Chapitre 3

76 15 9
                                    

Ma cuillère se plante dans la génoise, coupant une framboise en deux à son passage, la fille aux cheveux roux qui me fait face détache son regard de moi seulement quand les autres personnes présentes lui parlent. Lorsque ma mère parle je sens que quelque chose ne va pas mais je me tais en attendant leur départ.

La soirée se prolonge, le gâteau disparaît dans les assiettes, les verres se vident progressivement, les étoiles sont déjà bien fixées autour de la Lune et ils sont toujours là. Je jette un œil à ma montre : 22h12. Étant fatigué je décide de débarrasser en leur laissant leurs verres puis de monter me détendre un peu.

Je me jette sur mon lit mais je n'ai pas le temps d'extirper mon téléphone de ma poche que quelqu'un toque à ma porte, je me redresse et m'assois avant de prononcer un "oui", la porte s'ouvre sur Jeanne qui passe juste sa tête, elle me regarde comme une enfant et demande :

- Je peux entrer ?

- Maintenant que tu es là...

Elle entre en souriant et s'assoit sur mon lit. Ses yeux divaguent dans ma chambre mais je ne lui prête aucune attention particulière. Soudain, elle se retourne, me dévisage. Décidé à les ignorer, elle et son comportement de potiche, je reste plongé dans mon bouquin.

Puis j'entends vaguement des bribes de phrases venant du rez-de-chaussée, je place un doigt sur la page et clos le livre puis tends l'oreille, je crois avoir entendue " agence" mais je ne suis pas certain. Pour enfin savoir de quoi ils parlent si secrètement, je prends l'initiative de me faufiler dans le couloir, Jeanne me suit, suspicieuse. Je me retourne et chuchote :

-Pas un bruit.

Elle mime un verrou sur sa bouche et s'accroupit derrière le mur des escaliers, je me cache tant bien que mal entre le mur et l'étagère puis écoute. La Française se trouve face à moi et se retourne fréquemment pour m'interroger du regard, à chaque fois je fronce les sourcils en secouant la tête puis me concentre de nouveau.

Nous avons l'air beaux, cachés ainsi, comme des enfants qui se cachent pour traquer le Père Noël. Sauf que nous traquons des indices, enfin, pour ma part. Tout d'un coup, ils parlent un peu plus fort et je peux écouter plus attentivement :

-Donc, quand pourrions-nous signer les papiers ?

Il me semble que c'est Lise qui parle, puis une voix masculine, David sans doute, prononce :

-Nous espérons que ça se fera rapidement.

-Je vous ai déjà dis que j'hésitais encore... Si Antarès l'apprend il ne me le pardonnera pas.

Apprendre quoi ?

Jeanne me chuchote :

-Mais de quoi ils parlent à la fin ?

-Je n'en sais pas plus que toi visiblement.

Nous reprenons nos positions et je fronce les sourcils sous la concentration :

-Mais enfin Tania, tu sais très bien qu'il peut comprendre. Ce n'est pas si difficile que ça.

-Vous êtes en train de me forcer la main et je n'aime pas ça du tout.

Le ton de ma mère se durcit et étonnamment ça me fait sourire. Nous entendons les chaises racler le sol et nous nous relevons en vitesse, Jeanne frotte ses mains sur son pantalon, quant à moi je commence à descendre les escaliers. Une main entoure délicatement mon poignet alors qu'elle me chuchote :

-Fais comme si de rien n'était.

Je sonde ses yeux verts, puis reprends ma descente, une fois en bas nous découvrons les parents de Jeanne dans le vestibule, sa mère s'exclame :

Lecture ÉphémèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant