Malee.
Sans plus, sans moins. Sans diminutif, sans ajout.Malee O'Cartner, mon vrai nom.
Canadienne depuis ma naissance, trois frères partis, une sœur, Courtney. Deux parents, aussi. Toujours unis, enfin... C'était le cas jusqu'il y a un peu plus de trois mois.
L'élément déclencheur ? C'est simple. Je n'en ai aucune idée.
Pour dire vrai, ma vie s'est arrêtée il y a quatre mois... Enfin, façon de parler. Vous savez, tout prendre à la rigolade.
Toujours est-il que je n'ai plus vu mes parents depuis l'accident, que toutes mes amis m'ignorent et que je n'ai plus aucun contact avec mes frères et sœurs.
Pour dire vrai, les garçons sont partis vivre ailleurs peu de temps après que je sois revenue de mes vacances avec mes "amis". C'était un peu précipité parce que ce n'était pas prévu.
Dans tous les cas, ils s'en sont allés à l'autre bout du monde sans même être passé par ma chambre. Et ils ne m'appellent pas... Ni ne me répondent, d'ailleurs. Parfois, j'entends ma petite sœur leur parler. En fait, nos chambres sont juste à côté, mais pas assez insonorisées. Toujours est-il que nous avons toujours eu une relation fusionnante, mais qu'il ne me reste plus rien de ce côté là, non plus. À chaque fois que je passe à côté de sa chambre, ce qui veut dire rarement, sa porte est fermée à clef. Et, si au départ elle venait régulièrement se réfugier dans mon lit, lors d'une violente dispute, ses visites se font de plus en plus rare.
L'école n'a jamais été aussi ennuyante. Vous savez, ces jours durant lesquels vous vous demandez à quoi apprendre tous ces théorèmes inutiles vous servira. Avant, je m'en fichais. J'étais une élève modèle, dévouée, et je me plaisais à expliquer les devoirs à mes amis. Je donnais même des cours, le soir. Et mon rêve était de devenir médecin, puis professeur. Peut-être chercheur, aussi. Tout ce qui était pratique et création d'un nouveau problème me plaisait. Mais tout cela a changé, aussi. D'un coup, après ces vacances.
Pourtant, je croyais avoir déjà fait ma crise d'adolescence. Il y a longtemps, entre mes douze et quatorze ans. Il faut croire que je m'étais trompée.
J'ai lu, il y a longtemps, une bande dessinée incompréhensible. En fait, c'était le ressenti de la vie d'un adolescent. On pouvais voir que tout était en désordre, sans dessus-dessous, et que rien ne coordonnait. Est-ce vrai ? Ce ressenti ? Car c'est ainsi que je me sens là, maintenant, tout de suite. Je ferme les yeux un instant, et respire calmement.
Quand je rouvre les yeux, je me retrouve nez à nez avec mon plafond. Celui que mon grand frère, Charles, m'avait peint pour l'inauguration de ma chambre.
J'avais treize ans à l'époque, et ce que je croyais être ma crise d'adolescence me faisait me sentir particulièrement proche de lui, l'esprit libre de la famille.
Toujours est-t-il que me souvenir de tous ces moments de rires et de joie me rendent nostalgique.
Je ne comprends pas ce que j'ai bien pu faire pour me faire ignorer par ma famille.
Un bruit de verre cassé me fait sursauter, alors que je me redresse.
Peu à peu, j'entends des voix s'élever, de plus en plus fort.
Mes parents se disputent...
Je me replace sous la couette et prend mon doudou, Lapinette.
J'ai ce lapin depuis aussi longtemps que je peux me souvenir. C'est la seule peluche que j'ai accepté, et je la garde toujours dans mon lit, à côté de moi. C'est ma meilleure amie. La seule qui ne m'a pas abandonnée.