Chapitre six : gros nounours

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— Allô Sofia ? ... Je te dérange pas trop ?

J'entendais un juron rauque à l'autre bout du fil, ce qui me fit lever le poignet pour regarder l'heure sur ma montre : 7 heures 05. Effectivement... C'est peut-être un peu tôt pour appeler un ami un Dimanche matin... Bon, je crois elle n'a pas vraiment envie de me parler. Mais on va faire comme si je n'avais pas compris.

— T'as vu l'heure ?! Elle râlait, T'as intérêt à m'avoir réveillé pour une bonne raison sinon lundi j'te...

— C'est pour une bonne raison t'inquiète... !

Sofia, fan invétérée du sommeil. Oui, je sais, comme Suga.

   — ... Tu ne veux vraiment pas m'écouter... ? Je rajoutais en adoptant exprès une voix exagérément timide et incertaine, J'ai absolument besoin de ton aide en fait !

   Il eu un temps. Puis je l'entendais soupirer bruyamment. Le genre de soupir qu'on fait lorsque ça nous fait clairement chier de faire quelque-chose, mais qu'on fait quand même. Parce-qu'on est des gens gentil.

   Même si Sofia avait (encore) lâché ce soupir agacé qui la caractérisait si bien, je savais qu'elle allait se toute manière accepter de m'écouter. C'était Sofia. Je la connaissais. Au premiers abords, avec son look de garçon manqué, son visage jamais très expressif, et sa façon si franche de parler, elle semblait posséder une personnalité distante, hautaine, voir pimbêche. Mais au fond, moi et tous les autres dans le groupe, on savait que c'était en réalité un gros nounours qui n'assumait pas son rôle de gros nounours. (Mais on ne lui disait pas, car de toute façon elle le nierait en nous crachant au visage). Elle était toujours à notre écoute lorsqu'on avait un problème, quel qu'il soit, et ce, 24 heures sur 24. Et même si elle essayait au maximum de ne pas montrer le pourtant grand intérêt qu'elle portait à nos problèmes, on pouvait être sûrs et certains qu'elle nous soutiendrait et aiderait jusqu'à la résolution. En fait, Sofia c'est un peu une « Tsundere » dans les mangas... Si vous voyez ce que je veux dire, les otakus.

   — ... Qu'est-ce qu'il s'est passé encore ? Elle lançait avec une légère désinvolture dans la voix.

   Un fin sourire se dessinait sur mon visage, lorsqu'inconsciemment, elle confirmait mes dires. Je baissais les yeux vers le potentiel ticket de fansign, et inspirais profondément avant de me lancer :

   — ... Hier, je suis allée acheter à la Fnac le dernier album des BTS.

   — Tear. Elle complétait, ... C'est ça ?

   J'hochais d'abord la tête, en réponse à sa question, puis me rendais compte qu'on était en train de se téléphoner, et qu'elle ne pouvait donc pas me voir :

   — Oui... C'est celui-là.

   Qu'elle sache de quel album je parle, ça ne m'étonnais pas du tout. Si j'ai décidé d'appeler Sofia et pas un autre, c'est bien parce-qu'il y a une raison : Sofia est coréenne. Enfin, franco-coréenne. Son père est coréen, sa mère française. Avant que je ne la connaisse, elle vivait comme moi, à Paris. Mais à 12 ans, elle et sa petite sœur se sont vues contraintes d'aller vivre quelques années en Corée, chez leurs grands-parents, à cause du travail très mobile de leurs parents journalistes, qui ne pouvaient donc pas les garder. Alors, même si ça ne la passionnait pas vraiment, ces quelques années en Corée et sa petite sœur obsédée de k-pop on fait qu'elle était assez calée quant à la culture coréenne. Bien plus que moi, qui voue pourtant un véritable culte à ce pays.

   — Qu'est-ce qu'il y a... Ils n'ont pas assez ouvert leur chemises sur les photos ?

   Je pouvais presque entendre son sourire moqueur. Sa remarque me fit lever les yeux au ciel :

Park JiminOù les histoires vivent. Découvrez maintenant