Les Étoiles Avaient Raison

L'évacuation

"Évacuation généra...le, je ré..bzzp...ète. Évacuation généra...rhj...le. Le sud de l'Europe doit être totalement évacué."

Le message passait en boucle, de plus en plus interrompu par de nombreuses interférences. En 3 heures, la majorité de la population des villes et des campagnes avait rejoint le nord et l'est. Tous les transports avaient été mis en place pour évacuer la zone. Seuls quelques individus n'avaient pas pu fuir, à cause de leur isolement, ou du manque de place dans les trains, les avions et les bus. La panique générale avait fait quelques victimes. Le bilan aurait pu être bien plus lourd pour cette journée de début de guerre.
Le sort avait fait qu'Aglae et Lison n'avaient même pas eu le temps de réaliser ce qu'il se passait. Elles ignoraient tout de la situation.
Les cendres planaient dans l'air tiède, les arbres se taisaient, eux aussi avant baissé les bras.
L'atmosphère sombre ne permettait pas de voir à deux mètres de distance. De toute manière, il n'y avait plus rien à voir, sinon une esquisse de champs de bataille.
"Aggie... marmonait une voix faible, issue de nulle part. Aggie... Tu es où ?"

Le silence.

Lison se redressa difficilement et fit la tentative peu fructueuse de se redresser en une fois.
Tout son corps la faisait souffrir, chaque pore de sa peau, chaque membre, chacun de ses cheveux était douloureux. Elle se pencha en avant et vomit le peu que son estomac contenait.

"Li'..."
Une main se posa sur l'épaule de l'interppelée qui sursauta, puis se calma en identifiant la propriétaire de ces doigts fins.

Aglaé aida son amie à se lever. Puis elles observèrent toutes deux le ciel. Ou du moins, ce qu'il en restait.

"Bah merde...
-Aggie...
-Ah c'est la fin du monde j'ai le droit de mal parler quand même !
-Mais..."
Lison retint difficilement un fou rire nerveux qui la saisit rapidement.
Du accord commun, elles se mirent lestement en chemin.

~~~~

En quelques jours à peine, Aaron ne s'était pas fait prier. Persuadé que son meilleur ami était parti loin de cet enfer, le beau brun avait consacré des journées entières à faire ce qu'il avait toujours aimé faire.
Fumer.
Boire.
Jouer.
Se payer les services de quelques femmes assez désespérées pour lui demander protection.
Il était fort, et savait se battre, savait jouer de ses charmes pour obtenir tout ce qu'il voulait. La jungle ne lui faisait pas peur, il en était le roi. Tuer ? Un jeu d'enfant.

"Aaron...
-Tu as faim ma belle ?"

La belle blonde se mordit les lèvres en assassinant du regard le jeune homme. Il ne se fit pas prier et l'embrassa lentement, avec cette tendresse vulgaire et violente dont lui seul était capable.

"On m'a dit que tu savais des choses que d'autres ne savaient pas ..." Souffla-t-elle alors qu'il lui dévorait le cou. Il cessa presque immédiatement.

Il avait vu beaucoup de personnes désespérées dans ces rues en ruines, quelques jeune filles assez perdues pour lui demander de l'aide, parfois un ou deux enfants égarés, et des hommes, qui ne lui avaient pour l'instant posé aucun problème.
Mais jamais quelqu'un ne lui avait demandé des informations sur quoique ce soit.

Ces humains étaient trop effrayés, relégués au rang d'animaux, pour se poser des questions.

Et cette fille-là usait de ses charmes dans l'espoir de comprendre ce qu'il s'était passé.

"Alors on t'a mal dit.
-J'en doute fortement.
-Pardon ?"

Elle releva légèrement le menton et lui fit pleinement face, avant de dégainer un badge poussiéreux attestant de son intégration au sein de l'armée.

"Et je n'étais pas soldate.
-Tu as cru que tu me faisais peur avec ce bout de ferraille ? Plus personne ne fait respecter les lois ici, articula-t-il avec une haine réprimée.
-Ça t'arrange bien hein ?
-Oui."

Il haussa un sourcil, menaçant, il ne se laisserait pas impressionner par ce petit bout de femme sorti de nulle part.
Comme unique réponse, elle lui fit une clef de bras qui l'imobilisa contre le mur auquel il était jusqu'alors adossé.

"Maintenant tu vas me parler... Susura-t-elle à son oreille.
-Vous parler de quoi ? Du beau temps ? Ironisa-t-il.
-Moque toi de moi c'est ça..."

Un bruit sourd retentit dans les oreilles d'Aaron et la belle inconnue s'écroula au sol.

"Andrew..."

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Paul nouait ses lacets et Caroline le regardait faire, silencieuse. Ils n'avaient pas échangé un mot depuis plusieurs heures et la tension devenait palpable.
Peu à peu l'un et l'autre réalisait que leurs chances de survie à long terme s'amenuisaient.

"On va faire quoi ? Lâcha-t-elle finalement.
-On va se battre.
-Contre qui ?... Contre quoi ?
-On ne va pas se battre contre quelque chose, on va se battre pour survivre, Caroline..."

Il s'était relevé et avancé vers elle, avait replacé une mèche de cheveux derrière son oreille.

"Ma sœur me manque, Paulo.
-Elle me manque aussi... Fabuleuse performance nuptiale, la taquina-t-il.
-Elle a dix ans, rit-elle.
-J'ai dû la confondre avec ta mère."

L'atmosphère se faisait plus légère tandis que Paul lui caressait doucement la joue, rassurant. Il était de ceux dont la présence suffisait pour apaiser les âmes et les esprits. Son sourire était angélique, doux par nature.

Elle ferma les yeux quelques secondes et une explosion retentit à nouveau, la terre entière sembla être détruite.

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"Lison, tu nous emmène où ?
-T'en fais pas, Aggie, on n'en aura pas pour longtemps..."

Tandis que Lison semblait confiante et déterminée, son amie qui l'a suivait depuis plusieurs jours s'inquiéta de la direction qu'elles prenaient... Était-ce raisonnable d'aller vers le centre ville ? Elle avait déjà dû se battre pour un morceau de pain en périphérie... Qu'en serait-il au centre ?

Elle vit alors apparaître des ruines de ce qui semblait être des immeubles, autrefois dressés contre le vent, contre le temps. Certains n'avaient pas résisté aux bombardements.

Aux alentours de la ville, une odeurs nauséabonde de souffre régnait, elles entraient en enfer, consciemment et sans réfléchir.

Elles marchèrent encore quelques heures avant de s'arrêter devant un immeuble, qui semblait tenir debout par son unique volonté, certains étages paraissaient écroulés en son intérieur, et son équilibre était douteux.

Lison fit le premier pas et pénétra dans le bâtiment d'un pas assuré, qu'elle ne partageait pas avec Aglaé. Cette dernière resta en retrait avant de la suivre malgré elle, en ronchonant et trébuchant sur les débris métalliques.

Elle montèrent plusieurs étages et Lison s'arrêta devant une porte, ne prit pas la peine de toquer et rentra dans l'appartement. Son amie resta sur ses gardes et sursauta en voyant une belle blonde ligotée au sol du salon. Ses soupçons se confirmèrent.

"Endroit glauque, blonde sexy attachée au sol, nul doute n'existe. Nous sommes chez Aaron."