Je suis en couple depuis bientôt cinq ans avec un homme de dix ans mon aîné qui a toujours mit mes maladresses sur le compte de l'âge. Quand je l'ai rencontré j'étais une étudiante effacée vivant encore chez ses parents. C'était normal pour lui que je ne sois pas habituée à entretenir une maison et que je sois très susceptible. Mais il a du très vite admettre que j'étais une fille fragile, que mon moral était un fragile réceptacle en porcelaine pouvant se fissurer à la moindre contrariété. Une promesse non tenue, et je perdais toute confiance en mon interlocuteur. Après quoi je me morfondais sur moi-même en me convainquant que j'étais une sous-merde ne méritant la sympathie des autres. J'étais même la première à me détester amèrement
Le soir je me lovais contre lui en me persuadant que je ne méritais pas son amour, pleurant à grosses larmes sur son pyjama pour évacuer toutes mes idées noires. Pour lui, ça ne pouvait qu'être passager. Il fut déjà rassuré que grâce à un psychiatre mon moral aille mieux. En apparence je cessais d'être larmoyante pour des banalités pour lesquelles je portais beaucoup trop de poids, mais je restais triste. Beaucoup de connaissances se sont lassées de mes crises et m'ont laissé pleurer mon sort dans mon coin sans songer à s'inquiéter de mon état quand je revenais. Mais des gens ont su réagir d'une manière que je n'approuvais pas, ne désirant qu'être étouffée par leur amour quand la peine me ronge, mais qui était la bonne : attendre patiemment que je demande leur soutien pour intervenir au lieu de forcer ma carapace de pessimisme. Mon homme m'a ainsi écouter plusieurs soirs tergiversé en m'affirmant que je me prend la tête pour rien. Il peut être blessant par sa franchise et employer des mots qui me font hérisser les poils, mais il est toujours dans le juste et quand il en sent le besoin il me rappelle qu'il m'aime car j'en vaux la peine
J'ai pris du temps à me poser un diagnostic mais quand au lycée je me renseignais pour de possibles études en psychologie j'étais tombée sur des articles traitant de l'autisme. Je m'y reconnaissais partiellement, j'y sentais une piste que j'ai balayée avec le temps
C'est que l'année dernière que j'ai réussi à mettre un mot sur mon identité et que j'en ai parlé à mon entourage. Des gens m'ont pleinement reconnu dans les symptômes mais ont affirmé qu'en rien ce mot ne changerait leur point de vue car à leur yeux je reste la même personne qu'ils ont toujours su sensible et maladroite. Pour mon homme il n'appréciait pas que je pose brutalement un mot sur moi et il trouvait que j'étais déjà trop bien intégrée pour être "autiste" Ce qui est un préjugé. J'ai trouvé une bande dessinée racontant les mésaventures, la découverte puis l'épanouissement d'une fille dans mon cas et à sa lecture il a comprit que je devais faire plus d'effort que quiconque pour paraître normale. Que par exemple il me faut travailler les neurones pour comprendre le sens d'une réplique (moquerie ? bonne ou mauvaise ? ordre sérieux ? agir sur l'instant ou plus tard ? état d'esprit de mon interlocuteur ? évaluation des indices que je peux trouver dans son environnement ?) ou pour faire des tâches qui semblent simples mais dont je ne comprend pas l'utilité ou l'urgence donc tend à les oublier ou à les reléguer au second plan
Depuis il admet enfin que je suis différente, mais continu de me traiter comme une personne normale qui ne mérite pas moins qu'une autre de fréquenter ses amis et d'assister à ses repas de famille. Avec qui il voit un avenir commun sur le long terme
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Mon aspi et moi
Non-FictionJe suis née avec une particularité qui me colle à la peau et me suit partout où je vais. Je vous raconte ici des brides de vécus et de songes, de tout ce qui peut traverser l'esprit d'une fille qui s'est toujours sentie différente et qui a décidé d'...