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          ;Lorsque le vieux bus à la vielle peinture écailleuse s'arrête d'un crissement de pneus sur le côté de la route aux bords défoncés, la première chose qui me vient à l'esprit est celle-ci: J'ai une incontestable envie de rentrer chez moi. Sans blague. Qu'est-ce que je fiche ici? L'air est plus frais que je ne l'aurais pensé et surtout, l'odeur fétide des gigantesques excréments de vache me fouette littéralement les narines à l'instant où la porte métallique du transport s'est ouverte sur moi.

De leurs rotations douteuses, les roulettes de mes deux grosses valises semblent me narguer en faisant en sorte de me compliquer la vie.

Putain fait chier!

Je prends brusquement mon téléphone portable qui est impeccablement enfouit dans la poche arrière de mon jeans et consulte l'heure ainsi que mes notifications. Mes yeux glissent avec horreur sur la barre de réseau qui indique qu'aucune connexion n'est disponible.

Je me demande comment les gens d'ici peuvent vivre sans internet. Je parie qu'ils se chauffent au bois et qu'ils s'éclairent à la bougie! J'ai l'impression de revenir au temps des dinosaures et quand je vois l'étrange tracteur qui roule en ma direction, je ne peux pas m'empêcher de lever les yeux au ciel.

Non seulement je suis dans le trou du cul du monde mais en plus je dois vivre comme au moyen-âge.

Je soupire en reconnaissant le crâne chauve et les yeux globuleux de mon oncle. Son gros ventre bedonnant et sa salopette bleue me donnent envie de pleurer. De la fumé noire s'échappe du pot d'échappement de son tracteur et il semble caler pile poile lorsqu'il arrive à ma hauteur.

«Hoseok ! Ça faisait longtemps !»

Sa voix rouillée m'indique qu'il a clairement prit de l'âge. J'ose un petit sourire gêné malgré tout. Après tout, je ne le connais pas assez bien, qu'il soit le frère de mon père ou pas.

«Ton père m'a dit que tu allais passer les vacances à la ferme mais je n'aurais pas imaginé de si tôt !

- Apparemment il voulait que je dégage le planché... dis-je en repensant à son ultimatum.»

Bien évidemment, je ne suis absolument pas ici par choix mais plutôt pas obligation de mon vieux. C'était plutôt du chantage.

«Tu es devenu un beau jeune homme, depuis combien de temps nous ne nous sommes pas vus? Quatre ans ?

-Dix ans. Je le rectifie sans ménagement. Ça fait dix ans.

-Le temps passe vite ! Avec le pâturage, les bêtes ne me laissent aucun répit! Je suis heureux d'avoir une main d'œuvre en plus !

-Une main-d'oeuvre? Je répète, pas sûr de comprendre.»

Ses épais sourcils noirs forment des accents circonflexes et il semble amusé.

«Oui, une main-d'oeuvre. Tu ne pensais quand même pas que tu allais être là à te tourner les pouces alors que ton pauvre oncle doit s'occuper de la ferme et des champs?»

À vrai dire, c'est pas mon problème.

«Disons que les animaux, la basse-cour et les travaux manuels...c'est pas ma tasse de thé ?

-Tu es doué en quoi? Demande-t-il en riant.»

Il prend fermement mes valises et les pose comme par magie sur l'engin de fortune avant de m'y faire monter. Quand il redémarre, je suis obligé de parler fort pour qu'il puisse entendre:

«L'informatique, je suis plus calé sur l'informatique et la nouvelle technologie. Dis-je fièrement.

-Ça nous fait une belle jambe! Un sourire malicieux orne son visage. Tu vas devoir un peu t'adapter mais tu vas avoir un super coach.»

Sᴜᴍᴍᴇʀᴛɪᴍᴇ ༄SOPEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant