Bloom

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Je suppose que c'était un peu comme une fête foraine, enclenche la machine, et je te rencontre au point culminant, là où on voit les étoiles et la ville défile devant nos yeux. J'avais tellement à te montrer, et t'avais tellement à m'apprendre, je t'ai ouvert les portes de mon jardin secret, c'est te dire à quel point j'étais idiot. Tout ça c'était rien que pour toi, c'est vrai.


Ce soir là y'avait la lune au-dessus de nous, encore,toute la nuit elle était là, elle nous couvrait de son voile argenté qui sublime tous les corps, même ceux de deux personnes paumées et abîmées comme toi et moi. La mer était magnifique,noire, tumultueuse, effrayante. Elle engloutissait tout, les rires vagues qui s'échappaient de nos bouches pâteuses et les trébuchements sur le sable. T'en avait plein les Converse, du sable,ça te faisait chier, ça me faisait rire, ces Converse que tu quitte jamais, peu importe le temps, peu importe l'occasion.

Puis tu m'as chamboulé quand t'as commencé à te déshabiller, je suis resté planté là, à t'observer. J'ai laissé mon regard courir sur la peau de ton torse nu quand ton pull s'est échoué par terre, sur tes clavicules que j'avais envie de mordre,d'embrasser, de couvrir de suçons, sur ton piercing au téton qui scintillait dans le noir, brin argenté, et sur ton nombril qui m'aurait guidé plus bas si la gêne ne m'avait pas rosit les joues.Alors je me suis détourné quelque peu, j'ai retiré mon pyjama,lentement, des pensées tourbillonnaient dans ma tête, toutes à propos de toi, et quand j'ai relevé les yeux, t'étais là, dans toute ta beauté, livré à la nature, au ciel, à la mer, à la lune. Enfoncé dans l'eau jusqu'aux mollets, j'avais une vue prenante sur tout ton corps, sur la naissance de tes cheveux que j'avais envie d'agripper, sur tes épaules un peu voutées, sur tes omoplates, sur le bas de ton dos, sur tes cuisses, tout, tout et cette partie douce qui me donnait tant envie, juste à la naissance de tes fesses. Puis tu t'es dérobé, t'as glissé plus loin, plus loin de moi, sans trop t'éloigner, tu m'attendais, donc j'ai retiré mon caleçon, et j'ai marché jusqu'à toi, frissonnant au contact de l'eau glacée, ou à celui de tes yeux dans les miens et sur mon corps à leur tour, je ne sais pas. On s'est regardé longtemps, ça m'a semblé durer des heures, peut-être que c'était le cas, un sourire aux lèvres, les corps tremblants, il faisait froid, mais je brûlais encore une fois,j'avais besoin de toi. Qui c'est qui a fait le premier pas, je m'en souviens plus, c'est flou tout ça, mais on s'est embrassés, encore et encore, s'arrêtant à contrecœur pour respirer, les larmes aux yeux par tant de désir, le cœur prêt à bondir. Tes lèvres avaient toujours cet arrière goût de fraises et de cigarettes,cette odeur qui te suit partout, qui embaume chacun de tes gestes,vestiges de quoi, je ne sais pas, mais ça me tentait bien de savoir.J'osais pas te toucher, mais tes mains dans mon dos me faisaient cramer, je voulais plus, les baisers sur le toit de ta voiture c'était bon – trop bon –, mais j'avais besoin de plus, je voulais te sentir partout en moi et sur moi, je voulais que tu me touche et que tu t'aventure sur ma peau, sur mon corps, sans aucune gêne. Je te l'ai répété en boucle, susurré au coin de l'oreille,le visage dans ton cou, mes lèvres posées sur ton lobe, avec parfois mes dents qui s'y accrochaient doucement, je l'ai dit de mille façons différentes jusqu'à ce que tu le fasses. Touche moi,touche moi, touche moi, touche moi, touche moi. Je t'ai peut-être demandé de tenir ma main si j'avais peur, et de prendre une seconde,ralentis, on a le temps, j'avais mal, mais est-ce que c'était pas mon cœur qui saignait de se savoir embarqué dans un tourbillon sans fin avec toi, parce que pour tout te dire j'ai fleuris juste pour toi, et si c'était à refaire je le referais, ouais, j'ai fleuris juste pour toi. C'était le moment parfait, celui que j'ignorais avoir attendu jusque là, on dansait en osmose avec la mer, et j'étais à bout de force, enseveli sous ton désir et le mien, nos corps chauds et moites traversés par la piqure froide de l'eau,collés, emboîtés, je m'accrochais à toi, peur te tomber à tout moment, de sombrer sans rien pour me rattraper, surtout peur de te sentir glisser hors de moi, de ne plus avoir ta bouche sur ma peau frémissante, de me détacher de ton corps divin.


On a rien dit sur le trajet du retour, deux heures de marche jusqu'à chez moi, tu voulais me montrer le lever du soleil,il était cinq heures du mat', j'étais confus, ça change pas trop de d'habitude, et je m'arrêtais à chaque rue pour t'embrasser, puis tu t'échappais en riant. Et moi j'ai cru que ça pouvait durer,parce que j'avais encore ton goût délavé de fraises et de cigarettes au creux de ma bouche.

Strawberries & CigarettesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant