Chapitre 2 : Il neigeait ce jour là

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/!\Certains mots sont susceptibles de choquer les plus jeunes d'entre nous.

Il faisait froid le matin où Victor Magnigner se réveilla pour la dernière fois tel qu'il avait toujours été. Son ventre gargouilla pour signaler à Victor que la tambouille d'hier n'était pas bien passée.
Étourdi par ses maux de ventre Victor se leva et enfila un chandail assez chaud pour pouvoir supporter la bataille qu'allait être cette journée.

Il sortit du minuscule tumulus de terre qu'il s'était creusé pour dormir au sec, et fit quelques pas pour rejoindre les autres poilus sur la table où trônait un jeu de carte, seule distraction que ces hommes avaient dans cette tranchée.
Les poilus ne ressemblaient plus vraiment à de véritables humains d'ailleurs, tous portaient la barbe, hirsute avec le visage couvert de sang et de terre, leurs habits déchirés, troués et couverts de boue protégeaient leurs corps beaucoup plus maigres qu'au jour de leur mobilisation respective.
Lorsque Victor s'approchait, un des cadavres vivants grogna avec un fort accent britannique :

- Bonjour le lève-tard, aujourd'hui on a du singe, réjouis toi ...

C'était Gary, le soldat britannique.
Ce qu'il appelait du singe, s'apparentait en réalité à du lapin.
Victor ne savait pas pourquoi, le grand roux appelait ça du singe mais il ne daignait jamais chercher. Il s'assit simplement sur une banquette et attrapa le bol qu'on lui tendait.
Bien sûr c'était infecte et glacé mais cela lui permettrait au moins de se remplir.
Un des autres poilus, Jean, laissa tomber ses cartes et vint s'assoir à coté de Victor.

- Salut. Prêt pour une nouvelle journée en enfer ?

- On verra bien ...

Un jeune homme habillé d'un chandail jaune et d'un pantalon bleu ciel arriva dans la tranchée par l'un des boyaux, à vélo.
En brandissant un des journaux qu'il portait, il cria :

- La guerre est finie les gars ! YOUPI !

Gary, de sa sécheresse habituelle attrapa un journal tandis que le postier commençait à danser avec un des poilus.

Jean regarda Victor avec des yeux plein d'espoir, la guerre était-elle véritablement finie ? Le 18 avril 1917 resterait-il le jour de l'armistice ?

- Ne vous réjouissez pas trop vite, lança un officier sortant du même boyau que le postier.

Il portait une casquette où figurait une étoile et trois barres jaunes brodées.
Il se démarquait assez facilement de la marée d'hommes affamés grâce à son uniforme de  haut rang militaire. Le nombre de barres jaunes cousues sur son épaule aurait indiqué qu'il était colonel si l'uniforme lui avait réellement appartenu.
L'homme d'une cinquantaine d'années au sourcils éternellement plissés vers le bas qui lui avaient façonné des rides tendues à travers tout le visage, était le sergent Nolan responsable de l'unité militaire de Victor.
Son caractère sec et strict lui avait valu la haine et la crainte de ses hommes.

- Ce n'est la fin de la guerre, c'est l'annonce de la fin de la guerre ! Continua-t-il.

- Clémenceau ? C'est qui celui là ? demanda Gary sans lever la tête du journal.

-Voyez vous, le général Nivelle avait demandé la prise du chemin des dames, poursuivit le sergent Nolan en ignorant l'insulaire, c'était une belle position stratégique ! Elle nous aurait valu la victoire, si ces minables de soldats que l'on y a envoyé avaient réussi à tenir une baillonnette correctement...

- Faut dire que les boches les ont un peu aidé avec leur bombes ! Lança Gary au sergent Nolan.

- Le général Nivelle a échoué lamentablement, dit l'officier en toisant l'anglais, ce fut un véritable massacre, estimez vous heureux d'être à Siegfried et non pas au chemin des dames, et c'est pour ça que de nombreuses, et horriblement inutiles, mutineries ont éclaté partout autour du front. Beurk les idiots qui les avaient menées devaient être influencés par ces anarchiste ou je ne sais quoi en Russie.

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 11, 2020 ⏰

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