Chapitre 3. L'entretien

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Ariane ne savait pas où chercher. A qui devait-elle se renseigner ? En temps normal, elle aurait téléphoné à sa mère. Mais depuis quelques semaines leurs relations s’étaient refroidies. Elle se mêlait toujours de ses affaires et ne respectait pas sa vie privée. C’est pour cela qu’elle avait pris son indépendance. Elle décida de compulser les pages jaunes de l’annuaire. Elle trouva des numéros d’assistantes maternelles. Elles devaient pouvoir la renseigner. Elle composa le numéro et demanda les renseignements dont elle avait besoin.
Après avoir reposé le combiné, Ariane réfléchit à ce que la dame, à qui elle avait parlé, lui avait dit. Elle estima que 15 € pour une professionnelle était certainement raisonnable, mais que pour elle qui n’avait pas d’expérience, 10 €  serait suffisant. Elle était maintenant fixée sur le salaire. Elle attendrait sa proposition, mais n’accepterait pas de descendre en dessous. Il n’avait donné aucun renseignement sur l'âge de sa fille. Elle ne devait pas être bien vieille pour parler encore d’elle comme d’un bébé. Elle rechercha dans ses livres ce qu’elle avait appris sur les méthodes pour soigner les enfants. Il fallait qu’elle se les remette en mémoire pour ne pas paniquer. " Voyons voir, se dit-elle, si l’enfant a de la température…".
La journée passa très vite et bientôt, l’heure de partir sonna. Elle se rendit compte qu’elle avait oublié de demander l’adresse. Elle rechercha sur Internet  avec le numéro et obtint son renseignement :
                           Mac Morgan
                     18 bis, rue de l’aigle.
                                                                                               C’était complètement à l’autre bout de la ville. Elle en aurait au moins pour trois quarts d’heure à pied. A cette heure-ci, il n’y avait plus de bus qui passait. " J’espère que les horaires coïncideront avec ceux des bus, se dit-elle, parce que, si je dois y aller à pied, je ne sais pas à quelle heure je vais devoir me lever." Elle se mit en route sans perdre un instant. " Arriver un peu en avance faisait toujours bonne impression.
En arrivant dans la rue, elle observa les différentes maisons. C’était un quartier assez chic. Il y avait un parc juste à côté où elle pourrait aller se promener avec la petite les jours ensoleillés. Elle sonna à la porte avec cinq minutes d’avance.
 
 
_          « Bonjour monsieur Morgan.
_          Bonjour mademoiselle.
_          Je m’appelle Ariane Shell, nous avons rendez-vous pour l’emploi de nourrice.
_          Entrez. Il me semble que je ne vous avais pas donné mon adresse.
_          En effet, je l’ai cherchée sur Internet .
_          Asseyez-vous."
 
Tout en la faisant entrer, il l’observait. Elle était plutôt jolie mais paraissait bien jeune. " Une chose est certaine, se dit-il, elle est plus dégourdie que les autres." A toutes, il avait fait le coup de l’adresse. Certaines avaient téléphoné de nouveau, d’autres étaient arrivées avec une heure de retard après s’être perdues malgré une carte, d’autres encore n’étaient tout simplement pas venues au rendez-vous. Elle semblait connaître et être capable de se débrouiller seule. C’était un atout. Ses études d’infirmière lui en donnaient un deuxième mais le principal pour lui était de savoir si elle aimait les enfants et si Lily allait l’accepter.
 
-      " Pardonnez mon indiscrétion, dit-il, mais vous avez quel âge ?
-        J’ai vingt-deux ans.
-          Vous paraissez moins.
-          Oui on me le dit souvent, mais je peux vous montrer ma carte d’identité si vous voulez.
_          Non ce ne sera pas nécessaire."
 
Elle ne s’était pas aperçue qu’une femme l’observait de la cuisine. Soudain le bébé pleura. Ils se levèrent en même temps.
 
_          " Vous permettez ? Lui dit-elle.
_          Allez-y."
 
Elle prit doucement la petite, sous le regard attentif de Mac et la cala sur son épaule en lui murmurant des petits mots doux. " Chut ! ! Tout va bien. Dis moi, qu’est-ce qui t’arrive ?" Mac n’eut pas le temps de répondre que déjà elle avait la solution. " Oh ! Tu es trempée mon poussin, tu as percé."
C’était une enfant magnifique, toute blonde et frisée, avec de grands yeux verts. " Où puis-je la changer ?
_          Dans la salle de bain. Venez, je vais vous montrer."
Elle le suivit et découvrit une pièce très spacieuse et tout le nécessaire pour langer Lily. Elle l’installa sur la table à langer et commença à la déshabiller.
_          " Pouvez-vous m’apporter un nouveau body, s’il vous plaît ?
_          Oui, bien sûr.
_          Dites-moi, à quelle heure lui faites-vous prendre son bain ?
_          Vingt heures, pourquoi ?
_          Si cela avait été maintenant, ça n’aurait pas été la peine que je la change. Mais puisqu’elle doit encore attendre un peu, je vais la changer pour qu’elle se sente mieux.
Il l’observa attentivement. Elle se débrouillait plutôt bien. Elle était douce et Lily avait l’air de l’apprécier. Ils revinrent dans le salon et continuèrent l’entretien. Ariane avait gardé Lily sur elle et s’amusait avec elle tout en discutant. Lors des autres entretiens, Lily n’était pas restée sur les femmes qui étaient venues, elle descendait de leurs genoux et rejoignait son père maladroitement, encore un peu instable dans cette nouvelle discipline de la marche.  Il commençait à se détendre, sentant qu’elle ne lui ferait aucun mal. Lily avait l’air d’avoir confiance, pourtant, depuis la mort de sa mère, elle n’avait accepté que le contact de sa grand-mère. Son odeur familière la rassurait certainement et c’était la première fois qu’elle allait dans les bras d’une autre femme sans pleurer. Ils parlèrent des horaires et du salaire et il dû reconnaître qu’elle s’était préparée avant de venir. Avait-il trouvé enfin celle à qui il confierait sans crainte sa chère petite fille ?

Ariane était sûre d’avoir la place. Le fait que la petite ait pleuré, lui avait permis de faire ses preuves. C’était le  meilleur de tous les certificats qu’elle aurait pu montrer. Heureusement qu’elle s’était préparée à l’entretien. Lorsqu’il lui avait demandé ce qu’elle espérait être payée, sa réponse n’avait pas laissé la place au doute, ni à l’hésitation. “Pas en dessous de dix euros, les professionnels ont un salaire de quinze euros, je n’ai pas autant de compétences qu’elles. Mais si je vais en deçà, je ne pourrais pas faire face financièrement." Sa franchise lui avait plut. Il avait décidé de la prendre à l’essaie. Elle commençait lundi. Comme il était tard, il lui avait proposé de la raccompagner et elle avait accepté. Il lui avait alors présenté sa mère.
Elle le trouvait très sympathique. Il était plutôt bel homme, les cheveux châtain foncés, les yeux marron, il devait avoir une petite trentaine d’années. Elle n’avait pas osé demander où était la maman de Lily, il en parlerait peut-être un jour. Ils avaient eu l’occasion de faire plus ample connaissance le temps de la route. Elle avait expliqué la raison de ses études mais aussi pourquoi elle vivait seule. Elle l’avait prévenu aussi qu’il lui arriverait parfois d’être en retard, non pas par mauvaise volonté mais par difficulté de transport. Il avait acquiescé.
Elle allait passer un week-end tranquille. Pourquoi ne pas prendre des nouvelles de sa mère ?
 
-          " Bonjour maman.
-          Ariane ?
-          Oui maman. Comment vas-tu ?
-          Mieux maintenant. Cela me fait très plaisir de t’entendre. Et toi, comment vas-tu ?
-          Ça va. J’ai trouvé un nouveau travail, je commence lundi.
-          C’est super. Tu ne peux plus travailler au collège ?
-          C’est les vacances d’été maman. Le collège est fermé. Si l’emploi que j’ai trouvé ne me convient pas, je pourrais toujours faire ma demande et y retourner en septembre, mais il me faut un salaire pour payer mes factures.
-          Je suppose que tu ne veux pas que je t’aide ?
-          Maman, ce n’est pas que je ne veux pas que tu m’aides, ce que je ne veux pas c’est que tu prennes des décisions à ma place. Je suis maintenant assez grande pour prendre mes propres décisions. Que tu me conseilles, je suis d’accord. Mais c’est à moi de prendre la décision finale.
-          Oui ma grande, je crois que j’ai compris. Je te promets de ne plus me mêler de tes affaires.
-          Merci maman. Dis moi, tu es là ce week-end ?
-          Oui. Je ne bouge pas. Tu sais ton père n’est pas en très grande forme en ce moment.
-          Je peux venir ?
-          Oui, avec plaisir.
-          Alors à demain maman.
-          A demain ma grande."
 
Elle reposa le téléphone, les larmes aux yeux. Ce n’était pas si compliqué de l’appeler et de mettre les choses au point avec elle. Ariane se sentit soulagée. Elle allait enfin pouvoir reprendre des relations normales avec sa mère.   " Pourvu qu’elle ne cherche pas à me marier avec monsieur Morgan" se dit-elle. Elle alla se coucher après un repas léger, persuadée de faire une bonne nuit.

Recherche nounou désespérément (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant