Elle.

3.

« - Elle ? Elle où vas-tu exactement ? Je la regarde, incrédule. T'as quand même pas oublié qu'on devait aller aux clubs pour organiser le bal de rentrée. Bon ok j'avais un peu mis cette information de côté. T'es pas croyable ! Elle commence à marcher sans se retourner pour vérifier que je la suivais. Comme l'a dit la directrice, dans cette école le moyen n'est pas acceptable, heureusement être extraordinaire ne te sera pas non plus demandé. Sympa. Pour l'instant, tu seras mon assistante. Mes yeux et mes oreilles quand je ne peux pas. Tu ne prends pas de notes Elle se retourne pour me toiser. C'est bien ce que je pensais, j'ai eu la bonne idée de te prendre un carnet pour que tu puises noter ce que je dis et d'autres choses importantes. Tiens. Elle me tend un carnet rose bonbon avec de petits pompons sur la couverture. Hum. Allez, dépêche-toi, on va être en retard. Dis-moi juste un truc, est-ce que tu as ton permis ? Je réponds par la négative, je n'ai que dix sept ans, et même si j'ai mon code, j'ai pas encore passé la conduite. Gia conduit vraiment mal et moi je ne préfère pas. Même si tu vas devoir passer l'épreuve, ça devrait le faire, enfin j'espère. »

Ça risque d'être une journée affreusement longue. Je ne sais pas si je vais supporter son petit air condescendant encore très longtemps.

Elle m'emmène dans une salle, une dizaine de personnes y sont déjà, parmi les visages je reconnais celui de Luc, qui trône en bout de la table centrale, puis celui souriant de Mary qui est à sa gauche. Quand on arrive dans la pièce tout le monde s'installe sans un bruit, Ana exerce une autorité naturelle sur les autres, c'est indéniable, voir un peu effrayant. Cette dernière part s'asseoir aux côtés de Luc. Je me rends vite compte que personne ne doit se mettre à l'autre extrémité et que toutes les autres places autour de la table sont prises. Une chaise libre en renfoncement n'attend donc que moi. A ses côtés, sa jumelle est prise par le prince. Il me sourit de toutes ses dents. J'ai déjà dit que son sourire me faisait craquer ? Et donc, c'est parti pour une heure et demie de prise de note intensive sur le sujet du thème du bal. Clairement, deux clans se font face, d'un côté Lucifer soutient l'idée d'une thématique liée aux système solaire, avec une bonne moitié des élèves derrière lui et de l'autre Mary veut un bal qui rime avec conte de fée. Au sens propre, elle désire s'inspirer des films Disney mais en les revisitant.

Comment dire que c'est quand même plus alléchant que celui où l'on doit être déguisé en planète.
Je pense que ma gentille demi-sœur a le même raisonnement que moi car je la vois se pincer l'arête du nez lorsque Luc défend son idée. Lorsque les débats commencent à être un peu trop houleux, Ana lève les bras et tout le monde se tait.

« - De toute évidence, nous avons besoin d'un vote pour départager les deux thématiques. Ceux qui sont pour l'idée de Mary, à savoir un bal avec comme thème Disney. Mary lève haut la main et tout le monde attend, ce n'est que lorsque la vice – présidente imite la jeune fille que les trois quarts des élèves suivent le mouvement. Luc fait littéralement rouler ses yeux dans ses orbites devant le sourire triomphant des deux jeunes filles. Et pour l'idée de Lucifer ? seul quelques personnes osent voter. Voilà qui est clos. A la semaine prochaine. »

Elle se lève comme pour appuyer son propos et tous commencent à ranger leurs affaires. Cette fille est effrayante d'autorité. Je la vois zyeuter sur le prince avant de flirter ouvertement avec son président.

« - Ella ? je me retourne vers la charmante voix. Je me demandais si tu avais des pré disposition pour un art en particulier, devant mon incompréhension il rajoute, tu sais, j'avais dit à la directrice que je t'aiderais pour les courts d'arts. J'ai bien compris que tu dessinais, mais est-ce que tu chantes, danse, sculpte, fais un sport en particulier ou même fais de la couture ? Tu dois t'inscrire à au moins un de ses cours. T'as une idée précise ou est-ce que tu préfères tous les tester ?

- C'est bien de tester plusieurs choses, non ?

- Parfaitement d'accord. Donne-moi ton téléphone. Il sourit devant mon regard suspicieux. Pour que je te note mon numéro pour te donner rendez-vous pour aller au cours demain. Je partage son sourire et lui donne mon téléphone déverrouillé. Je ne sais pas pourquoi mais je sens qu'on va super bien s'entendre et qu'on va être de bons amis. »

Bons amis ? Amis ? D'accord, ça c'est un coup dur, mais je continue de garder une expression de joie, je me dis que ce n'est pas grave. J'entends Anastasie m'appeler et son regard noir m'indique que je dois me dépêcher. Je dis au revoir au prince et suis la jeune fille. Je déverrouille et vois qu'il s'est envoyé un message de mon téléphone. Je pouffe devant la bêtise de celui-ci :« Message de la petite reb.ELLE de nouvelle à l'éb.LOUIS.sant prince. » Je sens le regard de la grande perche à mes côtés et ferme mon téléphone. On rejoint Gia devant la voiture, elle me sourit et on s'installe. Moi devant et Ana à l'arrière, elle entame une conversation avec moi.

« - Vous avez l'air de bien vous entendre avec Louis. Elle émet un sourire moqueur avant de continuer. Il a toujours eu une âme généreuse, toujours prête à aider les cas... désespéré. »

Sympa.

Le reste du trajet se passe bien, enfin, personne ne parle surtout. Lorsque je passe la porte, une vision d'horreur m'accable. Mes croquis sont par terre, certains de mes patrons sont jetés partout dans le salon et une de mes robes fétiche trône entre les mains de ma marâtre.

« - Qu'est-ce que... ? Vous avez fouillé dans mes affaires ?

- Bien sûr, je me devais de vérifier si tu ne cachais pas je ne sais quelle drogue venue de... France. Elle dit ce mot avec tant de condescendance que j'ai presque l'impression que c'est une insulte. Mais ce que j'ai trouvé est tellement plus intéressant. C'est clair que tu manques de style, rien n'est très élaborés, chic ou tendance. Comment ose-t-elle me lancer ça au visage comme si de rien n'était. C'est mes créations, mes bébés ! J'allais me défendre mais elle continue de parler. Mais ça n'en reste pas moins intéressant, je me demande encore comment ses créations peuvent sortir de ton imaginaire à toi mais passons. Tu le sais, dans ce pays, c'est ma fille et moi qui créons les tendances, enfin moi je crée les vêtements et Ana tient son blog ou elle influence jeunes et vieux. Et toi, jeune fille, tu vas faire partie de cette entreprise. Tu vas travailler pour moi.

- Et si je ne veux pas ? je réplique sans vraiment réfléchir.

- Petite insolente, tu vis sous mon toit je te rappelle, tu n'as pas vraiment le choix à vrai dire ! Tu devrais remettre tes idées au clair et savoir où est ta place ici. Elle me gifle pour appuyer son propos. Monte dans ta chambre et range ce bazar avant d'aller dormir. »

Ça peut paraître bête mais c'était la première fois qu'on levait vraiment la main sur moi, je n'ai pas de fratrie et ma mère considérait le dialogue comme le Messi de la résolution de problème. Alors cette gifle a vraiment été violente pour moi. Je vais directement dans ma chambre et devant son état, je ne peux m'empêche de lâcher un sanglot. Elle avait tout saccagé. J'espère au moins que quand je raconterai ça à mon géniteur, il prendra mon parti.

Il est aux alentours de vingt et une heure lorsque je fini de ranger ma chambre. Je regarde mon téléphone, deux appels manqués et trois messages, tous de Louis. Étrange.

1er message :

« - Demain rdv 12H30 devant l'auditorium pour le cours de dessins, sois à l'heure ma petite reb.ELLE »

Je souris, il est bête avec ce surnom.

2ème :

« - Oh mon Dieu, Elle, j'ai appris la nouvelle ça va ? »

Quelle nouvelle exactement ?

3ème :

« - Elle, si t'as besoin de parler, n'hésite pas à m'appeler et si tu ne viens pas demain je comprendrai »

Mais de quoi parle-t-il nom de Dieu.

Je descends au salon et trouve une note sur la table

« Ton père a eu un accident de voiture, il est dans le coma, nous sommes allés le voir à l'hôpital. »

Je. Rêve.