Je n'avais pas eu le courage d'argumenter, en grande partie parce qu'il avait affreusement raison : en m'aidant, il était devenu une cible lui aussi. C'était bien connu, les méchants répliquaient après s'être fait ridiculiser.
À cause de cette froide logique, je me retrouvais dans l'immense appartement d'Aaron Cadwall pour la seconde fois. Enfin, appartement... Une maison au sommet de l'un des plus beaux immeubles de Toulon-Sur-Air, avec un jardin digne d'une forêt miniature.
— Vous avez payé combien pour avoir un tel endroit ? demandai-je, en entrant chez lui.
— Une somme indécente.
Un chat robotique fila devant nous, à la poursuite d'un oiseau tout aussi peu naturel. Ces deux-là, je ne les avais pas croisés, lors de la pose de la caméra. Ici, tout était épuré, avec des lignes droites, peu de meubles. Il n'y avait que le salon, avec son immense bibliothèque, qui portait la patte de son propriétaire.
— Allons dans mon atelier, m'ordonna-t-il en m'entraînant plus loin.
Une porte en verre coulissa, révélant un laboratoire ancestral. Rien ne paraissait neuf, comme s'il s'agissait d'une tranche de passé lointain. Pas étonnant qu'il aime autant mon modèle de prothèse oculaire.
Des antiquités robotiques se trouvaient là, comme des appareils de soudure vieux de plusieurs dizaines d'années, ou encore une raboteuse pour la menuiserie. Dans un coin, des bobines de fils, de métaux s'entassaient, dans l'autre, des pièces de fer. Le long des murs, des étagères en bois usées s'alignaient, pleines de caisses de vis, de clous, de chevilles, bref... Je me trouvais plus dans le garage d'un mécano de seconde zone plutôt que dans l'atelier d'un génie.
— Vous pouvez me dire ce que vous fichiez dans mon quartier malfamé, monsieur Cadwall ?
— Appelez-moi Aaron. Et je ne vous espionnais pas, contrairement à ce que vous croyiez.
Je m'installai sur un tabouret en bois, assez solide pour supporter deux cents kilos. Bon sang, mon épaule me cuisait horriblement. Cadwall, lui, claudiquait à peine avec une balle dans la cuisse. Était-il indestructible ?
— À vrai dire, il y a le meilleur vendeur de patates chaudes dans ce quartier, fit-il en allant vers un placard, sur la porte duquel étaient plantés quatre couteaux. Malheureusement, grâce à votre intervention, mes achats ont fini dans la poussière du bitume.
— Vous aviez besoin d'un remontant, après la réunion avec les militaires ? ricanai-je.
Il revint avec une petite boite métallique, la mine sombre. Il la posa, chassant au passage une nuée de copeaux de métal.
— Plus que ce que vous ne le pensez. Déshabillez-vous.
Je plissai les paupières.
— Pas même en rêve.
— Ça va compliquer le soin.
— Donnez-moi ce truc, et le chemin de la salle de bain.
Avec un soupir, il me fourra la boite dans la main.
— Je ne vous indique pas le chemin, il me semble que vous êtes déjà venue ici...
Sans répondre à son sourire narquois, je sortis de l'atelier, pour me retrouver de nouveau au cœur de la technologie. Fichu exhibitionniste. En plus, il se moquait de moi.
En m'asseyant sur le rebord de sa baignoire transparente, je poussai un profond soupir. Il ne m'avait même pas demandé pourquoi je m'étais fait attaquer. Il était vraiment énigmatique. Une fois, il était suffisamment indiscret pour me demander comment je m'étais faite énucléer, l'autre, il ne pipait mot. Il maîtrisait les armes de combat, ne paressait pas surpris par ma télékinésie, et avait neutralisé un robot à une centaine de mètres de distance.
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1. Un Agent en Tenue Moulante
Science FictionMission dangereuse pour une agent dotée de pouvoirs psychiques ! *** Des androïdes tuent des humains sans raison : ils ne sont pas programmés pour le faire. C'est pour enquêter sur ces morts mystérieuses que l'agent Flaméne Xax est forcée de collabo...
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