Trouble

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Etrangement, ma nuit fut plutôt paisible, lourde de sommeil. Ça fait un bien fou... L'air frais du matin me donne le sourire, je profite de courir un peu avec mon toutou avant de partir pour le travail. Je suis plus en forme que jamais ! Je vais me donner à 200% aujourd'hui !
J'arrive devant la porte, et devinez qui est assise en face de moi avec un sourire qui ferait fondre l'Everest ? Cyrielle... Mon cœur rate un battement mais je lui rends la pareille. Elle a l'air ravi de me voir ainsi, tant mieux, je n'ai pas envie de contenir ma joie aujourd'hui. Nous sommes toutes les deux en salle ce midi. « Je vais tellement me défoncer que je vais même gérer ta zone » lui dis-je avec un air de défi. « C'est ce qu'on verra », me répond-elle sans se démonter. On a passé à s'aider et se taquiner, on a eu quelques fous rires et quelques coups de speed. Un service parfait, néanmoins j'ai réussi à gérer ma zone tout en faisant irruption dans la sienne régulièrement. Elle avoua à contre cœur que j'étais victorieuse, pour cette fois. Je lui énonce les plusieurs raisons pour lesquelles je serai toujours gagnante et elle me gratifie d'une tape sur le bras comme unique réponse. On s'assoit toutes les deux en terrasse pour notre café rituel, enfin tranquilles.

« -J'ai passé un bon service avec toi, me dit-elle tout sourire
- Moi aussi, j'adore te mettre une raclée
- Haha, sérieusement, je suis contente de te voir sourire comme ça.
»

Ses mots résonnent en moi. Elle est sincère, je le vois dans ses yeux. Elle s'inquiète réellement pour moi. Pourquoi ?
« -Merci c'est gentil, mais il ne faut pas t'en faire pour moi, bégayai-je.
- Non mais t'es fascinante ! Tu es toujours là à fond dans le travail, à fond pour aider les autres et leur rendre service, et tu ne demandes jamais rien en retour. Tu ne parles jamais de toi, tu ne te plains pas. Tu dois être sacrément forte comme femme...
-Non pas vraiment, au contraire...
- Tu es trop humble Fanny, vraiment
» souffla-t-elle dans un demi-sourire.

On continue de parler de tout et de rien, mais je vois qu'elle commence à avoir froid, le temps se gâte. Je lui propose de venir parler dans ma voiture, je crois qu'on a envie toutes les deux de rester tranquilles, loin du reste. Elle accepte en me remerciant 3 ou 4 fois.
« - Tu sais, quand on te voit, on ne se doute pas que tu as souffert. Ou même que tu continues à souffrir... elle coupa sa phrase, comme interdite, comme si elle regrettait d'avoir abordé le sujet. J'admets que je me suis tendue, est-ce qu'elle l'a ressenti ?
-J'essaye de ne pas le montrer. Je n'aime pas parler de moi, en fait j'en suis incapable, avec qui que ce soit...
- Mais ça ne te soulagerait pas ?
- Si peut-être, mais c'est difficile... Et puis je ne sais pas grand-chose sur toi non plus
. Je vois qu'elle commence à se réchauffer, et ça me satisfait sans que je ne sache pourquoi.
-Oh parce qu'il n'y a rien à savoir...
-Mais il n'y a pas besoin de grands choses pour faire une histoire tu sais.
-Tu n'as pas tort...
»

Je vois ses yeux se poser sur le vide poche, et je me sens devenir livide tout à coup.
« Mais, tu fumes ? » me demanda-t-elle étonnée. Je lui explique, non sans bafouiller, que je ne fume pas la cigarette, mais qu'un joins de temps en temps m'aide à me détendre. J'attends un jugement ou une indignation, mais je ne reçois qu'un regard malicieux et un sourire.
« -Tu me ferais essayer ? m'interrogea-t-elle doucement
-Euh... Bah... Oui si tu veux mais, tu es sûre ? Je veux dire, tu...
-J'ai l'air de la fille bien trop sage ?
-J'allais dire trop pure, mais c'est toi qui vois
! dis-je en rigolant
-Tu serais étonnée », rétorqua-t-elle avec une étincelle dans les yeux. Sa phrase procure une avalanche de frissons sur mon corps. Je me maudits et reprends mes esprits.
« C'est d'accord, cédai-je, mais plutôt un soir... Tu travailles demain soir ? ».
On resta encore quelques minutes à parler, puis elle dû rentrer chez elle. Elle n'a jamais voulu que je la raccompagne, elle me fit la bise et me gratifia d'un sourire chaleureux qui resta dans mes pensées tout le reste de la journée.

Je ne cesse de me remettre en question. Pourquoi je n'arrive pas à maintenir mes propres barrières ? Comment est-ce qu'elle peut atteindre mon âme si facilement ? Elle me désarme totalement, je ne me reconnais même plus. Ces dernières années ont été tellement difficiles... Et c'est comme-ci elle balayait mes convictions avec un simple regard. C'est idiot ! Je ne sais même pas son passé, ses goûts, son orientation... Comment est-ce que je peux ressentir quoique ce soit pour une personne que je ne connais même pas ? Ces questions et la journée repassent en boucle dans ma tête, encore et encore. Je me mens à moi-même, mais je sais bien que j'ai hâte d'être à demain.

Debout à 7h, alors que je ne prends le service qu'à 11h... La nuit a été longue. Ce n'est pas grave, je vais en profiter pour prendre un peu soin de moi. Je prends une douche aussi chaude que cela m'est supportable. Je choisis des vêtements qui me mettent en valeur, je me maquille... Décidemment, je suis bien atteinte. Au fond de moi, je rêve de lui plaire au moins un peu de cette façon. Et me voilà prête avec mon jean slim, mon débardeur légèrement décolleté, ma longue chemise à carreaux, et mes cheveux soigneusement « coiffés-décoiffés ». J'enfile mes superstars et je me mets en route. Je vais arriver en avance mais peu importe, je ne tiens plus en place chez moi.

J'arrive enfin au resto. Jérémy me voit entrer et lâche un sifflement : « Vous êtes bien en beauté aujourd'hui mademoiselle » me dit-il avec son regard rieur. « Ce n'est que pour vous, mon cher » répondis-je sur le même ton. « J'espère bien » finit-il par dire avant de retourner à sa tâche. J'espérais que notre conversation attire le regard de Cyrielle, et se fut le cas. Elle nous regardait de loin sans que je puisse déchiffrer son expression. Peu importe, ça me suffisait. Je continuai alors à rigoler avec Jérémy en le perturbant dans son travail. Lorsque la sirène de réunion retentit, je m'installais exprès en face de ma cible, je la regardai droit dans les yeux avec un grand sourire. Je la vie se décontenancer un cours instant avant de me rendre la pareil. « Ça a été ce matin ? » demandai-je avec innocence. Elle eue juste le temps de me répondre positivement avant que le manager commence son speech.
Ce midi j'étais en plonge, Jérémy et Cyrielle seraient en salle. J'adorais la laverie, j'étais ravie. Au moment de manger, Jé s'installe à ma droite, Cy à ma gauche. Je n'ai aucun appétit et la savoir si près de moi n'arrange rien. Mon collègue prend tellement de place quand il mange, je lui fais remarquer en lui donnant un coup de coude qui fait tomber sa fourchette. Il part en chercher une autre, et Cyrielle me propose de se décaler un peu. Ce que je fais, mais pas elle. Je me retrouve donc encore plus proche d'elle. Je ne sais si c'est volontaire ou non, mais elle déplace sa jambe contre la mienne. Le contact est simple mais il m'électrise, et elle ne le rompt pas. Je n'ai qu'une envie c'est de poser ma main sur sa cuisse, mais je me retiens. Nous passons la demi-heure ainsi et repartons nous changer pour le service. Je fais tous les efforts du monde pour ne pas laisser aller mon regard lorsqu'elle retire son haut. Mais apparemment ce n'est pas son cas, puisqu'elle me fait remarquer que les bretelles de mon soutien-gorge ne sont pas assez serrées. Je suis petite, il faut toujours qu'elles le soient au max, mais au fil des lavages ça se dérègle forcément. J'enlève donc une bretelle de mon épaule en essayant de la resserrer. « Attends, je vais t'aider. » dit-elle, et avant que je ne dise quoi que ce soit, ses mains sont déjà sur moi. Je me fige. Elle le sent et s'excuse qu'elles soient froides. Mais ce n'est pas ça la cause. Je sens ses doigts faire glisser doucement la lanière sur mon épaule. Elle est si proche que ses longs cheveux chatouillent mon dos. Je ne peux pas réprimer mes frissons mais elle n'en tient pas compte. « Et voilà », conclu-t-elle. Je me détends après cet instant de douce torture et la remercie.

Le service est rude, beaucoup de monde, beaucoup de vaisselle. Mais je me donne à 200% parce que c'est ce que j'aime. Je reçois régulièrement la visite des salles qui me rapportent tout ce qu'il me faut laver et j'ai l'impression que ça n'en finira jamais. Même Cyrielle et Jérémy sont concentrés dans leur travail, ils vont et viennent rapidement, je comprends qu'en salle aussi ce doit être le feu. Deux heures passent et je vois que le débit commence à devenir plus lent, je suis soulagée mais ne perd pas le rythme. Soudain je sens une main se poser sur ma taille et je sursaute. C'est Cyrielle, elle m'apporte un verre d'eau fraîche et un sourire radieux. « Allez, bois ! » me dit-elle, sans enlever sa main. Je sens son corps frôler le miens et ça me redonne bien plus d'énergie que de m'hydrater. Je la remercie, et elle s'en va. Cette fille veut me faire mourir c'est sûr !

A coeur ouvertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant