Chapitre un

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27 mai 1991.

Il est 8h ..et je suis déjà en retard ..c'est mon premier jour de travail et il ferait vraiment mauvaise impression que d'arriver en retard. Si je ne presse pas le pas je vais rater mon train, le prochain étant à 9h, cette éventualité n'est tout simplement pas envisageable.
J'essaye tant bien que mal de me frayer un chemin parmi la foule de voyageur amassée sur les quais. Et tampis si je bouscule au passage quelques personnes, aujourd'hui pas le temps pour la politesse.
J'essuie quelques remarques désagréable dues à mon impolitesse ,qui pourtant dans ce genre de lieu et à cette heure ci, ne doit pas être si rare que ça.

À bout de souffle j'arrive à entrer avant que les portes ne se referment. Ouf, il était moins une. Je guette une place assise mais c'était sans compter sur la malchance qui ne semble pas me quitter ces derniers temps. Alors je m'agrippe à l'une des barres pendant que le train amorce son allure de départ .

J'enfile mes écouteurs et me laisse bercée par la musique plutôt que d'entendre le brouhaha matinal des voyageurs..
Je stresse un peu, j'espère que ma première journée va bien se passer. Une célèbre enseigne de librairie m'a engagée afin d'illustrer des livres pour enfants. Je vais enfin pouvoir vivre de ma passion et savourer cette chance qui n'est pas donné à tout le monde.
D'autant que je me souvienne j'ai toujours voulu faire de l'illustration mon métier. A l'école déjà quand j'étais petite je rêvassais en dessinant tout ce que je pouvais voir. Ce qui m'a valu d'ailleurs assez de punitions pour recouvrir des cahiers entiers, au grand damne de mes parents.

À l'arrêt suivant , une banquette se vide et j'en profite pour m'y glisser à la vitesse de l'éclair..les places se font chères ..
Je m'assois côté fenêtre et regarde le paysage défiler à toute allure. Enfin je le regarde sans vraiment le regarder. A 300km/h , on y voit pas grand chose si ce n'est rien.

Je sens une présence à mes côtés et voie les lèvres d'un charmant jeune homme me parler sans que je ne puisse comprendre. J'enlève alors mes écouteurs pour pouvoir l'entendre.

-Excusez moi je vous demander si cette place était libre?

-Et bien comme vous le voyez sans doute, oui.

-En fait non je suis aveugle.

-Oh mon dieux , pardonnez moi, je n'avais pas saisie..je...

-C'était une plaisanterie, à mon tour de m'excuser. Mathieu , enchanté..et..un peu désolé.

Il me tend la main que je serre furtivement. C'est un bel homme, blond, le nez légèrement retroussé, pas très grand, le visage hâlé certainement par les rayons de soleil assez ardent pour la saison et un regard bleu azuréen dans lequel on pourrait se perdre ou se noyer ...

-Enchantée, Nora.

Je ne relève pas sa plaisanterie un peu loufoque. Drôle d'humour, du moins il en a . C'est une qualité que j'apprécie énormément chez un homme, c'est assez rare de nos jours.

-Je ne vous ai jamais vu sur cette ligne.

- Non , en fait c'est la première fois que je la prend . Je démarre un nouvel emploi aujourd'hui et il m'a semblé plus simple de prendre le TGV plutôt que de devoir faire l'escargot dans les bouchons chaque matin.

-C'est assez judicieux en effet..

Nous parlons ainsi tout le reste du voyage , de tout et de rien, de la pluie et du beau temps. Sa m'a l'air d'être un homme assez cultivé, drôle, même si ça on avait pu le deviner, assez séduisant je dois l'avouer et agréable.

Et c'est ainsi que nous avions pris l'habitude de nous retrouver chaque matin et chaque soir dans ce train, lieu de nos échanges ..
Nous avions appris à apprécier ces discussions à battons rompus..À apprécier la présence de l'autre, l'écoute ,que peu de gens offre de nos jours, tellement accaparés par leurs propre vie .

Au fil des jours , une sorte d'amitié s'est créé entre nous , nous nous retrouvions pour déjeuner la plus part du temps quand je ne mangeais pas avec mes collègues ..nous parlions de nos travailles respectifs.
Mathieu était agent comptable dans une société d'import/export. Il adorait les chiffres me disait t'il, ce que moi j'exécrais par dessus tout.
Heureusement que de nos jours les outils informatiques sont là pour nous aider . Faire mes comptes relève déjà d'un exploit alors..

L'amitié au fil des semaines s'est transformé en un amour naissant. Nous n'avions pas été victime de ce fameux coup de foudre que tant de monde décrit mais nous éprouvions l'un pour l'autre des sentiments sincères et serain.

C'est comme cela qu'ils nous a semblé naturel de nous mariés rapidement. Trop pour certains. Mais aussi parce que faute de précaution j'attendais un heureux événement. Tout était allé tellement vite. Mais en même temps la vie est courte et on ne sait pas de quoi demain sera fait..n'est ce pas?

Nos familles respectives ont dû finalement se donner une raison .
Ce pourquoi le 16octobre 1991 je suis devenu officiellement madame Mathieu Durant, dixit Mademoiselle Roberts. ..

Nous étions heureux c'est tout ce qui comptais même si un an ne s'était pas écoulé depuis notre rencontre. Un mariage et une grossesse en 5mois je peux comprendre que cela en ai bousculé plus d'un, mais cela nous importait peu. Nous focalisant sur notre bonheur à nous.

Tom , notre fils est né le 27 avril 1992. Un beau bébé en bonne santé, 3kg300 pour 51cm. Il était adorable et bien sûr le plus beau bébé au monde.
Mes parents étés fous de joie d'être grands parents, tout comme ceux de Mathieu..
Quelle belle famille allions nous former!!!

Du moins c'est ce que je croyais jusqu'à cet instant.
Car à partir de ce jour , plus rien ne sera comme avant.
À partir de ce jour, ma vie va devenir un calvaire..

Qui de notre amour ou de notre désespoir l'emportera?
Qui y survivra?
Ce qui est certain mais que je ne sais pas encore à ce moment précis c'est que désormais je devrais affronter le démon qui sommeille en lui , a n'importe quel prix....

Parce qu'une véritable fleur ne meure jamais sous la gelée...

Nora Roberts . Vivre ou survivre.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant