4-Terre de Feu (G)

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Le train s'éloignait petit à petit des bâtiments londoniens gris et monotones. La journée avait été chargée pour notre petite bande. Ce matin même, ils avaient quitté le ciel parisien avec enthousiasme.
L'année était déjà finie et enterrée, le soleil brillait haut dans le ciel et les vacances s'annonçaient épique.

- chifumi. Chifumi. CHIFUMI ! Je t'ai défoncé ! Je prend le lit à baldaquin na ! fanfaronait la petite Lucie

- C'est pas juste elle triche ! ronchonna Antoine

- N'importe quoi on peut pas tricher au Chifumi ! C'est dur d'assumer qu'on a perdu mon pauvre vieux...répliqua Lucie avec condescandance.

- Parle pour toi ! Je sais que tu triche et je le prouverait.

La conversation, quoique passionnante, avait l'air de passablement ennuyer le reste de la petite bande.

- Mais taisez vous ! Ça fait une demie heure qu'on entend que vous dans tout le train ! S'écria Mary

- Quand est ce qu'on mange ? répliqua son voisin

- Et toi Baptiste tu arrête de penser à ton estomac ! Regardez plutôt ce paysage magnifique. Nous entrons dans les Lowlands alors c'est la mise en bouche...Admirez la beauté sauvage de ces terres. Admirez cette forêt au loin qui veuille sur l'Écosse dans toute la noblesse de leur repos...Admirez...

- TA GUEULE MARY s'exclamèrent-ils tous en choeur avant d'exploser de rire.

- Ça promet...grommela Jade.

Le train serpentait tranquillement entre les vertes prairies des Lowlands qui s'étandaient à perte de vue.
Mary regardait presque amoureusement les paysages de son enfance, et d'ailleurs, pensa Natacha, ils n'avaient pas volés leur réputation. Ils étaient vraiment à couper le souffle.

Une question incongrue résonna soudain dans le compartiment.

- Mary ? Tu sais parler gaélique ?

Pour n'importe qui, c'était un vieux dialecte encore plus oublié que le grec étudié avec monsieur Roger-Vellin, mais pour Mary...c'était différent.
Elle portrait dans son coeur un amour et un dévouement profond pour sa patrie, l'Écosse. Dans ses yeux brillait une flamme qu'on ne voyait nulle part ailleurs. Elle n'avait qu'une devise, <<Pour l'Écosse, le Roy et Dieu >> et elle y tenait plus que tout, d'ailleurs, elle était jacobite et pour elle, la grande tragédie de l'histoire c'était Culloden. Son petit côté passéiste lui ajoutait un charme d'antan et faisait souvent sourire ses amis, amusé par ces valeurs qu'il voyaient comme un peu...démodées. Malheureusement, elle ne parlait pas gaélique, par manque de temps et de professeurs, ou alors, seulement deux ou trois mots par ci par là, avait elle répondu. Cela manquait cruellement à son éducation. En plus d'aller à l'école, ses parents avaient insisté pour qu'elle fasse de l'escrime, de la danse, de l'équitation et du violon. Heureusement pour elle, son impatience et son manque de sang froid avait poussé ses parents à la faire arrêter le violon, qu'elle ne supportait plus. À sa plus grande déception, elle avait du arrêter l'escrime en 3ème pour pouvoir continuer l'équitation, mais elle s'entraînait chez elle parfois, seule dans sa chambre. Son niveau est remarquable chez une jeune fille de son âge. Cela ne paraissait pas la troubler et elle était une fille joyeuse et presque ordinaire qui regardait par la fenêtre de son train défiler le paysage.

Le voyage s'était déroulé dans une bonne humeur générale. Les blagues d'Antoine et la vivacité de Lucie et Mary y étaient pour beaucoup.

Il avait fallu descendre du train et ce fut toute une aventure, vu la quantité de valises prises par les filles.

La petite bande était descendue dans une gare de campagne, seule sur le quai désert, seule face au pays sauvage.

- À oui c'est carrément pommé ici ! s'était exclamé Antoine.

Étoile De FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant