CHOISIR D'AIMER

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Je sens que mon sang tape dans mes tempes, que mes mains tremblent, que mon corps est sous tension. Je peux déraper à tout moment. Mais surtout, je vais finir par taper un malaise. Parce que j'ai peur de ce que je vais faire, de tout perdre. Je suis terrifié. 

- T'as peur mauviette ?, ricane le gorille méchamment.

- Néo...

La voix de Lino dans mon dos me fait frissonner, comme toujours. La façon qu'il a de prononcer mon prénom me ramène sur Terre. Il a peur pour moi mais en même temps, il attend impatiemment que je réponde. Que je dise à voix haute si je suis gay ou non. Il veut que je le rejoigne, que je m'assume. 

Que je lui prouve que je l'aime. 

Mais je suis flippé. Littéralement. Les retombés, les parents, les amis puis l'entourage moins proches, les gens dans la rues, les regards,... Tout ce qui va suivre ne me rassure pas. Je ne sais pas ce qu'il va se passer et je n'aime pas ça. J'aime ma routine, ma vie actuelle. Je ne veux pas perdre tout ça, je ne veux pas vivre dans l'insécurité, dans la peur de me faire fracturer le visage un jour. 

- J'imagine que ton silence veut dire oui...

Le gorille ricane et je relève les yeux, une sueur froide coulant le long de mon dos. Putain. Nos yeux se confrontent et je déglutis. Je ne peux pas prendre un coup pour Lino. C'est impensable. Inimaginable. Je refuse qu'on me frappe juste parce que j'aime un homme.

- Et ça te pose un putain de problème si c'est le cas ?, je crache alors en me redressant. 

Ses sourcils se froncent et j'esquisse un sourire. Je reprends confiance en moi. Je le sens. Et ça, parce que doucement, comme pour me laisser le temps, Lino vient glisser ses doigts entre les miens et se poste à côté. A deux, on lui fait face. A deux, on est beaucoup plus fort. 

- Tu ferais mieux de te casser pauvre con, je rajoute en apercevant la directrice au loin. Tu n'aimerais pas avoir des problèmes avec les flics.

- Car on peut porter plainte pour propos homophobes.

Lino lâche un sourire enfantin, tout heureux. Et le mien frôle le sadisme tant je meurs d'envie d'enfoncer le crâne de gorille dans le sol. Pourtant, quand il comprend qu'il risque gros, il part vivement et les gens s'éparpillent aussi lorsque la directrice apparaît. 

- Tu l'as fait. 

Je secoue la tête, tentant de me reconnecter à la réalité. Il s'est passé beaucoup trop de choses en quelques minutes. Mais la main de Lino glisse sur ma joue et je rouvre les yeux pour le voir lui. 

Lui au centre de tout, au centre de mon monde. J'expire doucement en comprenant à quel point mes sentiments pour lui pourraient me faire retourner la Terre entière. Je réalise que je n'avais pas vraiment de choix à faire lorsque son regard pétille autant. Je n'aurai jamais dû fuir. 

- J'ai choisi de t'aimer Lino, je murmure alors. Je choisirai toujours de t'aimer.

Et lentement, je me penche pour déposer mes lèvres sur les siennes, pour le lui prouver.

Choisir d'aimerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant