfin, je crois que c'est pour se dégager, mais elle ferme l'espace entre nous et elle m'embrasse, m'embrasse, m'embrasse.
Je me perds dans son contact. Mes mains dans ses cheveux, ses mains qui aggrippent mes reins, je gémis ou peut-être est-ce elle. Je la serre contre moi, elle me serre contre elle, on veut plus, toujours plus, se fondre l'une dans l'autre.
C'est à regret que je la lâche.

-Et ça?

Je suis essoufflée.
Elle me regarde avec horreur. Elle a réalisé ce qu'elle vient de faire. De ressentir.

-C'est monstrueux? je lui demande.

Une larme roule sur sa joue. Elle se déteste, maintenant. Je veux lui dire que ça va passer, que ça ira mieux. Ça ne sera pas toujours facile, mais elle saura s'aimer comme elle est, et elle sera heureuse.
Si elle décide enfin d'abandonner sa haine.

-C'était monstrueux? je lui demande une dernière fois.

Elle ne me répond pas. Je lâche sa main. Peut-être que j'avais tord. Peut-être que le monde est définitivement pourri. Peut-être que je ne peux pas le changer.
Que je suis condamnée à souffrir.

Mais, enfin, elle murmure:

-Non.

Elle essuie ses joues mouillées de larmes.

-Que Dieu me pardonne de dire ça, elle dit, mais non.

Je l'enlace, et, serrée contre moi, elle pleure toutes les larmes de son corps. Je lui caresse les cheveux, et je lui dis ce que j'aurais voulu entendre quand j'étais à sa place:

-Ça va aller. Tu vas voir. Ça va aller. Tout est fini.

Et,pendant un instant, j'y crois. C'est fini. La haine, la violence, la peur.
C'est fini.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Aug 27, 2018 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Fragments D'EspoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant