3 . D'une vodka-pomme et de la Route Arc-en-Ciel

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On entendait la musique depuis la rue. Le bitume était encore mouillé de la pluie de l'après-midi. La fête commençait déjà à battre son plein alors que nous n'étions même pas arrivés. Quelle audace... Nos amis étaient passés nous chercher aux alentours de vingt heures dix, et j'avais à peine eu le temps de me coiffer. Mon reflet dans le miroir avant de partir de chez moi m'avait satisfait, mais, avec le vent, si j'avais dû passer devant une vitrine à cet instant, j'aurais très certainement eu pitié de moi-même.

Sérieusement, si j'avais été le seul décisionnaire de cette histoire, je serais resté au fond de mon lit à regarder un sitcom débile et à me marrer comme une baleine au lieu de sortir danser. J'étais mort de fatigue, et la rencontre avec cet homme traînait encore dans ma tête. Je n'arrivais tout simplement pas à le sortir de mes pensées.

Mais je ne pouvais pas abandonner Maëlle, surtout avec la situation délicate dans laquelle elle se trouvait. Elle était nerveuse à l'idée de voir Jules, car ils ne s'étaient pas vraiment revus dans de telles conditions après qu'ils aient couché ensemble (sauf à la manif, mais ils ne s'étaient adressés que quelques mots). 

- Ca va ? T'as l'air ailleurs... a dit Maëlle, ce qui a interrompu mon flot de pensées qui se baladait encore vers la maison Laurent. 

- Hein ? dis-je, surpris. Non, rien, je pensais à un truc... Par contre toi, ça va pas trop, ai-je continué avec un sourire.

Nous arrivions en bas de l'immeuble, et elle a soupiré :

- Je sais pas quoi faire, Jungkook... Il est vraiment adorable, gentil, drôle, intelligent...

- Plutôt pas mal, ai-je rajouté en lui faisant un clin d'oeil.

Elle a rougi en riant doucement :

- Oui, aussi, c'est vrai... Enfin c'est pas le plus beau mec que j'ai vu dans ma vie non plus quoi, genre, toi t'es plus beau, et même Thibault.

- Ouais, mais moi je suis ton frère donc c'est glauque et Thibault a déjà une copine.

- Je parlais juste de physique, espèce d'abruti, s'est-elle outrée en me donnant un coup de poing sur le bras. Objectivement. Pas d'attirance ou quoique ce soit d'autre, t'es vraiment trop con...

J'ai ri face à cette fausse colère qu'elle piquait, elle était de toute manière physiquement incapable de me faire la tête plus de dix minutes d'affilée. 

Alors que nous montions les escaliers qui menaient au cinquième étage de l'immeuble, la musique et le bruit s'intensifiaient, et le son parvenait à mes tympas de plus en plus distinctement. Amanda, qui était juste derrière moi, a dit :

- Ils sont au moins cinquante là-dedans... OK, l'appart' de Jules est grand mais là, on va se marcher dessus.

Dire qu'on était une cinquantaine n'était pas un euphémisme. L'appartement grouillait de silhouettes inconnues, ou que j'avais simplement croisées dans les bâtiments de la fac.

- On va déposer les bouteilles et on se retrouve dans la chambre de Jules, a crié Thibault, pour couvrir le brouhaha.

On a tous acquiescé en hochant la tête et on est passé à travers le champ de bataille. J'ai perdu Maëlle dans le trente-cinq mètres carrés beaucoup trop bondé, et, en me retournant pour la chercher du regard, je suis tombé nez-à-nez avec Jules. 

- Kookie !, a-t-il crié. T'es tout seul ? dit-il avec un air étonné.

Je me suis approché de son oreille et j'ai essayé de parler distinctement pour qu'il comprenne ce que je voulais dire :

Cure Me ~ [taegguk]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant