6. Sixtine

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- C'est vrai ?
- Oui, on est devant les bureaux administratifs de la tour de Pise. T'arrives dans combien de temps ?
- Je sais pas. Cela dépendra.
Sixtine raccrocha et s'assit en tailleur sur son lit. Il respira de plus en plus lentement, se laissa envahir par un calme rassurant. Son ectoplasme sortit peu à peu de son corps. Quand son âme fut entièrement dégagée, il se laissa flotter, monter de plus en plus en haut jusqu'à atteindre la douane du Paradis. Là, il se cacha derrière une arche et attendit. Un noble apparut, hautain dans sa démarche. Il ne marcha plus longtemps, Sixtine l'avait attrapé par le col et ramené vers lui. Le noble ne perdit pas la vie ce soir-là, seulement son apparence.
Quelques minutes plus tard, Lucius de Lesotho sortit d'un recoin et se dirigea vers la douane. Les gardes le saluèrent, vérifièrent ses papiers et le soumettèrent au détecteur de métaux. Mais il a à peine le temps de poser un pied au Paradis qu'une main le prit par la manche et il entendit :
- Lucius ! Tu n'as pas oublié le bal du roi, j'espère ?
- Mais euh...c'est-à-dire que j'ai quelque chose d'autre de prévu...
- Enfin Lucius ! Tu ne vas pas annuler ! C'est prévu depuis des mois ! Et puis qu'est ce qui pourrait être plus important que le roi ?
Un projet de guerre dévoilé à l'ennemi ? pensa Sixtine.
Il essaya vainement de convaincre l'ami du noble, mais celui-ci ne voulait rien entendre. Le fils du diable finit par céder, conscient qu'il ne pourrait s'échapper sans attirer l'attention. Quelle poisse !
Le noble l'emmena à travers de longues rues éclairées, tout en lui parlant de l'alliance de sa file et d'un garçon du pays voisin. Après quelques minutes de marche, ils arrivèrent devant la salle de bal. La sécurité était maximale. Çà et là des anges tous plus richement habillé que les autres présentaient leur invitation. Sixtine s'arrêta net lorsqu'il assimila cette dernière information. Le noble continua de parler et de marcher sans s'en rendre compte.
Le fils du diable réfléchit à toute vitesse, fouillant discrètement les poches de son corps d'emprunt, à la recherche de ladite invitation. Ne la trouvant pas, il se vit démasqué quand le noble lui demanda :
- Lucius ! Aurais-tu encore oublié ton invitation ?
Sixtine, voyant sa chance de passer à travers les mailles du filet, répondit par l'affirmative. Son accompagnateur s'approcha des gardes, leur présenta son laisser-passer et leur dit que Lucius était avec lui. Il n'y eu aucun problème.
En rentrant dans la salle de bal, le jeune homme se sentit tout petit face à l'immensité de la pièce au parquet de bois massif si brillant qu'il faisait office de miroir. Il y avait des étoiles plein les yeux. Ne restait plus qu'à attendre quelques heures ici, puis s'éclipser pour aller rejoindre en vitesse ses acolytes et sa sœur.
C'est alors qu'une conversation lui parvenu :
- Ah votre Majesté ! Je vous cherchais.
- Qu'y a-t-il, Monsieur le Premier Ministre ?
- Je voulais vous raconter la mascarade que l'on m'a servie il y a de cela une heure. On m'a dit que le diable allait attaquer prochainement. Quelle farce vous ne trouvez pas ?
Comment il le sait ? Syne ! Elle va voir celle-là, quand je l'aurais ! Heureusement pour nous, ils croient tous à une blague...
- Si en effet, nous nous craignons plus le diable depuis longtemps ! Je dois vous laisser mon cher ami, l'on joue les danses.
Le sang du demi-diable ne fit qu'un tour. Ni une, ni deux, il se précipita sur le Premier Ministre.
- Monsieur ! J'ai entendu par mégarde votre discussion et j'aimerais savoir qui a osé vous raconter un tel mensonge.
- Un très influent professeur, le sieur Benjamin.
- Etait-il seul ?
- Seul ? A y bien réfléchir, il était avec sa secrétaire, je me demandais d'ailleurs...
Athanase de Bavourt ne finit pas sa phrase, Sixtine avait déjà filé. Il courrait à travers les rues du Paradis, à la recherche de ses acolytes, Jacob et Joseph. Après quelques minutes de course effrénée, le jeune homme aperçu les cheveux noirs méchés de bleu, rose, rouge et jaune symbolique de la belle mais morte Jacob. Joseph se tenait en retrait, caché par l'ombre du proéminent pigeonnier des bureaux administratifs dont les communications se faisaient par pigeons voyageurs.
Entre les deux partenaires se trouvait une jeune fille en pleurs.
- Je ne sais pas ce que vous me voulez...je ne dirais rien c'est promis...je vous en supplie, ne me tuez pas...
Sixtine s'approcha, lui prit délicatement le menton et lui releva la tête. Puis, il déclara :
- Ce n'est pas ma sœur.
- Je vous en prie...relâchez moi...je n'ai rien à voir avec tout ça...j'ignore tout de vos plans...je ne pourrais rien dire...
- Shhht, susurra le fils du diable, il ne faudrait pas gâcher ce si joli minois, n'est-ce pas ?
Indécise, l'adolescente réfléchit puis décida qu'aller dans son sens aiderait peut-être à sa survie. Elle acquiesça.
- Comment t'appelles-tu ?
- Ma-Marion, monsieur.
- Eh bien Marion, tu m'as vu. Et éminent personnage que je suis, je préférerais garder mon anonymat. Tuez-la, ordonna-t-Il.

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