RAPHAËL SE SENTAIT BEAUCOUP MIEUX le lundi venu. Il avait retrouvé ses forces et sa bonne humeur, au plus grand bonheur de ses proches : le son de son rire, ils l'avaient presque oublié au cours des derniers quelques jours.Son père le déposa avec Louis au coin de la rue : ils marchèrent tous les deux vers leur collège en discutant joyeusement.
– On était à l'école, et — c'est drôle, on est toujours à l'école dans mes rêves — et y'avait toi, je pense, avec Loïc Pichet—
– Loïc Pichet? J'savais pas que t'étais son ami.
– J'le suis pas, c't'un trou de cul! Mais dans mon rêve, y'était nice. Bref, on était toi, moi, Loïc et — aaaaah, j'me souviens qu'il nous avait conté de quoi de vraiment drôle, mais j'sais plus quoi... J'en riais en me réveillant en plus, merde! grogna Raphaël en piétinant le pavé. Ça me rappelle tellement la fois l'année passée où...
Louis l'écouta divaguer avec une certaine tristesse dans le regard. Il acquiesçait de temps en temps, mimait retenir quelques rires pour lui prouver son attention, mais il n'arrivait pas à se concentrer sur ce que son frère lui racontait. Même si ce dernier lui assurait qu'il allait mieux, il ne pouvait s'empêcher de se sentir profondément coupable.
Très vite après l'assoupissement de son frère, son père et lui étaient partis à la rencontre du Dr Baumann.
– Après un diagnostic, il y a toujours une période d'ajustement avant de trouver l'équilibre, d'une année ou deux, je dirais.
– Oui, ça vous nous l'avez dit, docteur, maugréa Jonathan Martin.
La sueur luisait sur son crâne et sur le creux de ses mains. Il les essuya furieusement sur son jean.
– Alors vous savez que vous n'avez pas à vous inquiéter. Ça fait partie du processus—
– Excusez-moi, mais ça fait trois fois qu'on lui fait changer de prescription pis ça l'a pas plus l'air de marcher votre affaire.
– Il faut lui donner du temps. On finira par trouver ce qui lui conviendra, il existe bien une demi-douzaine de—
– Vous avez bien dit la même chose la dernière fois, r'gardez où—
– ... Tsé l'ascenseur pas loin du gym?
– Ouais, qu'est-ce qu'il a l'ascenseur?
– C'est vraiment un des plus beaux que j'ai vu de ma vie.
Louis haussa un sourcil.
– T'en as pas vu ben ben d'ascenseurs dans ta vie toi alors.
– Ah, parce que toi oui? ironisa Raphaël en lui ouvrant la porte.
Il lui fit la révérence et l'aîné lui envoya un baiser.
– La Grande biblio. J't'y amènerai un jour.
Raphaël éclata de rire puis s'arrêta : de loin, il avait aperçu Rosie Desarrio qui buvait à la fontaine. Louis ne put s'empêcher de remarquer une lueur toute nouvelle dans les yeux de son frère. Il lui sourit.
– Désolé, le nerd, mais tu devras y aller seul, seul, seul.
– Seul?! Comment tu oses?!
– Allez, j'te laisse. À plus dans le bus?
– Désolé mais tu devras y aller seul, seul, seul, p'tit cul, répéta Louis avec un rictus.
Puis, après un check, ils partirent chacun de leur côté.
***
– Salut, les belles filles, dit Raphaël en allant rejoindre ses amies aux casiers.
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TU DEVAIS M'EMMENER SUR LA LUNE
Teen FictionÀ presque quinze ans, Raphaël Martin ne se souvient plus du visage de sa mère, à laquelle on le compare pourtant si souvent. De leur sourire jusqu'à leur colère, et malgré des kilomètres les écorchant, ils ne forment au fond qu'une seule et même per...