Une nuit

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Des couleurs sombres viendraient à naître la lumière. Cette phrase résumait à elle seule la première semaine de Rose au Horse. Doris, qui au fond réprouvait l'instant où elle serait dans l'obligation de la jeter en pâture aux bêtes sauvages, évitait toutes conversations qui heurteraient la morale sociale, pas par puritanisme, mais par peur de la réponse.

Au midi d'un nouveau jour, après que le noir serviteur du temps eut quitté le ciel londonien, Rose s'éveillait. Vêtue d'une simple tunique de coton blanc, elle descendit les marches de marbre froid, pour rejoindre le grand salon. Jones l'accueillit avec un sourire. L'homme à la cicatrice ne lui inspirait que peu de confiance, mais il était serviable et peu enclin à la conversation. Les journaux du matin, déposés en vrac sur la table, titraient sur le renouveau de la marine britannique et ventait l'immense empire sur lequel le soleil ne se couche jamais.

— Dans les villes, la misère est de plus en plus importante et nous faisons toute une page sur des dépenses inutiles ! La reine devient l'icône d'un peuple, en créant un modèle d'amour, sans que nul ne trouve rien à redire, peste soit sur eux !

Cette voix, elle ne la connaissait que trop bien, il s'agissait du fantasque Giacomo Casanova de son vrai nom Taylor Abberline, fils d'un inspecteur en chef de la police de Londres qui ne tarderait pas à connaître un certain succès. Rose ne l'avait pas vu en entrant.

— Des femmes raffolent-elles de votre véhémence et de cette mauvaise humeur qui vous habite dès la première heure du lever ?

Abberline se leva et vint à elle. Lui attrapant la main comme pour la baiser, comme le voudrait la bien-séance, il la plaqua fortement contre son sexe qui devint dur presque d'instinct comme habité par des envies insatiables.

— Voilà ma chère ce que toutes femmes attendent de moi, une dureté sans égal et un bon coup de rein !

Rose retira sa main sans rougir et rétorqua.

— Uniquement celles qui se souillent avec du maquillage ou tout autre artifice destiné à les rendre plus avenantes, les femmes de mon monde ne s'intéressent pas aux petites choses sans importance. Jones à de meilleurs arguments que les vôtres, cher ami !

Taylor se retourna vers le balafré, qui lui démontrait sa certaine vigueur.

— Voulez-vous cesser ces jeux stupides Messieurs ! Dit Doris en entrant dans la pièce.

Elle regarda Taylor, fit une grimace et ajouta.

— Monsieur Abberline chaque matin vous vous présentez à ma porte et chaque matin je vous refuse Rose pour les mêmes raisons que veille ! Veuillez cesser de m'importuner de la sorte ! Jones, veuillez raccompagner notre visiteur !

Le calme revint.

— Nous sommes à l'apogée de la révolution industrielle ainsi que celle de l'Empire et les hommes restent les mêmes avec leurs archaïsmes sociaux stricts. Ils se croient tout permis, car nous enfreignions le soi-disant code de conduite seyant à la femme convenable.

— Que voulait-il négocier auprès de vous sans même me concerter ? Aurais-je tant perdu à être libre que je ne mérite plus le respect dû à chaque être pensant et vivant ?

— Il vous veut vous ! Mais je refuse à lui céder votre...

Doris marqua un silence pesant, Rose termina sa phrase.

— Ma virginité ? Car de toute évidence, il s'agit bien de cela.

— Votre intelligence et votre beauté n'ont rien à faire dans ce lieu de débauche, si seulement vous ne l'étiez plus, tous cesseraient sur-le-champs de nous importuner.

— Doris, ce soir nous en serons délivrées, mon seul souhait par vous.

À la nuit tombée, en attendant les riches clients dans les salons dorés et argentés, le piano et la harpe jouaient sans cesse. Big Ben sonna les dix heures, l'heure à laquelle les premières visites d'amants particuliers ouvrent le bal des réjouissances. Les portes s'ouvraient enfin. Le champagne coulait à flots. Déjà les premiers couples disparaissaient au fond des chambres, déjà les premiers râles de l'érotisme se propageaient dans les couloirs. Doris et Rose toute de blanche lingerie parée, assises sur un divan de velours noir aux fines broderies d'or s'embrassait tendrement. Émoustillant au passage quelques verges masculines bien visibles sous le lin de pantalon à peine fermé. Doris, éprise, serrait dans sa douce main le sein de sa belle courtisane aux cheveux de blé.

La passion contre nature, dévorante, naissait entre ses cuisses, et bientôt elle due passer ses doigts délicats sur ses lèvres, siège de tant de convoitise, espérant soulager cette chaleur qui l'envahissait. Rose se laissait guidée par son amante et découvrait l'amour charnel et son besoin d'animalité. Doris se leva et entraîna à sa suite la douce Rose.

À l'étage, existait une pièce unique, le salon Infernis, où se trouvait un siège d'amour. Cet étrange fauteuil dont le dossier basculait en arrière permettait à la courtisane de s'offrir totalement à son amant, jambes attachées, prête à subir tous les outrages. Rose s'assit sans crainte, sa maîtresse se refusa à lier de soie ses étroites chevilles. Doris laissa glisser ses dentelles laissant apparaître sa peau laiteuse, et dénoua sa longue chevelure. Dans la demie obscurité, à peine troublé par quelques bougies discrètes, son corps se dessinait dans avec ses courbes tendres et voluptueuses. Ses seins, gros et fermes, le galbe de ses hanches, tout en elle n'était que désirable pour plus d'un homme.

Elle s'approcha de son amante et s'accroupit. Lui écartant délicatement les jambes, elle embrassa l'intérieur de ses cuisses, se rapprochant de l'instant ou ses baisers et sa langue rentrerait en contact avec le fruit défendu. Rose sentit sa poitrine se tendre au premier contact, suivit d'un profond désir. Un frisson la gagna et remonta de ses reins à sa nuque. Le va-et-vient de la langue lui arrachait de profond soupir. Doris se redressa, la laissant se tordre de plaisir. Elle se dirigea vers une petite commode, fouilla rapidement dans un tiroir pour en tirer un bel objet taillé dans le plus bel ivoire. Elle l'apporta à sa douce pour le lui présenter.

Nulles paroles ne furent échangées, Rose comprenait la vocation de cette sculpture faite à l'image de ce sexe que les hommes tenaient en si grande estime. Délicatement Doris le proposa entre ses lèvres lui arrachant toujours plus de soupir, qui se transformèrent en une suite de gémissement. Plus elle se tordait plus sa maîtresse accentuait le geste. Sans bestialité propre au masculin elle connut son premier amour.

Hell Fire ClubOù les histoires vivent. Découvrez maintenant