Dixième

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Quelques jours étaient passés depuis la soirée.

Je n'avais revu Terrence depuis. Devant laver mon linge, j'espérais le croiser à la laverie. Si non, j'irais chez lui.


La présence d'un ami, en effet, me manquait. J'avais l'impression de le connaître depuis toujours, et en même temps, de ne rien savoir de lui. Quel paradoxe.



La vielle dame de la dernière fois était à la laverie. Un magazine entre les mains, elle semblait plongée dans un article. À ses pieds, son chien sautillait en remuait la queue. Elle me salua furtivement puis repris sa lecture.


Je mis mes vêtements à laver puis m'asseyait.

La folle allure de Christian Bobin. Ce livre était pour moi un chef d'œuvre d'émotions discrètes. Le genre de livre auquel on pense lorsque le soleil se couche. Un mélange de liberté et un soupçon de bonheur.

Le temps passa, mais Terrence n'était toujours pas là. Je décidais donc de me plonger dans ma lecture, espérant que le temps passe plus vite.

La vielle dame sortit.

Ne restait plus que le bruit de la machine qui tourne en fond.


Ma machine se termina et je me levais pour récupérer le linge.


- T'a fais tomber une culotte.



La voix de Terrence me fit sursauter.


Je ramassais ma culotte en vitesse et me retournais, gênée.


- Merci.


Terrence était beau. Pourtant, loin d'être une fille superficielle, je ne pouvais retenir les élans de mon cœur lorsque je le voyais.

Un coup à l'âme.


- Tu vas bien ? me demanda Terrence.

- Oui, je profite. Dans deux semaines, c'est la fin de l'été.


Il soupira et répéta doucement :« La fin de l'été.»


Après avoir mis ses affaires en machine, il s'assit à mes côtés.


- Tu habites seule, dans ton appartement ?


- Oui. Il était à ma grand-mère, et quand elle est décédée, je l'ai reçu en héritage. C'est petit, mais c'est déjà beaucoup, tu sais. En fait, je viens l'été. C'est un p'tit coin de paradis.

Terrence esquissa un sourire.

- Et toi, poursuivais-je, tu vis seul ?

- Oui. Je vis ici à l'année. Je suis des cours d'art dans une école pas loin.

Nous continuâmes à parler un bon moment, et j'appris ainsi que Terrence avait un chat et qu'il aimerait vivre plus tard de son art.

On ria beaucoup.

C'était un doux après-midi.



Lorsque ma machine se termina, je rassemblais mes affaires dans le panier et m'apprêtais à partir. Je devais encore prendre l'autobus pour aller faire mes courses dans le village d'à côté. L'épicerie était fermée pour la semaine et je manquais cruellement de nourriture.


Terrence se leva et s'approcha de moi. Ses yeux brillaient d'une lueur céleste et j'aurais aimé me perdre dans leur éclat.

- Je t'aime bien, Isaure.


Et l'instant d'après, ses lèvres se posaient délicatement sur les miennes. Il posa ses mains de part et d'autre de mon visage et approfondi son baiser. Moi, je me liquéfiais sous la force des sentiments. Son parfum s'insinuait dans mes narines et l'essence m'ornait telle la tiare sublime la reine.















Et en toile de fond, une machine à laver.












....

HaremOù les histoires vivent. Découvrez maintenant