Anne-Catherine de Montbel était une femme très traditionnelle. C'était elle qui faisait la cuisine et le ménage, et il était hors de question qu'il en soit autrement. Elle veillait, d'un œil aiguisé, à ce que tout soit en ordre: la moindre tâche disparaissait, la moindre poussière était balayée, les vêtements soigneusement rangés, et la vaisselle scintillait. Elle enseignait les bonnes valeurs et les bonnes manières à ses enfants, et s'appliquait toujours à ce que son mari rentre à la maison dans un environnement qu'elle voulait chaleureux, et devant un bon repas chaud préparé avec soin et amour. Tout ceux qui connaissaient Anne Catherine s'accordaient à dire qu'elle était une femme et une mère au foyer parfaite, dans sa grande maison du seizième arrondissement de Paris .
Cependant, ce soir là, sa fille lui avait désobéi en allant à une fête de fin d'année qu'elle lui avait formellement interdit d'approcher. De plus, elle l'avait insulté et avait enfilé une robe des plus vulgaires. Cela faisait quelques temps que Laura-Éloïse de Montbel manquait de respect à sa mère. Elle qui s'était pourtant félicitée de ne pas avoir mis au monde ce genre d'enfant qui se met à fumer et à coucher à droite à gauche en insultant leurs parents au moment où ils se croient suffisamment adultes.
En fait, sa fille avait commencé à se rebeller au moment où elle avait quitté le lycée pour entrer à l'université. Sa mère s'était opposée à ce qu'elle aille à la fac, n'y étant elle-même jamais allé car ce n'était pas là la place d'une bonne femme de maison, elle n'en voyait pas l'intérêt. Mais Laura aimait les études et avait insisté pour commencer une licence de lettre, et c'était son père qui avait accepté, affirmant que les femmes d'aujourd'hui avec de la culture étaient aujourd'hui une tendance et que sa mère arrivait très bien pour l'instant à tenir la maison toute seule. Anne-Catherine avait donc capitulé, essayant tant bien que mal d'accepter cette situation qu'elle trouvait des plus ridicules.
«Mais enfin elle va perdre son temps là-bas! À quoi est-ce que ça va lui servir plus tard? avait-elle dit à son mari.
–Écoute, si Laura veut continuer ses études, qu'elle continue ses études, de plus en plus de femmes font ça, et c'est très bien vu.
–Oui, enfin c'est pas ça qui va l'aider à s'occuper d'une maison et à faire tourner une famille! Et si elle trouve un garçon là-bas? On peut pas la surveiller, et on ne peut pas compter sur les profs d'Universités! Ils pourraient très bien se toucher en plein amphithéâtre qu'ils ne lèveraient pas les yeux sur eux!»
Son mari vit de l'angoisse dans ses yeux et la prit dans ses bras.
«Écoute, je pense qu'on peut avoir confiance en elle, c'est une grande fille maintenant et tu l'as très bien éduqué, alors arrête de t'affoler pour rien. Ce sera une femme intelligente et épanouie, et elle est jeune, tu voudrais quand même pas qu'elle reste ici toute la journée à faire le ménage et la cuisine...»
Il l'embrassa, et partit continuer la lecture de son journal, laissant sa femme seule face à son reflet dans le petit miroir qui était accroché au mur devant elle, où elle pouvait contemplé son tablier tâché d'huile sur le côté, lui rappelant qu'elle n'allait pas tarder à devoir sortir le poulet du four.
Oui, Anne-Catherine de Montbel était furieuse contre sa fille et jugeait son comportement inadmissible comme un affront qu'elle se devait de réparer. C'est pour cela que ce soir là, avec son chignon très serré et sa jupe droite, elle l'attendait devant le grand escalier face à la porte d'entrée. Un peu plus tôt dans la soirée, après avoir bien réfléchi, elle avait posé deux grandes valises sur le lit de Laura qu'elle avait rempli de tous ses vêtements – préalablement pliés – de ses accessoires et de ses livres, puis les avaient refermé, avant de les déposer devant les escaliers, et après avoir refait le lit.
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La Femme du PDG
HorrorIls semblaient former un couple idéal, heureux et riche. C'est pour cela qu'il semble aussi incompréhensible que Laura Girond, épouse du PDG Marc Girond, ait décidé en ce beau Mardi matin d'Avril, de prendre son mari en otage dans son propre bureau...